La société civile mauritanienne estime que l’immense patrimoine dérobé par les responsables publics sous le régime de l’ancien président Ould Abdel Aziz appartient de plein droit au peuple. Témoignages.
Depuis plus de 70 jours, la Mauritanie vit au rythme d’une enquête préliminaire ouverte sur instruction du parquet anticorruption et menée par la police chargée de la répression des infractions à caractère économique et financier. Ce, suite à la transmission à la justice d’un rapport sur la décennie de gouvernance de Mohamed Ould Abdel Aziz (2008/2019) établi par des députés.
Au «pays du million de poètes» qui souffre d’une gouvernance affairiste depuis plus 42 ans, cette enquête prend les allures d’une traque des biens mal acquis. Quelle est la position de la société civile dans ce contexte? Deux acteurs apportent leur éclairage suite à la mise sur pied d’une Alliance pour le recouvrement des biens mal acquis.
Celle-ci présente l’enquête préliminaire comme «une avancée dans le domaine de la lutte contre la corruption, le détournement de deniers publics et l’impunité». Dans un document rendu public fin août, cette Alliance appelle tous les segments de la société civile à s’impliquer pleinement (en se constituant partie civile, en participant à la mobilisation de l’expertise, en sensibilisant et en mobilisant) avec pour objectif le recouvrement des biens mal acquis.
Mohamed Abdallah Ould Bellil, président de l’Observatoire mauritanien de lutte contre la corruption (OMLC) rappelle le contexte et les éléments du processus en cours. Notamment le fait que plusieurs organisations de la société mauritanienne se soient senties interpellées par la situation et aient décidé de prendre leurs responsabilités en vue de la restitution des biens mal acquis.
Selon lui, ces biens qui constituent un trésor et peuvent apporter une contribution appréciable du pays reviennent de droit au peuple. Par ailleurs, cette action revêt une dimension pédagogique envers ceux qui assument des responsabilités actuellement, en rappelant le principe de la reddition des comptes. Bellil approuve «une action bénéfique et sanitaire».
Echo identique chez Ba Aliou Coulibaly, membre de la Coalition nationale de l’initiative pour la transparence des industries extractives (CN/ITIE), qui juge le principe du recouvrement des biens mal acquis en tous points conforme à la démarche de l’ITIE.
Il insiste particulièrement sur l’importance de la niche des industries extractives, dans les problèmes de gouvernance, notamment la corruption et déplore le retard de la Mauritanie dans la mise en œuvre des recommandations de l’ITIE.
Coulibaly s’intéresse à la notion du propriétaire réel (et pas seulement légal) dans le processus d’octroi des permis en matière d’industries extractives, qui constitue une véritable gageure pour la Mauritanie au regard du processus de conformité à l’ITIE.
Par notre correspondant à Nouakchott
Seck Amadou