29-07-2009
paru dans Ouest France
‘’Votre article est un ‘’scoop’’ et l’on tomberait, à genoux,
devant tant de professionnalisme, si l’on n’était pas déjà, autrement et très
solidement, informé’’
L’article de Florence
Pitard, «Ould Brahim, esclave en Mauritanie au XXème siècle», paru à la Une
du quotidien français «Ouest-France», dans son édition-web du dimanche 10 mai
2009, a provoqué un certain nombre de réactions. Voici celle d’Ian Mansour de
Grange, un français musulman, résidant, depuis une dizaine d’années, en
Mauritanie, prix Chinguetti 2006, que Le Calame a présenté dans ses colonnes,
il y a une quinzaine de mois de cela…
Madame, votre article, paru à la Une d’Ouest-France, le 10 mai 2009,
entendait commémorer, «comme tous les 10 mai », l’abolition de l’esclavage.
Il appelle des commentaires. Sur la date, tout d’abord. Le 10 mai, retenu,
par Jacques Chirac, en 2006 – nous en sommes, donc, à la troisième édition,
seulement – ne marque, en fait, que l’adoption, en 2001, de la «loi tendant à
la reconnaissance de la traite de l'esclavage en tant que crime contre
l'humanité», proposée et votée, à l'initiative de la députée guyanaise,
madame Christiane Taubira-Delanon. Au moins trois autres dates auraient pu
servir de référence, française, à ce souvenir. La première, le 4 avril,
rappelle 1792 et la proclamation de l’égalité des droits entre les blancs et
les «libres de couleur», un concept pour le moins équivoque. La seconde, le 4
février, marque un vote, beaucoup plus explicite, de la Convention, en 1794,
sur l’abolition de l’esclavage dans toutes les colonies. La troisième, le 27
avril, évoque le décret de 1848 – soit 58 ans après la loi de 1794 – qui
tendit à faire appliquer celle-ci, obligeant les négriers à la clandestinité.
Un peu partout. Sauf en Algérie française et dans la plupart des territoires
de l’A.O.F., dont la Mauritanie, conquise au début du siècle suivant, j’y
reviendrai.
Un long chemin donc. Qui se souvient de l’ordonnance du roi Louis le Hutin,
datée de 1315, proclamant que le sol de France affranchit quiconque y pose le
pied? Probablement pas les prostituées slaves, asiatiques ou africaines qui
battent, en 2009, le pavé de nos cités gauloises, sous l’œil attentif de nos
représentants de la loi… On entre, ici, dans ce qu’il est convenu d’appeler
«l’esclavage moderne», qui, de la traite des personnes au travail forcé, en
passant par la servitude pour dettes, toucherait, dans le monde, un demi-milliard
d’humains. Et combien en France, puisque vous parliez, madame, de la
commémoration, française, de l’abolition de l’esclavage?
On compte douze à quinze mille prostituées adultes dans l’hexagone. Toutes
«consentantes»? Près de deux cent mille asiatiques, Chinois et Philippins, en
majorité, seraient employés, dans des ateliers clandestins et des conditions
plus que minimales de survie. En ce qui concerne l’esclavage domestique et
d'après les estimations du Comité Contre l'Esclavage Moderne (CCEM), quelques
milliers de jeunes domestiques seraient «employé(e)s» illégalement, en
situations objectives d'asservissement, caractérisées, notamment, par la
confiscation des papiers d'identité, des horaires de travail pouvant aller
jusqu'à 21 heures par jour, 7 jours sur 7, pour des rémunérations faibles ou
nulles, l'isolement – de la famille, des voisins – le tout pouvant être
accompagné de brimades physiques et d'abus sexuels. Des études du même comité
montrent que ce type de travail forcé, en France, concerne, principalement,
des victimes originaires d'Afrique et d'autres pays pauvres. Le code pénal
(articles 225-13 et 225-14) condamne le fait d'obtenir, d'une personne
vulnérable, «des services sans rémunération» ou de la soumettre «à des
conditions de travail ou d'hébergement contraires à la dignité humaine».
«Mais il ne s'agit que de petits délits, passibles de deux ans
d'emprisonnement et de 500.000 francs d'amende», explique Céline Manceau,
directrice de la cellule juridique du CCEM, «le fait de vendre ou de louer
une personne n'est pas puni», proxénétisme excepté. Enfin, si les
«exploitants» de ces lucratives affaires sont, le plus souvent, d’origine
étrangère, 20%, tout de même, sont français. Comme vous et moi, madame. Et ne
parlons pas de leurs «clients», français, eux, à plus de 75%...
Haratine et non esclaves
Pourtant, ces réalités vous ont semblé suffisamment marginales pour les
négliger dans votre émouvante évocation. L’Ouest de la France, si impliqué
dans le commerce triangulaire des colonies, doit entendre, on vous comprend
bien, que tout cela, c’est du passé, lointain, que l’esclavage, oui, ça
existe, mais ailleurs, notamment et en particulier, chez les arabes et autres
arabo-berbères; tiens, un exemple, au hasard : la Mauritanie. Y croupiraient
– je vous cite – «des centaines de milliers» d’individus, «frères et sœurs
d’infortune», noirs, liés aux «maîtres maures ou arabo-berbères», par les
«traditions, l'illettrisme, la misère, les croyances religieuses, plus
solidement que [par] des chaînes». Et d’enchaîner, justement, «la moitié des
3,5 millions de Mauritaniens seraient esclaves ou Haratine».
C’est un scoop et l’on tomberait, à genoux, devant tant de professionnalisme,
placardé à la Une d’un journal aussi sérieux qu’Ouest-France, si l’on n’était
pas déjà, autrement et très solidement, informé. Les Haratines (en français :
les Affranchis), qui représentent, effectivement, 45 à 50 % de la population,
ne sont, en aucun cas, des esclaves. Disons, pour simplifier, que ce sont des
Négro-Mauritaniens hassanophones, c'est-à-dire parlant le Hassaniyya, le
dialecte arabo-berbéro-africain dominant en Mauritanie, commun, notamment, à
tous les Beydanes (Blancs, qui sont, parfois, beaucoup plus noirs de peau que
certains Haratines…). Ces Haratines, ou Maures noirs – un concept plus large
et neutre, promis à un bel avenir – sont, majoritairement, des descendants
d’esclaves affranchis des Beydanes ; de plus en plus rarement, maintenant,
esclaves affranchis eux-mêmes. Par ailleurs, 20 à 25 % de la population sont
qualifiés de Koris ou «Négro-Mauritaniens», sans relation traditionnelle de
sujétion aux Beydanes, et parlent un autre dialecte africain, peu ou prou
arabo-berbérisé : Hal Pulaar (ceux qui parlent la langue peule), Soninké,
Wolofs et Bambaras.
Tous ces groupes linguistiques,
à l’instar de la grande majorité de leurs homologues africains – comme, d’une
manière plus générale encore, un peu partout sur la planète Terre – ont
d’autant plus longtemps maintenu, en leur sein respectif, des castes
serviles, qu’ils survivaient en situation de pauvreté. Mais la spécificité du
groupe Hassaniyya est, incontestablement, qu’il a, par le passé, entretenu
plus d’esclaves que de maîtres. Incriminer, ici, les «croyances religieuse »
– on entend bien, madame, l’allusion à l’islam – dénote, cependant, une autre
carence dans votre étude. En tant que religion, l’islam a, non seulement,
prohibé l’esclavage d’un musulman, homme ou femme, mais, aussi, exigé un
traitement humain – habillement, logement, instruction, intégrité physique et
morale – des «captifs», pour reprendre l’euphémisme des colons et militaires
français, aux XIXème et XXème siècles, fortement enclins à adapter la
législation hexagonale aux «réalités africaines». De fait, la stricte
application des enseignements du prophète Mohammed – Paix et Bénédictions sur
Lui – aurait dû entraîner un dépérissement progressif de la situation
servile, en terres musulmanes. Cependant, l’entretien de la «demande»
commerciale internationale – très notablement surmultipliée du XVIIème au XXème
siècle, où les négriers français, Bretons en particulier, ont joué un rôle
important – a marqué l’organisation sociale saharo-sahélienne, notamment au
sein des tribus commerçantes…
Et la Guadeloupe?
La permanence culturelle
de la relation maître-serviteur, au-delà de l’affranchissement, est assez
analogue à celle de la relation colonisateur-colonisé, au-delà de
l’indépendance politique. Il serait bon, madame, dans votre attention à
l’évolution de la condition humaine, de vous pencher sur celle des complexes
de supériorité et d’infériorité, souvent non-dits, qui, s’alimentant de
clichés-réflexes, parfois véhiculés par les médias, perturbent, visiblement,
la vie sociale française. Alors que plus d’un cinquième des Français auraient
un parent originaire d’un pays anciennement colonisé, les trois-quarts de
ceux-là se plaignent de traitements discriminatoires. En Guadeloupe – un
département français, rappelons-le – où les Négro-Français – français, comme
vous et moi, madame – constituent 90 % de la population de l’île, les cadres
supérieurs noirs se comptent sur les doigts des deux mains… Assez analogue,
dis-je. Car il existe, en Mauritanie, et, d’une manière générale, dans les
sociétés musulmanes, une particularité, d’ordre religieux, qui donne au lien
dominant/dominé un singulier – et ambigu – potentiel d’évolution. En effet,
l’affranchissement ne doit, jamais, rompre le lien d’humanité. La relation
maître/serviteur, une fois juridiquement libérée de sa sujétion, devient une
relation de clientèle privilégiée ou mawla (rapprochée) qui oblige les deux
parties à une assistance mutuelle, en cas de besoin.
Dans le village où
j’habite, peuplé, à 90 %, de Maures, blancs et noirs pratiquement à part
égale, tous les esclaves furent affranchis, au cours des années 70. Plus de
la moitié ont préféré demeurer à proximité de leur ancien maître. A l’école,
cependant, où la quasi-totalité des enseignants sont des Maures blancs, trop
peu d’enfants Haratines parviennent, quarante ans après cette émancipation,
dans le premier tiers des classements. Je suis, moi-même, marié à une Maure
noire qui a arrêté ses études en fin de cycle primaire, au début des années
90, persuadée du traitement discriminatoire des résultats scolaires. Mais sa
sœur et plusieurs de ses cousines, un tiers environ des filles de cette
famille, fixée, à Nouakchott, dans les années 70, sont allées jusqu’au bac,
avec des fortunes diverses. Deux d’entre elles fréquentent, actuellement,
l’Université. L’une sera, prochainement, diplômée d’enseignement…
C’est donc dire que la
situation évolue ; d’autant plus, d’ailleurs, que le cas de cette famille
devient banal. Celle-ci émerge lentement, mais plus vite, tout de même, que
si elle était restée en brousse, de la pauvreté et de l’ignorance. Lentement,
car les places sont chères, dans ce petit marché de trois millions et demi
d’individus, en construction depuis, à peine, un demi-siècle. Les premières
personnalités publiques hartanies n’apparaissent qu’au cours des années 80.
Auparavant, c’est-à-dire, les vingt premières années de l’indépendance – qui
sont aussi, spécificité mauritanienne, celles de multiples naissances :
administration publique, sédentarisation, urbanisation, socialisation
citoyenne, pensée technique – s’étaient déroulées sous l’égide d’un relatif
consensus entre les Beydanes et les Négro-Mauritaniens non-Haratines, à
l’exclusion, également, des esclaves de l’un ou l’autre bord (Abid, chez les
Beydanes ; Maccube, chez les Hal pulaar ; Komo, chez les Soninké). Dans ce
contexte très sélectif, les Beydanes pouvaient se considérer largement
majoritaires et truster la majeure partie des pouvoirs (politique, économique
et financier).
L’émergence de la réalité
hartanie modifie, totalement, la donne. La stratégie beydane consiste, alors,
à développer une logique nationaliste arabe, autour de l’identité
linguistique Hassaniyya (grosso modo, 4 Mauritaniens sur 5), tandis que celle
des Hal Pulaar, des Wolofs et des Soninké, s’appuie sur une logique
nationaliste négro-africaine (2 Mauritaniens sur 3), qu’on espérait agglomérer
avec l’usage de la langue française. Sans entrer, ici, dans les détails,
complexes, de cette dialectique, parfois dramatique – les évènements de 89 à
91 et la question, extrêmement sensible, du passif humanitaire qu’ils ont
généré, en témoignent – disons qu’aujourd’hui, la tendance dominante, dans
toutes les communautés ethno-linguistiques, vise à la réconciliation. A cet
égard, le choix, par le Front National de Défense de la Démocratie (FNDD) –
une coalition de partis opposés au putsch du 6 août 2008 – du leader hartani,
Messaoud Ould Boulkheir, comme candidat à l’élection présidentielle du 18
juillet, signalait l’évolution, décisive, des mentalités. Une part importante
de la classe politique et de l’électorat – la majorité ? Question désormais
pertinente, malgré les probables manipulations du scrutin – admet, en 2009,
l’idée qu’un hartani puisse présider aux affaires de la République Islamique
de Mauritanie.
La pauvreté, nouvelle
forme d’esclavage
Et l’esclavage, dans tout
cela? Que ce soit sous sa forme traditionnelle ou moderne, tempéré ou non par
les préceptes humanistes de l’islam, il perdure, en Mauritanie ; se
transforme, comme ailleurs. Dans quelle proportion et selon quelles
modalités? On se souviendra, ici, d’une définition, simple et claire du
phénomène : «L’esclavage est, d’abord, le fait d’user, de disposer et,
parfois, d’abuser des services d’une personne qui ne peut exprimer,
librement, sa volonté. […] L’esclave est, avant tout, un être dépossédé de sa
personne » (SOS-Esclaves, rapport 2001). A commencer par son incapacité à
assumer sa propre subsistance. Persistance, séquelles ou métamorphoses, c’est
sous fond d’évolution de la pauvreté, tout d’abord, qu’il convient
d’apprécier la question. En 1990, plus d’un mauritanien sur deux (14 sur 25)
vivait en dessous du seuil de la pauvreté, avec des disparités importantes (6
sur 25, à Nouakchott, mais 3 fois plus, en zone rurale du fleuve Sénégal) ;
en 2008, ce pourcentage, selon le MAED (Ministère des Affaires Economiques et
du Développement), serait descendu à près de deux sur cinq (10 sur 25). Ici
aussi, les choses évoluent…
Selon l’ambassade américaine, il y avait, en 1994, entre quelques milliers et
quatre-vingt-dix mille esclaves en Mauritanie, ces chiffres ne prenant pas en
compte les communautés négro-africaines. En 2001, SOS-Esclaves, une
association mauritanienne parmi les plus actives contre ce fléau,
préfère, elle, ne pas avancer d'estimations chiffrées, mais se dit
«convaincue – compte tenu de sa connaissance du pays, de son expérience et de
ses relations avec les couches déshéritées – que cette proportion est loin
d'être négligeable». Expression un tantinet malheureuse, au demeurant : y
aurait-il cinq, un, voire zéro virgule un (trois mille personnes) de la
population mauritanienne en situation d’esclavage, traditionnel ou moderne,
que, dans tous les cas, la proportion ne serait, jamais, «négligeable»...
Quoiqu’il en soit, une chose est, désormais, certaine : en Mauritanie,
l’esclavage, sous toutes ses formes, est condamné, désormais, à la
clandestinité. Mais, ici, comme ailleurs, cela n’aura pas été l’œuvre d’un
jour. La première abolition, par l’administration coloniale, au début du
siècle dernier, fut, largement, anodine, les autorités françaises tenant, en
priorité, à s’attirer les bonnes grâces des notabilités autochtones. Soit dit
en passant, un examen, plus attentif, de la période coloniale vous
permettrait, madame, de constater qu’un nombre, non-négligeable, là non plus,
de nos compatriotes expatriés «profitèrent», à l’occasion, de cette exception
opportuniste… Les choses sérieuses commencent avec l’indépendance et
l’affirmation, en 1960, de l’égalité de tous les Mauritaniens devant la
Constitution. Suit, une déclaration d’abolition, le 5 juillet 1980, par un
communiqué du Comité Militaire de Salut National (CMSN), prélude à
l’ordonnance n° 81-234 du 9 novembre 1981 qui ne connut aucun décret
d’application… En 2003, les autorités promulguent une loi relative à la
traite des personnes : la vente des enfants, leur incorporation dans l’armée,
la prostitution, la vente d’organe, etc. Mais ils refusent d’y inclure
l’esclavage, invoquant le prétexte que le sujet a été, déjà, traité.
Manifestement, certains, et non des moindres, traînent des pieds pour entrer,
de plain pied, dans l’ère démocratique…
Cependant, la chute d’Ould Taya, en août 2005, après un quart de siècle de
dictatures militaires, fait souffler un grand vent de liberté sur le pays, la
société civile prend, enfin, son essor, faisant, notamment, entendre la voix
des défenseurs des droits de l’Homme, et, le 8 août 2007 – 26 ans après
l’ordonnance de 1981 – la loi criminalisant – et non pas tendant à
criminaliser – l’esclavage est votée par les deux chambres parlementaires.
Permettez-moi, ici, de céder la parole à monsieur Boubacar Ould Messaoud,
président de SOS-esclaves : «L’esclavage est désormais reconnu comme un crime
en Mauritanie. Cela veut aussi dire que la loi pénalise tous les délits
commis contre une personne considérée comme esclave [voir, plus haut, la
définition du concept, NDA]. Par exemple : la captation d’héritage, le
travail non rémunéré, le mariage forcé ou le droit de cuissage, considérés,
maintenant, comme un viol. Un homme qui oblige une femme à devenir son
épouse, ou, au contraire, l’empêche de se marier, risque de un à trois ans
d’emprisonnement. Cette peine peut être assortie d’une amende allant de
100.000 à 200.000 ouguiyas (de 290 à 580 euros). Un agent de l’administration
qui ne donne pas suite à un signalement pour esclavage est passible de 2 à 5
ans de prison. La loi assure, aussi, la gratuité des procédures judiciaires
et autorise les associations de défense des droits de l’Homme à assister la
victime devant les tribunaux. C’est une situation complètement nouvelle.»
Même si, la récente élection, contestée, d’un putschiste, à la présidence de
la République mauritanienne, laisse, plutôt, augurer, aux dires du président
de SOS-Esclaves, d’une régression à l’ère dictatoriale…
Et certes : l’arsenal
juridico-légal ne garantit pas la bonne conduite des citoyens et la
situation, en France, plus de 150 ans après le décret de 1848, prouve à quel
point la lutte contre l’esclavage, sous toutes ses formes, dépasse,
largement, les tribunes des parlements et des prétoires. «Ne fais pas à
autrui ce que tu ne voudrais pas qu’on te fasse à toi-même.» Le précepte est
aussi célèbre dans la tradition judéo-chrétienne que dans la musulmane. Quel
agnostique ou athée prétendrait-il concevoir une vie sociale sans un même
effort, personnel, en ce sens? Cela suppose, madame, un perpétuel examen de
conscience sur notre façon de voir et de traiter autrui, dans son étrangeté,
sa différence, son histoire spécifique. Je vis en Mauritanie depuis plus de
dix ans. Vous étonnerai-je en disant que j’y reçois, tous les jours, des
leçons d’humanité ? Les gens évoluent, ici, madame, et j’ai dû revoir,
beaucoup, de mes préjugés. Contribuerais-je, avec cette réaction à votre
article, à la correction des vôtres, dits, suggérés ou non-dits, que
j’aurais, à ma manière, participé à la commémoration française de l’abolition
de l’esclavage… Au plaisir de lire, le 10 mai de l’année prochaine, à la Une
d’Ouest-France ou d’ailleurs, votre approfondissement de la question…
Ian Mansour de Grange
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