A.H.M.E.
INTERVIEW 23:
Interviews
de Messaoud Ould Boulkheir
Interview de Messaoud
L’esclavage est toujours un problème national et son débat demeure d’actualité, en Mauritanie. On n’a pas donné à ce problème l’importance qu’il mérite. La responsabilité incombe, entièrement, aux autorités. Sous Sidi Ould Cheikh Abdallahi, l’Etat a pris des décisions courageuses, pour la résolution de ce problème. Une loi incriminant l’esclavage a même été votée, par les deux chambres du Parlement. Des journées de sensibilisation ont été organisées. Je rappelle que j’avais émis des réserves sur la manière dont elles se sont déroulées, parce qu’on a voulu escamoter le problème, et j’ai même boudé la cérémonie d’ouverture à la maison des jeunes. En tous les cas, on était là, pour la première fois, face à un Etat décidé à résoudre le problème, par la mise en place d’instruments appropriés, et c’est le minimum qu’on puisse demander. Il y a, certes, des insuffisances et il fallait travailler à les combler, par des instructions, fermes, aux représentants de l’Etat, aux préfets, chefs d’arrondissements, walis, chefs de brigade, commissaires de police, cadis, juges, en contact direct avec les populations. Il faut les amener à comprendre que l’esclavage est une affaire très sérieuse qui mérite un traitement en conséquence. Hier, j’ai reçu, ici, une esclave, elle venait d’Atar, avec «SOS Esclaves», de Boubacar Ould Messaoud; le ministre de l’Intérieur est au courant. Sa fille est restée là-bas, parce que, m’a-t-on dit, elle est mariée. Avec qui? Mystère. Le fait de que le ministre de l’Intérieur, censé connaître les arcanes de l’Administration, nous dise qu’on lui a laissé entendre que la fille était mariée est très léger; il ne doit pas se contenter de ce qu’on lui dit ou laisse entendre. Même si la fille est mariée, cela ne l’empêche, nullement, de venir avec sa maman, surtout si c’est un mariage fictif, comme on en connaît; en tout cas, le ministre a, vraiment, la possibilité de tirer les choses au clair. Mariée ou pas mariée, ce sont des faux-fuyants, comme chaque fois qu’un cas est révélé: c’est un parent, ce n’est pas un ou une esclave, le juge n’a jamais condamné personne, le commissaire de police n’a jamais indexé quelqu’un pour pratique esclavagiste, il est même le premier à prendre la défense de l’esclavagiste, etc. Idem pour le commandant de brigade. Comment voulez-vous, dans ces conditions, que ces tares disparaissent? Un pouvoir véritablement progressiste, soucieux de l’avenir de ce pays, doit œuvrer pour l’éradication réelle de telles pratiques. On ne peut pas continuer à tromper les gens. Personne n’est dupe. Néanmoins, ce n’est pas une raison pour tomber dans la surenchère. Le combat a commencé en 1978, à la naissance d’El Hor, mais nous n’avons, jamais, cédé à la surenchère. Le premier responsable, c’est l’Etat qui n’a pas joué pleinement son rôle pour l’émancipation de cette couche de la population. Si l’Etat tape du poing sur la table et siffle la récréation, les choses vont rentrer dans l’ordre mais si c’est lui qui, par l’intermédiaire de ses représentants, se fait complaisant, ces pratiques persisteront. Nous ne sommes pas le seul pays où l’esclavage subsiste, mais le malheur des Mauritaniens c’est que les voies choisies, jusqu’à ces derniers temps, sont mauvaises et celles engagées sous Sidi Ould Cheikh Ould Abdallahi n’ont pas pu être concrétisées. Si l’on traduit en justice des esclavagistes, qu’on les condamne, fermement, cela servira de dissuasion, pour les autres. Mais je l’ai dit et je le répète: la solution passe par la voie pacifique, par l’éducation et la sensibilisation, non pas par l’hostilité des uns contre les autres ; nous n’avons jamais prôné cette solution, nous n’avons jamais prôné la division encore moins la vindicte ou la revanche. Cela n’a jamais été notre cas et cela ne le sera pas. Ces messieurs vont plus loin que l’esclavage. Ils
dénoncent ce qu’ils qualifient de «marginalisation des cadres Hartanis, dans
l’administration, les forces armées et de sécurité», ce qui leur a valu de
vives critiques et une espèce de droit de réponse de la part du gouvernement.
Certains Mauritaniens seraient-ils insuffisamment mûrs pour accepter qu’on
mette ce débat sur la place publique? Le débat a toujours été posé, mais je pense qu’il ne faut pas l’exagérer, parce qu’il n’y a pas un lieu plus indiqué que l’enceinte de l’Assemblée nationale pour débattre de cette question. Maintenant, qu’il y ait des brebis galeuses, ici ou là, de la démagogie ou des blocages, au sein de ceux qui sont, en partie ou en tout, responsables de l’Etat, ce n’est pas exclu. Personnellement, j’ai lu des choses qui ne m’ont pas plu, comme j’ai vu des pratiques qui m’ont aussi déplu. L’Etat, comme je l’ai dit, doit assumer ses responsabilités régaliennes. Quant à la marginalisation des cadres Haratines, elle n’est un secret pour personne. De tout temps, cela a été dénoncé, je ne vois l’intérêt d’enfoncer une porte ouverte, d’autant plus que cela ne va pas se résoudre du jour au lendemain, c’est un combat de longue haleine. J’ai entendu, vu et lu des propos qui tendent à exacerber les tensions, mais, nous, à l’APP ou ailleurs, nous n’avons jamais tenus des propos de cette nature. Faire monter les enchères, attirer l’attention sur soi, ne produit aucun effet, ce nous cherchons, c’est le résultat, des avancées significatives sur la question, pas à saper les fondements d’une nation qui n’a que des choses en commun. En Mauritanie, d’ailleurs, les Haratines ne sont pas les seuls à être marginalisés. Faites le décompte, vous vous rendrez à l’évidence, c’est l’œuvre de clans, de gens qui se sont, jusqu’ici, partagé le pouvoir, cela continue à exister et cela continuera à exister, tant que les autres ne se seront éveillés, ne prendront pas conscience de leur pouvoir réel, de leur rôle et de leur place. Enfin, la marginalisation des Haratines n’est pas le seul fait de ceux qui ont intérêt à les marginaliser; ils sont, en partie, responsables de leur propre marginalisation, parce qu’ils n’ont que trop rarement confiance en leurs capacités, certains se conduisent en assimilés. Avant donc de jeter l’anathème sur les autres, il faut d’abord se remettre en cause. Cela a toujours été mon combat, personne ne m’a fait de faveurs pour que je devienne ce que je suis aujourd’hui. Il suffit de s’assumer, de s’imposer et de défendre ce qu’on croit juste, c’est tout. Source: Le
calame http://www.lecalame.mr/index.php?option=com_content&task=view&id=2717&Itemi
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INTERVIEW ACCORDEE AU SITE ELECTRONIQUE "TAWARY" LE 20/12/2010 , PAR LE PRESIDENT DE A.P.P. PRESIDENT DE L'ASSEMBLEE NATIONALE MESSAOUD OULD BOULKHEIR
1 - Monsieur le Président de A.P.P. et Président de l'Assemblée Nationale Messaoud OULD BOULKHEIR, votre dernier discours d'ouverture de la Session parlementaire 2010- 2011 a constitué un tournant important dans vos relations avec le régime et certains ne comprennent pas son contenu: vous est-il possible de nous parler de ce discours et des idées qu'il comporte ? Le discours que vous évoquez entre dans le cadre d'une approche qu'avaient dictée et exigée mes obligations nationales et mes responsabilités politiques au lendemain des élections présidentielles à l'issue desquelles j'avais repris mes fonctions de président de l'Assemblée nationale à l'ouverture de la session de laquelle j'avais alors appelé au dialogue et à la prééminence à donner à l'intérêt national par rapport à toute autre considération. J'y avais aussi suggéré un débat politique apaisé. La tonalité de ce discours-ci, bien que versant dans le même sens que le premier, tend à sensibiliser sur la situation du moment, où se perçoit nettement un sentiment d'inquiétude face aux dangers réels qui menacent de l'extérieur l'existence de notre pays à cause notamment des pressions exercées par les grandes puissances qui veulent nous faire supporter seuls, et à leur place, les sacrifices qu'implique la lutte contre le terrorisme, l'immigration clandestine en Europe et la lutte contre les réseaux de la drogue. A cela s'ajoute, au plan intérieur, les graves divergences politiques entre majorité et opposition, sans compter ceux qui, délibérément, mettent en doute notre identité nationale, notre existence, nos emblèmes nationaux (drapeau et hymne) alors que d'autres tentent de remettre en cause l'appartenance des Haratines à la communauté arabe. C'est tout cela qui m'a inquiété, qui m'inquiète et qui m'a poussé à attirer l'attention des nationaux et surtout des vrais patriotes, jaloux de son unité et de son intégrité, à prendre conscience du danger et à se mobiliser pour assurer sa tranquillité pour le préserver de tous les périls qui le menacent, qu'ils soient extérieurs ou intérieurs et quelle que soit leur nature (raciste, clanique ou communautaire) la modération et le dialogue s'avérant le meilleur choix pour l'opposition et la majorité de placer le pays sur la voie la plus sûre. 2 – Vous avez rencontré ces jours derniers le président Mohamed OULD ABDEL AZIZ, comment s'est passée cette rencontre et quelle évaluation en faites vous ? L'évaluation que j'en fais est positive 3 - Il se raconte que la déclaration du président appelant au dialogue q un rapport avec cette rencontre ? Je ne sais pas. Il est possible que cela soit la conséquence des analyses personnelles du Président, comme il se pourrait que cela soit consécutif à des conseils venus de la coordination de l'opposition ou du président de l'Assemblée nationale, mais dans tous les cas, le discours a été positif et la réaction de la coordination aussi. C'est vrai aussi que chaque fois qu'il m'a été donné l'occasion de le rencontrer, je lui ai toujours suggéré d'appeler au dialogue, ce qu'il m'a formellement promis de faire lors de notre dernière rencontre. J'avais communiqué l'information à certains membres de la COD , bien que certains, dans nos rangs, pensaient qu'il ne le ferait jamais. Il l'a fait, Dieu merci, et il ne reste plus dorénavant qu'à imaginer et à se mettre d'accord sur les modalités pratiques de la mise en œuvre de ce dialogue. Au sein de la COD , à mon avis, l'important est de nous mettre d'accord sur les termes de la bonne gouvernance et ceux qui garantissent la préservation du pays et la pérennité de l'Etat ce qui, en aucun cas, ne saurait vouloir dire droit d'immixtion dans les attributions et les pouvoirs du Gouvernement, ni encore moins dans sa manière de gérer qui lui est propre puisqu'il en récoltera seul les fruits, doux ou amers. Que la majorité se rassure donc: dans notre esprit dialogue n'est ni nous mêler de ce qui ne nous regarde pas, ni avoir un droit d'immixtion dans l'orientation du Gouvernement, ni encore moins en faire partie. 4 – Croyez-vous en la réussite du dialogue par ces temps ci et quels devraient être, selon vous, les points à discuter ? Je ne pense pas que les accrocs qui ont émaillé les rapports opposition/régime dans le passé soient suffisants pour empêcher qu'aujourd'hui ils se mettent d'accord sur une plateforme apte à aider au dépassement de certaines contradictions, pour autant que le sens des responsabilités, le patriotisme et le devoir de tous de juguler les dangers qui nous menacent nous interpellent et nous obligent à dépasser notre ego. Au niveau de l'opposition nous ne demandons rien d'impossible: dans le cadre de la consolidation de l'Etat institutionnel, nous voulons discuter du code électoral, de la liberté de la presse, de la place de l'Armée dans la politique, du rôle de l'opposition, de la transparence, de la bonne gouvernance, de la responsabilité de l'Etat, à travers l'Administration, la Justice , la Police et la Gendarmerie dans l'application de la loi incriminant l'esclavage, de même que la résolution juste du passif humanitaire et tous les autres problèmes encore pendants liés au retour des déportés, sans préjudice de tous les autres cas importants de nature à consolider nos acquis démocratiques, la justice, la liberté, l'équité et la construction du pays. 5 – Il y a des divisions au sein du parti ADIL avec lequel vous vous êtes opposé au coup d'Etat, est-il possible d'avoir votre avis personnel sur ce qui arrive à votre ancien allié ? Je voudrai tout d'abord féliciter le parti ADIL pour le parcours militant qui fut le sien avant et pendant les élections où j'ai avantageusement bénéficié de son précieux soutien qui restera gravé dans ma mémoire, celle des militants de A.P.P. et de mes sympathisants. S'agissant maintenant de votre question, je suis un démocrate en quête de démocratie, qui pour cette raison considère que les partis politiques sont libres dans leurs actions et leurs choix. Il est d'ailleurs de notoriété publique que le va et vient entre l'opposition et la majorité est la règle en politique en Mauritanie. Mes meilleurs vœux accompagnent donc ADIL en même temps que je suis bien heureux parmi ceux qui sont restés dans la coordination de l'opposition. 6 – L'Armée a organisé des portes ouvertes à l'intention de certains politiques ces derniers temps, puisque A.P.P. était de la partie, quelle évaluation faites-vous de cette initiative ? Je n'ai rien contre cette initiative qui aurait pu voir le jour bien avant ; s'agissant de mes observations, j'en ferai part aux responsables en charge du dossier, même si en règle générale elles affirmeront ma fierté de nos Forces Armées, mon souci de les voir toujours plus fortes et plus aptes à remplir leur mission sacrée de défense de l'intégrité territoriale de la patrie et mon vœu de les voir laisser définitivement la politique aux civils dont c'est la spécialité. 7 – La guerre contre le terrorisme est un sujet brûlant, quelle évaluation faites-vous de tout ce qui a été réalisé jusqu'à maintenant dans le cadre de cette guerre? Ma position par rapport à cette guerre a été clairement exprimée à Monsieur le Président, comme a été exprimée dans les communiqués de la COD celle relative à certaines opérations en dehors des frontières. 8 – Certains contestent la guerre en dehors du pays mais cette guerre a réussi jusqu'ici au moins à assurer provisoirement la sécurité, qu'en pensez-vous ? Je respecte votre liberté d'appréciation… 9 – Le Président du Mali a déclaré ces derniers temps que la lutte contre le terrorisme ne réussira qu'avec la participation de tous les Etats de la zone, qu'en pensez-vous ? Mon sentiment est que la voie juste et incontestable est qu'aucun pays ne peut combattre le terrorisme tout seul. 10 – En ce qui concerne la Coordination de l'opposition, pensez-vous qu'elle pourra résister aux pressions ? Quelles pressions ? Mon sentiment est que l'opposition est capable de rester unie et de poursuivre son œuvre de réalisation des grands choix nationaux 11 – Est-ce que la réflexion a commencé à propos des élections législatives prochaines et nous est-il permis d'imaginer des coalitions telles que celles réalisées au sein de l'opposition en 2006 ? Nous
n'avons pas approfondi de débat sur la question à ce jour.
S'agissant de l'allusion aux accords de 2006, il s'était agi pour
les contractants de soutenir la liste qui a obtenu le plus de voix et
en la matière nous avons donné l'exemple dans le respect des
engagements signés et nous espérons que dans l'avenir, si de tels
accords se nouaient, les autres suivraient notre exemple. 12 – L'on a beaucoup parlé ces derniers temps de l'esclavage, quelle est votre opinion à ce sujet et la couche sociale Haratine constitue t'elle une nationalité à elle seule ou est-elle à votre avis une composante de la nationalité arabe ? On reparlera encore de l'esclavage à chaque fois que l'on découvrira un cas nouveau d'esclavage et à chaque fois que le citoyen aura le sentiment que l'Etat ne combat pas sérieusement ce phénomène et chaque fois qu'il jette en prison les militants des Droits de l'Homme, anti-esclavagistes, dont Biram Ould ABEID, à la suite de la découverte d'un cas d'esclavage à Arafat. S'agissant de l'arabité de la couche sociale Haratine, c'est un problème réglé. Ceux qui ont porté le flambeau de cette Cause dans les années 1970 ont clairement inscrit dans leurs documents et prévu dans leur programme d'action que cette couche sociale est une partie fondamentale et indissociable de la composante arabe et que l'arabité, en ce qui me concerne, n'est ni une race, ni une couleur, ni une position sociale donnée, mais une langue, une histoire, des us et des coutumes et un destin commun. Si, pour des raisons historiques, cette couche sociale a été soumise contrainte et forcée par d'autres composantes de la communauté arabe, cela ne saurait effacer leur appartenance culturelle à cette même communauté, l'histoire de l'humanité offrant le meilleur témoignage dans ce cas. 13 – Est-ce que l'esclavage existe toujours ? L'esclavage
existe toujours malgré ce qui a été accompli au temps du président
Sidi Mohamed OULD CHEIKH ABDALLAHI en termes de consensus national au
sein du Parlement, au niveau des Partis politiques et de la Société
Civile à propos de la loi criminalisant l'esclavage. L'Etat et ses
Institutions concernées par ce problème n'ont accordé aucun
intérêt à cette loi, alors que s'ils avaient fait montre d'un
minimum de sérieux dans son application, ce phénomène n'aurait
jamais plus fait parler de lui, définitivement. 14 – Il y a ceux qui disent que le Président Messaoud est opposé à ce que l'organisation EL HOR continue d'exister, est-ce vrai ? Et si la réponse était oui ! pourquoi ? Je voudrai tout d'abord faire la distinction entre le Mouvement El Hor et l'éradication définitive de l'esclavage. Le Mouvement El Hor a certes été créé au moment du militantisme clandestin à cause l'oppression, du musellement des libertés et de l'absence de démocratie, ce qui n'a pas permis à tous de contribuer à sa naissance. Il y a aussi que le fait de l'enracinement de l'esclavage dans la société et le peu d'intérêt accordé, à l'époque, à son éradication par l'élite politique, avait contraint ses fondateurs à agir seuls. Aujourd'hui, avec l'avènement de la démocratie et la possibilité d'évoquer publiquement, sur toutes les tribunes, ce problème, avec l'évolution qui s'est opérée au niveau des mentalités des élites politiques de toutes les franges et composantes de la société au point de faire de la lutte contre ce phénomène un thème majeur de tout programme politique et social crédible, avec l'intervention de l'Etat, ne serait-ce qu'au plan juridique formel et enfin avec les adhésions de nombreux cadres et militants de toutes composantes nationales dans A.P.P. qui inscrit dans ses priorités les objectifs visés par les fondateurs de El Hor, tout cela fait que le temps n'est plus aux organisations sectaires et secrètes mais, bien au contraire, celui de l'action nationale commune, telle que matérialisée par le peuple mauritanien, à travers toutes ses composantes, par le soutien apporté, lors des dernières élections présidentielles, à un candidat connu au niveau national pour être le fondateur du Mouvement EL Hor et dont l'un des objectifs premiers est l'éradication de l'esclavage, on peut dire que la mission de El Hor est accomplie et qu'il doit cesser d'exister, l'éradication de l'esclavage devenant un objectif national et le combat ne s'arrêtera que lorsqu'il sera atteint. 15 – Le débat à propos de l'esclavage est allé, pour certains, jusqu'à écrire au Secrétaire Général des Nations Unies pour lui poser le problème, qu'en pensez-vous ? Celui qui a agi ainsi ne représente que lui-même et il n'a été mandaté ni par un parti, ni par une couche sociale et je suis convaincu que le peuple mauritanien est capable de résoudre tous ses problèmes, quelles que soient leurs difficultés, par lui-même sans avoir besoin des tribunes internationales, des chancelleries et des organisations étrangères. 16 – Certains considèrent que la discussion à propos de l'esclavage dissimule en vérité, un tentative d'introduire le débat à propos de la succession du Président Messaoud, vous considérez vous comme une relique du passé au point que s'engage un tel débat ? Je vous dis en toute sincérité que si je découvre un politique fidèle aux principes de son peuple en termes de quête de liberté, de justice et d'émancipation pour lequel témoigne son parcours militant dans le combat pour les causes justes de liberté, d'émancipation et de justice sociale, qui se sacrifie sincèrement pour la paix sociale entre les différentes composantes du peuple, qui soit honnête avec le peuple et avec ses principes, qui croit en l'égalité entre tous, nonobstant leur appartenance et leur orientation, je serais prêt à lui remettre le flambeau et je me reposerais la conscience tranquille. Mais il ne m'appartient pas de lui remettre la confiance des populations et leur amour par ceci est un Don d'ALLAH qu'Il accorde à qui Il veut de ses esclaves. 17 – Y aurait-il un mot de la fin ? Je vous le dis, et ce n'est point dans mes habitudes, que je suis gagné ces derniers jours par le découragement et l'amertume teintée de colère à la suite de la dernière découverte de la pratique de l'esclavage sur deux mineures à Arafat et ceci me rappelle un passé que j'avais cru dépassé par la promulgation de la loi incriminant cette pratique alors que celle-ci est restée lettre morte, que l'esclavage continue de se pratiquer sous différentes formes et que ceux qui sont chargés de son application s'y refusent. Je saisis donc l'opportunité de cette tribune pour appeler toutes les initiatives nationales opposées à la pratique de l'esclavage, tous les Ulémas, tous les Partis politiques et toutes les organisations de la Société civile, de même que les organes de l'Etat en charge de l'application de la loi de se ressaisir et de s'engager résolument en vue de l'éradication de ce phénomène et de cesser de l'enrober par la négation et le silence, et de s'inspirer des Enseignements du Noble Coran qui nous invite à soutenir les victimes de l'injustice et les esclaves, mais aussi à l'Amour, à la Miséricorde , au rejet de l'injustice et des agissements pouvant engendrer la fitna (persécution) que ALLAH décrit dans une même Surat, tantôt comme "étant pire que la mort", et tantôt comme étant "pire que le meurtre"
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Interview de Messaoud Ould Boulkheir au Calame
‘’La position
ostentatoirement partisane du président de l’Union Africaine (UA), mandaté par
la communauté internationale pour trouver un agenda consensuel entre les
différentes parties de la crise mauritanienne, signe l’échec de cette
médiation’’ Le Calame :
Le président Kadhafi, désigné par le groupe consultatif de Paris, pour trouver
un consensus entre les différentes parties, vient de passer quelques jours, en
Mauritanie, après avoir reçu, chez lui, les protagonistes. Dans son discours,
le président de l’UA a donné une espèce de quitus à l’agenda de la junte, au
pouvoir depuis le 6 août 2008. Considérez-vous cette médiation comme un échec?
Ce quitus arrêterait-il, comme il l’a dit, le processus des sanctions ciblées,
décrétées par l’UA, contre la junte et ses soutiens? Messaoud Ould Boulkheir : Oui, à mon niveau personnel et je pense, aussi, que c’est le cas au niveau du FNDD, nous considérons que c’est un échec. La position, ostentatoirement partisane, du président de l’Union Africaine (UA), mandaté par la communauté internationale pour, comme vous l’avez dit, trouver un agenda consensuel entre les différentes parties de la crise mauritanienne, signe l’échec de cette médiation. Je crois que notre réaction le démontre clairement. Il appartient, maintenant, à la communauté internationale, au groupe de contact qui ont mandaté le président de l’UA, de prendre la décision finale, de déterminer une position officielle, par rapport à ce qui s’est passé à Nouakchott. Pour notre part, nous n’avons ménagé aucun effort, malgré certaines réserves, émises, ici et là, par certains, et qui ont fini par se vérifier, sur le terrain, quant à l’implication du guide libyen dans la crise mauritanienne. Nous avons dit, dès le départ, qu’il fallait être bon joueur, éviter d’émettre un jugement sur l’arbitre avant le coup d’envoi du match. Et nous avions de solides arguments : l’UA n’a-t-elle pas, elle-même, pris position contre le coup d’Etat? Son Conseil de Paix et de Sécurité (CPS), comité de pilotage en cette affaire, n’a-t-il pas, déjà, initié des sanctions ciblées, contre les membres de la junte et ses soutiens? Ne démarchait-elle pas le groupe de contact, afin, justement, que celui-ci lui emboîte le pas? N’a-t-elle pas saisi le Conseil de Sécurité de l’ONU, pour donner un caractère obligatoire et international à d’éventuelles sanctions? Aussi disons-nous qu’avec tous ces éléments, le président de cette institution ne pouvait pas aller à contre-courant de ce qu’elle a, elle-même, décidé. Le deuxième type d’arguments, qui a plaidé contre toute réserve vis-à-vis de la médiation libyenne, c’est que Kadhafi est un leader d’un pays-membre du Maghreb Arabe, de la Ligue Arabe, dont nous sommes, nous aussi, membres, que c’est un voisin, un leader d’un pays qui a, toujours, accordé une certaine importance aux problèmes mauritaniens et que nous connaissons, enfin, beaucoup de bonnes choses, réalisées par nos frères libyens pour la Mauritanie, dans sa marche vers le progrès. Par conséquent, nous pouvions, légitimement, douter que cette médiation entérine des positions qui n’aillent pas dans le sens du progrès et du développement de notre pays, de cette marche universelle vers la liberté, vers la démocratie. Voilà pourquoi avons-nous ignoré toutes les réserves exprimées, ici et là. Nous avons, également, tu les propos que nous avait tenus, en Libye, le président de l’UA, propos dans le même sens de ce qu’il a dit ici. En gros, il nous avait fait comprendre que le coup d’Etat était un fait accompli, qu’il fallait faire avec, que le retour à la situation d’avant le 6 août était irréaliste, qu’en Afrique, il y a plus de quarante pays gouvernés par les militaires, que les militaires sont partie intégrante de la société, ce ne sont pas des israéliens, encore moins des ennemis étrangers, que ce sont des Mauritaniens, comme tous les autres, et qu’à l’instar des Turcs ou des Egyptiens, ils veulent le bien de leur peuple. J’ai eu, très sincèrement, le sentiment que c’était, même, sa propre position, plutôt que celle du HCE. Mais nous avons, pourtant, tu tout cela, nous avons continué à espérer qu’il ne s’agissait, là, que de simples pressions exercées sur une partie des protagonistes de la crise et qu’il exerçait des pressions, contraires, sur la junte. Tout le monde s’est dit qu’il ne pouvait pas afficher, de manière aussi claire, une position aussi partisane. Tactique de négociation, en somme. Mais, hélas, lors de l’huis-clos qui a précédé la plénière, il a réitéré ses propos, s’exprimant, sans équivoque, en faveur des militaires. Le constat s’avérait donc : Kadhafi appuyait, ouvertement, l’agenda des putschistes et leurs parlementaires présents, disant que le retour du président Sidi Ould Cheikh Abdallahi était inenvisageable, qu’il occasionnerait des troubles dans le pays. Que le général Ould Abdel Aziz allait démissionner, le moment venu, qu’il y aura des élections. Nous pensions que ce que disait le guide libyen allait rester dans le cadre de l’huis-clos, mais, quand il s’est exprimé, publiquement, dans la même veine, tout fut entendu et avons, aussitôt, marqué, nettement, notre désaccord. Dans son approche, Kadhafi considérait la Mauritanie et les mauritaniens comme quantité négligeable, pas du tout intéressante, nous le regrettons profondément, très sincèrement. Nous avons essayé de patienter, autant que faire se peut, parce que c’était notre hôte, qu’il était là, en tant que président de l’UA, qu’il fallait faire preuve de tolérance et de mesure, mais lorsque nous avons constaté qu’il persistait, nous avons dû nous retirer, pour marquer notre plus totale désapprobation. Le FNDD a, d’ailleurs, publié un communiqué pour expliquer sa position.
C’est vrai, nous nous sommes rencontrés, avant son départ. A sa demande. J’y ai
répondu favorablement, en tant que président de l’Assemblée nationale
mauritanienne légale, bien qu’au niveau du FNDD, la décision avait été prise de
ne plus le rencontrer, sauf excuses officielles de sa part. J’ai considéré
qu’il ne m’appartenait pas d’appliquer cette consigne au président de
l’Assemblée nationale, et c’est donc sous cette étiquette que je l’ai
rencontré. Il m’a reçu et m’a dit, mot à mot, ceci : «toi, tu m’invites et tu
m’abandonnes, seul sous ton toit ». Et effectivement : en me rendant en Libye,
je lui avais transmis une invitation de l’Assemblée nationale. J’ai, alors,
exprimé mon regret pour le geste que j’aurais dû éviter, mais auquel ses
propres déclarations m’avaient contraint. A ma manière, franche et
directe, de lui dire tout ce qui me passait par la tête ; lui rappelant
que, dès le départ, certains avaient émis des réserves sur sa médiation, mais
qu’après consultations, tout le monde avait accueilli, favorablement, son
implication ; qu’avant de nous convoquer en Libye, il avait, deux jours
auparavant, accrédité l’ambassadeur de la junte ; que lui et certains de ses
proches avaient fait des déclarations qui n’allaient pas dans le sens de la
neutralité ; qu’une fois celles-ci affichées publiquement, nous ne pouvions que
quitter le débat ; qu’il s’était, lui-même, disqualifié, se révélant incapable
de conduire la médiation, dans la neutralité. Dans leur réponse, lui et ses
collaborateurs ont tenté de me faire croire qu’on avait mal compris, qu’on
n’avait pas attendu la fin de l’exposé du guide; qu’il parlait dans un cadre
général et non dans le contexte mauritanien. Et, puisque toutes les parties
mauritaniennes évoquaient une élection dans leurs propositions de sortie de
crise, il a pensé qu’il fallait envisager la Mauritanie, au lendemain de
celle-ci. Qu’il ne défendait, bien évidemment, aucune partie. Que son seul
parti, c’est la Mauritanie qu’il veut défendre contre toute «somalisation». Ses
collaborateurs ont justifié cette assertion en relevant que le guide n’avait
apporté, avec lui, aucune proposition de sortie de crise. Je leur ai répondu
qu’ils n’en avaient pas besoin, puisqu’ils avaient adopté celle des putschistes.
Ce qui a échoué, au niveau de notre entendement, en tout cas, c’est la médiation du président de l’UA. Il n’y a eu, de fait, aucune négociation. Si l’on se réfère à la proposition du groupe de contact, vous constaterez que le groupe est, lui-même, partie intégrante de ces négociations. Or, tout le monde constate, aujourd’hui, que la recommandation de se réunir pour trouver un compromis n’a pas été respectée, que le groupe qui devrait prendre part aux négociations n’y a pas été. La médiation a échoué, mais le processus lui, continue. Il a commencé, d’abord, par la position de l’UA, vis-à-vis de la junte, puis le pilotage du positionnement du groupe de contact, confié à l’UA, la position du CPS et sa saisine, tout ceci est en mouvement. Je pense qu’une fois les conclusions tirées, au niveau du groupe de contact et au niveau de l’UA, sur cette médiation, le processus devrait poursuivre son cours, d’une manière ou d’une autre. Soit, le plus normalement du monde, dans l’harmonie des différentes parties avec l’UA, ou dans l’attente de la réaction de l’UE. Si l’UE et l’UA estiment qu’il ne faut pas fermer la porte du dialogue, ils vont chercher un autre médiateur, pour lui transférer la mission. Nous n’avons pas d’autre stratégie que de suivre tout ce processus, d’une part, et, d’autre part, de continuer, nous-mêmes, sur le plan interne, à expliquer, à sensibiliser et à organiser la résistance. Nous continuons le combat, sereins et pacifiques ; nous nous rendrons, également, à l’extérieur, pour expliquer, éventuellement, ce qui vient de se passer chez nous.
Moi, je suis un croyant, je suis un musulman. Le refus du dialogue, le refus de la discussion est, quelque part, le refus de l’espoir. Or, la religion est espérance. Aussi, même le combat est espérance. On mène des combats dont on n’est pas sûr de l’issue. Nous, a priori, nous sommes ouverts au dialogue, d’autant plus que nous considérons, très sincèrement, que le combat militant que nous devons mener, que nous sommes tenus, de mener, au plan national et au niveau international, ce combat n’est pas plus le nôtre que celui de la communauté internationale, que celui de l’UA dont nous sommes membres. Notre combat est celui de l’UE, avec laquelle nous avons signé les accords UE-ACP de Cotonou. C’est aussi celui des Nations-Unies, qui œuvrent pour l’application de ses principes. Nous, nous combattons pour la démocratie, c’est pour elle que nous bougeons, ce n’est ni pour la personne du président de la République, ni pour la personne du général Ould Abdel Aziz. Pas pour celui-là ou contre celui-ci. Nous nous mobilisons, parce que nous estimons que c’est un devoir, nous bougeons pour le devenir de la Mauritanie qui, de notre point de vue, passe par l’application de la démocratie. C’est un combat pour la démocratie, pour la vie, dont il ne faut, jamais, désespérer. Pour cela, il faut continuer à dialoguer, même si, comme je l’ai dit, haut et fort, nos positions sont diamétralement opposées. Le général lui, tient, par tous moyens légaux et illégaux, à rester au pouvoir, nous, nous pensons qu’il faut l’en bouter dehors. Nous pensons qu’il n’y a aucune raison de composer avec lui, que le retour à la normale passe, nécessairement et obligatoirement, par le retour à l’ordre constitutionnel, et le retour du président élu, qui s’est engagé, lui-même, pour une solution de sortie de crise, négociée avec la communauté internationale, à organiser des élections présidentielles, législatives et municipales anticipées, sous la supervision d’un gouvernement d’union nationale. Je pense que c’est la plus honorable sortie de crise, pour notre pays, qui ne lui ferait perdre nul crédit, si bien acquis, auprès de la communauté internationale, lors de la transition de 2005 et des élections, libres et transparentes, de 2007. C’est, pour nous, demander le minimum. Nous, les légalistes, qui avons fait le maximum de concessions possibles et imaginables, tandis que, de l’autre côté, on se borne à appliquer la feuille de route tracée par la junte.
Vraiment, je ne comprends pas le sens de cette question. Je ne pense porter aucune responsabilité dans ce qui est arrivé le 6 août. Et ce que vous m’attribuez n’est pas fondé. Je n’ai jamais été contre la dissolution de l’Assemblée nationale : bien au contraire. Le mardi, avant le coup d’Etat, j’étais au campement, quand le président m’a appelé pour me dire qu’à l’Assemblée nationale, certains députés avaient demandé une session extraordinaire, c’est alors ce moment que j’ai appris ce qui se tramait. Tout avait été mené, par en-dessous, en cachette. Normalement, dans toute démocratie digne de ce nom, lorsque des députés souhaitent une session extraordinaire, c’est, d’abord, à leur président qu’ils s’adressent. Alors, évoquer un soi-disant blocage de cette session extraordinaire… Il y a des règles à respecter, même si cela implique des discussions orageuses. Nous avions connu des sessions-marathons, on était tous stressés, avec cette affaire de motion de censure. Personnellement, j’avais essayé de rapprocher les positions du président de la République et du général Ould Abdel Aziz, et j’avais besoin d’un mois de repos pour souffler. Et je ne suis parti, en vacances, qu’après m’être entendu, avec le Premier ministre, sur la date de la prochaine session extraordinaire, pour le 5 septembre, je crois. Il n’y avait pas de blocage. C’est alors que le président m’a téléphoné, en m’informant qu’il avait été saisi, irrégulièrement, par certains députés, après mon départ, qu’il leur avait répondu que les vice-présidents, de par le règlement de l’Assemblée, n’avaient pas pouvoir de saisine du gouvernement et qu’il fallait passer, impérativement, par moi. Le président m’a également parlé des points que les députés voulaient inscrire à l’ordre du jour de cette fameuse session extraordinaire. Or, pour qu’un point soit inscrit à l’ordre du jour, il faut qu’il passe par tout un processus d’adoption : saisine du président de l’Assemblée, qui le soumet à la conférence des présidents, qui le discute, l’approuve ou le rejette. Dans le premier cas, il serait soumis à une session plénière, pour adoption. C’est seulement après, qu’il serait opposable au gouvernement, comme proposition de loi ou de point à discuter. Le président m’a demandé si je pouvais rentrer, pour discuter de ces questions à inscrire à l’ordre du jour. Et c’est à travers ce coup de fil, que j’ai, expressément, demandé au président de la République s’il entendait continuer à travailler avec cette Assemblée nationale. Cela signifie que je lui suggérais, implicitement, la dissolution de celle-ci. Il m’a répondu que oui, parce qu’il y disposait d’une majorité. Je lui ai dit alors : dans ce cas, il n’y a aucune raison de la dissoudre. Le lendemain, c’était le putsch. Donc, je n’ai jamais été contre la dissolution. Je l’avais, au contraire, suggéré, compte tenu de la situation. Mais nous avions eu, effectivement, quelque divergence quant à la présentation de cette éventuelle mesure. De retour de Charm El Cheikh, il m’avait appelé, le matin, pour me dire qu’il allait parler à la Nation. Il voulait m’entretenir des thèmes qu’il allait aborder. Il avait, alors, évoqué, de manière très cool, la dissolution de l’Assemblée, qu’il comptait brandir, au cas où l’on entraverait son action. Je lui ai dit que j’approuvais tout ce qu’il allait dire, sauf le fait de brandir, publiquement, cette menace. Je lui ai suggéré de rencontrer, plutôt, les députés auteurs de la motion, pour leur parler, entre quatre murs, de l’éventualité d’une dissolution. Il m’a répondu que le caractère public de son propos ne susciterait aucune hostilité. Je n’étais pas convaincu, mais c’était sa décision. Il se trouve que je n’ai pas entendu son discours, en direct, et c’est dans mon bureau que certains sont venus m’en informer, les uns, très mécontents, les autres, satisfaits, parce que, disaient-ils, «le président a, enfin, décidé de prendre ses responsabilités». Quelle part de responsabilité voudriez-vous, donc, me faire porter? Je n’ai pas été pris à témoin pour avouer la réalité des choses, que j’aurais niées ou cachées. Je me suis investi, personnellement, pour rapprocher les positions du président de la République et du général et je n’ai jamais rencontré le général que durant cette période là, et à ma demande. Il sait combien je l’ai mis en garde, contre tout ce que nous vivons, aujourd’hui. Je lui ait fait, clairement, savoir qu’il n’en tirerait que malheur.
Vous avez
été menacé par une motion de destitution, venue des députés qui soutiennent le
HCE. A votre avis, pourquoi ses initiateurs ne sont pas allés au bout de leur
logique? Considérez-vous, aujourd’hui, que cette menace est désormais derrière
nous? Vraiment, vous me posez une question à laquelle il m’est fort difficile de répondre. Quand on entame, contre vous, une procédure de destitution et que vous ne faites rien pour l’empêcher, vous ne saisissez aucune institution pour l’arrêter ou l’infléchir, que dire, de la suite des évènements? Ladite motion a été engagée ou initiée, je ne sais si c’est par les députés, eux-mêmes, ou s’ils furent poussés à le faire. Certains députés légalistes sont venus me voir pour me demander d’intercéder auprès de certains députés auxquels je suis lié par des liens tribaux et régionaux. J’ai, catégoriquement, refusé. Pour moi, face à cette atmosphère malsaine, face à ce qui se tramait, ma première réaction aura été de démissionner, purement et simplement, plutôt que d’accepter une espèce de cohabitation qui fait, du Parlement, un appendice du HCE, des militaires ou du BASEP, je ne saurais dire. Mais je prends mes décisions après mûre réflexion, et, dans une telle situation, très inconfortable, j’avoue que celle-ci fut, particulièrement, difficile. Au-delà de tout orgueil, dépassant ma première réaction, j’ai accepté le raisonnement des autres parties opposées au putsch qui m’ont convaincu de rester, arguant de ce que je pourrais, peut-être, en conservant mes fonctions, aider plus le mouvement de résistance qu’en jetant l’éponge. Ça m’a paru, effectivement, jouable, et j’ai alors accepté de rester. Mais, mon éventuelle destitution ne me fait ni chaud, ni froid, je n’ai pas, pour cela, levé le petit doigt. J’ai appris, qu’au niveau du Conseil constitutionnel, on a, d’abord, donné une réponse évasive, du genre «oui, mais», donnant l’impression d’une orientation pour me destituer, mais lorsque la cour a reçu une version claire, elle a opposé son refus. Selon les rumeurs qui me sont parvenues, on a même mis en doute mon intégrité morale. Pour certains, le fait que je ne sois pas destitué résulterait d’un accord signé avec la junte, c'est-à-dire que ce serait sur ordre du général que la cour se serait appuyée, pour dire la loi. Il n’en fallait pas plus pour que certains, dans mon propre camp, me soupçonnent d’avoir noué un accord sur leur dos. Que voulez-vous que je vous dise? S’il y a eu combines ou concertations entre le Conseil et le président du HCE, seul Dieu et eux le savent. En tout cas, je n’ai pas remué le petit doigt, je n’ai signé aucun accord secret avec le pouvoir, ce n’est pas mon genre, tout le monde me connaît, depuis que je me suis investi, en politique, je fais ce qui me paraît être juste, loin des combines. S’il y avait, pour moi, une possibilité de quelque nature que ce soit pour cautionner ce coup d’Etat, je l’aurais fait, ouvertement et très sincèrement. Il se trouve que je n’en vois aucune, je ne vois pas, vraiment pas, comment, moi, démocrate que je suis, pourrais-je cautionner un coup d’Etat militaire contre la démocratie.
Par le combat politique que nous continuons à mener, nous le pensons, et je l’ai dit, très haut et fort, il n’est interdit ni d’espérer ni de rêver. Pour moi, il peut être un dictateur, mais jamais un président légitime de la République, ni jamais s’enorgueillir, parce qu’il ne sera pas élu par le peuple mauritanien, en toute transparence. Il peut faire comme si, s’imposer en tant que dictateur, chef d’une junte, le temps que ça durera, mais il ne sera pas l’élu du peuple.
Vous savez, les gens font de la politique, chacun suit son chemin. Je suis en porte à faux avec leur position, comme eux, ils sont en porte à faux avec la mienne. Je ne suis ni juge ni censeur des uns et des autres. Quand à la possibilité de travailler ensemble, je dois vous dire que nous n’avons jamais fermé la porte du dialogue, ni sur le plan individuel, ni sur le plan, général, entre nos partis. Pas plus tard qu’hier, nous nous sommes retrouvés – par hasard, il le préciser – chez Abdallahi Ould Bah, Dieu ait son âme, pour présenter nos condoléances, et nous avons discuté de la nécessité de coordonner notre action, face à ce qui vient de se passer, nous nous retrouvons, sur ce sujet précis et sur beaucoup d’autres points. En tout, du moins en ce qui concerne le FNDD, des instructions ont été données pour accélérer le processus de rencontres avec le RFD. Ahmed a, pour sa part, donné, devant moi, des instructions pour la rencontre avec le front. Il n’est, d’ailleurs, pas exclu que les deux parties se rencontrent, aujourd’hui (Vendredi 13 mars, NDLR), pour discuter de l’unification des actions à entreprendre, face à l’attitude du guide libyen.
Je ne condamne pas votre manière de faire, mais je pense que vous en faites, quand même, un peu trop. Vous savez, les partis politiques, chez nous, sont comme des ONGs. Et les journaux, comme vous dites, [éclats de rires]. Enfin, moi, je n’ai rien dit. Je reconnais que nombre de fondateurs de partis politiques n’ont d’autres choix que de graviter autour du pouvoir, autour du plus fort, mais cela devrait passer inaperçu, et non noyer, systématiquement, les quelques partis politiques nantis de principes, disposant d’une base populaire plus ou moins importante et menant, comme ils peuvent, un combat d’idées, afin de conquérir, un jour, le pouvoir par les urnes. Ceci est aussi vrai pour notre Parlement et je ne vise personne. Nous sommes 150 députés élus, comme les conseillers municipaux, choisis pour défendre les intérêts des populations. Vous pouvez affirmer, vous, que tous mènent la politique du ventre? Pour ma part, ma préoccupation, c’est un FNDD uni, pour combattre un coup d’Etat contre la démocratie. Ici, les gens sont unis autour de principes, ils sont unis parce qu’ils veulent engager la Mauritanie, dans la voie du progrès. Sortir leur pays du cycle infernal des coups d’Etat. Je reste convaincu que, tant ce ciment demeure, il n’y a rien à craindre. Mais, si ce ciment-là disparaît demain, peut-être que chacun voudra voler de ses propres ailes, comme cela s’est passé, en d’autres temps et d’autres lieux. En tout cas, ce que j’entends dans les coulisses me rassure, chacun privilégie l’unité. Se disperser serait, vraiment, dommage et dommageable.
Selon mes informations, ceux qui veulent fonder ce parti gravitent,
effectivement, autour du général. C’est aussi vrai qu’ils étaient des caciques
du PRDS. Cela démontre que nos hommes politiques ne tirent pas de leçons des
expériences vécues, il y a si peu. L’exemple du parti Adil, fondé par des élus,
épars, et si vite autodétruit, devrait faire méditer ceux qui veulent concocter
un parti politique de ce genre. L’expérience ne semble pas constructive pour
les mauritaniens, chacun fait comme ces femmes qui acceptent tel conjoint qui
divorce, à tour de main et se remarie, le lendemain, excusez l’allégorie,
chacune se persuadant qu’avec elle, cela n’arrivera jamais. Tous les mauritaniens
raisonnent comme ça, ce qui est arrivé à Adil n’arrivera pas à l’Union Pour la
République. Et pourquoi pas? C’est la même construction, le même échafaudage.
Preuve, s’il était encore besoin, de ce que le général s’accroche, plus
que jamais, au pouvoir, en se dotant d’un instrument de conquête ou de
maintien, avec un parti à sa dévotion, qui jouera le rôle du PRDS, en son
temps, Adil n’ayant même pas eu le temps de jouer un quelconque rôle, sinon
celui de se détruire. Ma position, à ce sujet, fut, d’ailleurs, affichée très
tôt. Alors membre de la majorité, j’ai été, le premier, je crois bien, à
désapprouver, publiquement, l’illusion Adil, au cours d’un meeting populaire,
tout le monde le sait. Quant à l’UPR, sa fondation ne me dérange pas outre
mesure, il ne me concerne pas. Je suis, plutôt, content de sa reconnaissance
par les autorités, cela contribuera à sa propre destruction, comme cela fut
avec Adil. On ne change pas du jour au lendemain, ce sont les rapports de
forces qui évoluent, nécessairement, et ceux qui se constituent, aujourd’hui,
en parti seront, demain, dans le camp de ceux qui se seront substitués au
général, légalement ou illégalement.
C’est un faux-problème. Combien de gens se sont réclamés de la majorité? Certains qui s’y référaient, travaillaient pour la motion de censure et continuaient à m’affirmer qu’ils appartenaient à la majorité, au parti Adil, qu’ils n’avaient rien contre le président, mais qu’ils ne voulaient pas d’un gouvernement avec des Roumouzz El Vassad. Cela jusqu’au jour où le chef de l’Etat fut renversé. Se réclamer de la majorité, par les temps qui courent, en Mauritanie, ne signifie pas grand-chose.
Ce que j’en pense? Ce que j’en ai déjà dit au général, les yeux dans les yeux,
lorsque je l’ai rencontré la dernière fois, exceptée notre brève poignée de
mains, à l’occasion de la prière dirigée par Kadhafi, au stade. Je lui avais,
alors, explicitement parlé de l’alibi dont il se servait pour emprisonner ses
opposants. Vous ne convaincrez personne, ai-je affirmé, parce que ces gens ne
sont pas les seuls à avoir dirigé Air Mauritanie et que le tri opèré prouve, à
l’évidence, le règlement de compte politique. Je lui ai fait observer que la
Mauritanie est trop petite, qu’on s’y connaît presque tous, qu’il est vraiment
inutile d’essayer de mener en bateau, et de susciter des problèmes tordus
d’avance. Ou bien on s’investit dans le combat contre la gabegie, auquel cas il
ne doit y avoir aucune exception, et je ne vois pas pourquoi commencerait-on
par ces malheureux, au lieu de s’attaquer à tous ceux qui ont eu à gérer les
deniers publics. Libérez ces hommes, ce que vous voulez accréditer ne convainc
personne, lui ai-je dit. Comme je l’avais conseillé auparavant, lorsque j’ai constaté des excès de langage ou de zèle, de certains de ses ministres, à l’égard de la personne du président Sidi Ould Cheikh Abdallahi. Qu’il le destitue est une chose, qu’il permette à ses gens de s’attaquer, de manière vulgaire et éhontée, à la personne du président, au travers de telles parodies, n’est pas du tout de bonne augure pour le général, qui ne restera, de toute manière, pas éternellement au pouvoir. Ce n’est vraiment pas bon, de tels dérapages, pour quelqu’un qui entend présider aux destinées de la Mauritanie. Je lui ai demandé d’arrêter cela, parce que tout le monde considère, aujourd’hui, que tout ce qui se fait émane de ses ordres. Tout cela m’a beaucoup touché, bouleversé, même, je l’ai rappelé lors du dernier meeting. Vraiment, je voudrais qu’aucun mauritanien ne se révèle capable de tels actes, ce n’est pas dans nos coutumes, dans nos valeurs, que de s’attaquer à une personne en situation de faiblesse. Ce général qui parle de «sacrifice» en «consentant» à un coup d’Etat, alors qu’il savait, pertinemment, n’avoir personne pour le contrarier, lui qui disposait de toute la force. S’il avait eu, face à lui, des unités armées ou des chefs décidés à en découdre, il aurait risqué sa vie, auquel cas l’emploi du terme «sacrifice» aurait eu quelque valeur. Peut-être aurais-je dû me taire mais je suis, de nature, comme cela, je m’élève contre l’injustice, d’où qu’elle vienne. Si je demande au général de cesser ses abus, par rapport à ceci ou à cela, ce n’est pas que je recherche son intérêt – je pourrais, à la limite, ne pas m’en préoccuper – mais c’est, plus prosaïquement, pour atténuer la souffrance des victimes ou de ceux qui pourraient, éventuellement, en souffrir. Propos recueillis par Ahmed Ould Cheikh et Dalay Lam source: http://www.lecalame.mr/index.php?option=com_content&task=view&id=1997&Itemid=1 Le 19/08/09 |
MESSAOUD OULD BOULKHEIR, CANDIDAT A L’ELECTION PRESIDENTIELLE EN MAURITANIE “Les Mauritaniens en ont assez des pouvoirs dictatoriaux“
SUD QUOTIDIEN La campagne pour l’élection présidentielle mauritanienne prévue le 18 juillet se poursuit. Messaoud Ould BoulkHeir, président de l’Assemblée nationale et Candidat à la magistrature suprême s’est confié à nos confrères de Sud FM. Dans l’interview qui suit, l’harratine (descendant d’esclave) décline sa “Feuille de route“. Il fustige les pouvoirs dictatoriaux et promet de mettre son pays sur le chemin de la démocratie. Entretien… Pouvez-vous vous présenter ? Je m’appelle Messaoud Ould BoulkHeir. Je suis né en 1943. Je suis Harratine. Les Harratines sont une communauté descendante d’esclaves. Je suis administrateur de par ma formation. J’ai exercé de nombreuses fonctions dans l’administration territoriale, comme Chef d’arrondissement, préfet, gouverneur. J’ai été ministre du développement rural de 1984 à 1988 sous le régime de Taya. Je suis Président d’un parti politique appelé, Alliance populaire progressiste qui a la particularité d’avoir toujours œuvré et qui a toujours voulu tenir compte de la différence et de la multiplicité des communautés et des races en Mauritanie. C’était un devoir de les ressemble dans un parti pour bien montrer la volonté d’unité nationale. Avant cela, j’ai été président d’un parti qui est établi, Action pour le changement. Avant cela, j’ai été membre fondateur du plus important parti depuis l’ère démocratique en 1991-1992 qu’on appelle Ufd, dont j’ai été le Secrétaire général. Donc, voilà mon parcours. Aux dernières élections 2006 j’ai dû faire une lieue pour la première fois sièges députés à l’Assemblée nationale grâce à un accord signé au deuxième tour avec le candidat Sidi Mohamed Cheikh Abdallah. J’ai dû faire parti de son premier gouvernement avec quatre porte feuille ministérielles. Ce qui vous a valu même votre présidence à la tête de l’Assemblée nationale. J’ai été moi-même porté à la tête de l’Assemblée nationale par un vote quasi unanime sur 95 députés. 93 m’ont accordé leurs voix, les deux autres s’étant chacun porté candidat. Quelles formations avez-vous subi ? Quels sont vos diplômes ?, Quelles fonctions avez-vous assumez dans votre pays ? Le premier diplôme que j’ai reçu, c’est le certificat d’étude primaire élémentaire, j’ai été admis à l’entrée en sixième en 1957 -1958, j’ai fait ma première année de collège de Rosso en 1957, j’ai redoublé cette première année donc j’ai repris la sixième de 1958 à 1959. J’ai été renvoyé en 1959 définitivement de l’école. Dès lors je me suis rendu compte que j’étais entrain de tout perdre et surtout l’espoir de servir à quelque chose pour moi-même et pour mon pays. Est-ce à cause de votre caractère ou à cause de votre environnement ? C’est parce que je suis issu d’une famille de condition modeste, je suis dans une société pas tout à fait évoluée où il y a des privilèges sociaux, une stratification sociale et où des gens de ma condition n’ont suffisamment pas des mêmes atouts et des mêmes chances que les autres. De la région du Rade El Charpi. C’est la première région en Mauritanie, à la frontalière malienne. Sa capitale est Nema. Je suis un Harratine, descendant d’esclave et j’ai été inscrit à l’école tout à fait par hasard en 1950. La scolarisation française était en repoussoir pour la communauté musulmane mauritanienne et tous ceux qui s’inscrivaient ou qu’on inscrivait à l’école étaient considérés comme des « Perdus » parce qu’on assimilait l’école française au catéchisme et généralement elle était ouverte aux fils des chefs. Ces derniers, pour certains, rechignent à y inscrire leurs propres progénitures et puisque l’inscription était obligatoire, ils font recours parfois à ceux qu’on considère comme des objets, leurs harratines de la communauté. J’ai été kidnappé à l’age de 7 ans pour être inscrit en lieu et place du fils de chefs. Ce cursus scolaire difficile ne vous a-t-il pas empêcher de suivre votre combat ? Bien au contraire ! C’est ce qui m’a stimulé puis que je me suis rendu compte que si je me laissais abattre, tout allait finir. Il fallait que je me ressaisisse. Il fallait que je me refuge à la déchéance et j’ai entrepris, par mes propres moyens, de m’assumer, de me cultiver, autant que faire ce peu. J’ai vite bénéficié d’un concours providentiel dans l’administration générale. C’était un concours pour les commis d’administration en 1959. Juste après mon exclusion à l’école, je me suis présenté et j’ai été reçu. Alors j’ai commencé ma carrière administrative à l’age de 17 ans qui m’a permis de me forger une personnalité, de me forger un caractère, d’avoir une certaine renommée. Parce que, descendant d’esclave, jeune aux yeux des autorités auxquelles, j’ai servi à des tendances à ne voir qu’en moi un petit esclave alors que moi je me faisais un agréable devoir de leur montrer que j’étais loin d’être ce petit esclave. Est-ce que c’est ce qui a abouti à la création du Front national pour la défense de la démocratie ? Non, je ne pense pas. Je crois que ce front dont il s’agit est né spontanément après le coup d’Etat du 6 août 2008. C’est plusieurs partis qu’il faut décrire qui, spontanément, chacun dans son coin, ont décidé de dire non au coup d’Etat et, constatant qu’ils étaient nombreux, ils ont décidé d’unir leurs actions et de se constituer en front. Mon parti App faisait parti de cet ensemble.
Donc il s’agit d’une coalition de partis ? Oui il s’agit bien d’une coalition de partis. Quelles sont les formations politiques qui se retrouvent au sein du front national ? Il y a certains partis dont je retiens le nom parce qu’ils ont survécu et parce que j’ai eu avec eux des hauts et des bas, mais il y a d’autres que je ne connais pas très bien. Et quel est le programme du Fndd ? Le programme du Fndd est de s’opposer au coup d’Etat et de le faire échouer essentiellement. C’était cela. Monsieur le président, pendant dix mois vous avez menez une lutte farouche contre le général Mouhammed Abdel Aziz et contre le groupe putchistes du 6 août 2008 qu’il dirige, quelles sont les principales reproches que vous lui faites ? Certains observateurs notamment, ont parlé de la tournure que prend votre opposition avec le général Abdel Aziz, se demande si cela ne devient pas une querelle de personnes. Qu’est ce que vous leur répondez ? Je pense qu’ils ont tout à fait tord parce que personnellement je ne voue à mon destin ou je ne voue à mon accomplissement qu’en ma qualité de citoyen d’une République réellement démocratique.
Et quels sont les reproches que vous faites au général Abdel Aziz ? Le fait qu’il a pris le pouvoir d’une manière illégale et violente. Il a renversé un président légalement élu et internationalement reconnu et il a décidé purement et simplement et par ambition personnelle de le renverser et de s’installer à sa place. Je crois qu’il n’y a pas de raison à mon opposition de chercher en dehors de cela et c’est largement suffisant. Nous n’avons pas de problèmes personnels avec Abdel Aziz. D’ailleurs nous ne le connaissions même pas. Personnellement, je l’ai jamais rencontré encore moins discuté avec lui. Donc il n’y a pas de raisons pour que nous ayons des problèmes personnels avec lui. Mais, je suis un farouche défenseur de la démocratie. Il m’a donné les moyens. Avant, quand des militaires s’emparaient du pouvoir, c’était pour mettre fin au fonctionnement des institutions. Ils suspendaient la constitution ou dissolvaient les institutions de la République et ils agissaient en Chef suprême, militaires qui foncent sur la République. Alors, je lui avais dit que s’il voulait vraiment avoir la paix, il y n’y avait que deux solutions : ou bien revenir sur sa décision de vouloir limoger le président de la République ou bien dissoudre la Constitution et suspendre les institutions gouvernementales ou s’il veut, il n’a qu’à interdire des partis politiques et n’a qu’à s’assumer en tant chef militaire qui prend le pouvoir de force et qu’il accomplit tout seul. Mais le fait de dire qu’il ne comptait pas dissoudre l’Assemblée nationale, m’a poussé à lui dire de ne pas compter sur moi pour le soutenir parce que moi, je crois à la démocratie et je la défendrais jusqu’au bout. Alors pourquoi aujourd’hui les Mauritaniens devraient-ils vous accorder leurs suffrages au détriment des autres candidats ? Je pense que les Mauritaniens en ont assez des pouvoirs dictatoriaux, des pouvoirs qui n’ont que pour seul objectif que des ambitions personnelles et qui occultent tout à fait les préoccupations nationales, les préoccupations des populations et qu’ils voient en moi un défenseur acharné de la démocratie et quelqu’un qui a souffert d’inégalité, de beaucoup de choses qui font que je suis le seul enclin à rechercher la justice, l’égalité, la solidarité. Je pense que ce sont la des principales raisons qui font que les Mauritaniens seraient plus enclin à m’accorder leurs suffrages. Et que leurs promettez-vous par rapport à quelques-unes de vos préoccupations majeures ? Je leur promets tout ce qu’ils vont désirer en République. La démocratie, la paix civile, l’unité nationale, le droit à la différence, enfin mettre les citoyens dans de bonnes conditions et laisser la démocratie s’exprimer librement tout en tenant compte du choix des populations. Mais aussi aller dans la logique du possible dans le sens de la résolution de leurs problèmes, cela sans préjudice pour un exercice tout à fait régulier. Dans un contexte économique difficile, il va falloir trouver des moyens pour permettre aux Mauritaniens d’étancher leur soif, de se soigner, s’éduquer et tout cela demande des fonds alors que le président sortant a posé des actes comme la baisse des prix des denrées de premières nécessités. Vous quelle est votre réponse par rapport à cela ? Abdel Aziz n’a jamais été président, ni dans la réalité, ni dans les faits, il n’est pas président et ne le sera jamais dans ma bouche ou dans mon esprit. Donc je pense que ces actes ne sont pas que les siens, il n’y a absolument rien qu’ils influent. D’ailleurs, il est incapable de faire quoique ce soit, sauf prendre le pouvoir par la violence, de s’interposer par la violence, d’incarcérer les gens, de calomnier tout un chacun, de se présenter comme la seule personne digne de respect, la seule personne honnête et intègre et la seule personne patriote de la République islamique de la Mauritanie de son existence jusqu’à maintenant. Ce ne sont pas des choses que je lui attribue, il l’a déclaré lui-même. Donc, c’est quelqu’un qui vit, je ne sais pas où mais certainement pas sur un nuage que vraiment il ne ressemble à rien de ce que j’ai déjà connu. En ce qui concerne les moyens, je pense que la meilleure manière de les faire venir c’est de montrer qu’on est un Etat stable, un Etat démocratique, un Etat soucieux des accords qu’il signe, des conventions internationales et de leurs respects, un Etat qui accepte de composer avec tout un chacun et qui respecte ses engagements, un Etat qui assure la paix civile et la tranquillité. Si ces conditions sont réunies, elles ne peuvent être qu’en travers de la démocratie, je pense que dans ce cas, les fonds arriveront et vont nous permettre de faire face aux exigences de plus en plus grandes dans ce contexte de crise économique. Toujours au chapitre économique, on sent qu’il y a un fossé entre les riches et les pauvres dans la répartition des richesses. Alors comment comptez vous résoudre cet écart ? Certainement le fossé existe et a toujours existé et cela ne date pas d’hier mais cela n’est pas un problème spécifique en Mauritanie. Le problème n’est pas de rendre les riches pauvres mais plutôt de rendre riches les pauvres avec des moyens d’existence décent. Cela, on peut y arriver par la mise en place d’un système qui assure une plus grande solidarité nationale, que les impôts soient justes et qu’ils puissent être gérés de manière responsable et justement essayer de combler le fossé qui sépare les pauvres des nantis, de créer des activités génératrices d’emploi qui permettent aux jeunes actifs d’avoir des revenus. Il s’agit donc de créer des liens de solidarité, des pôles de développement qui feront bouger le pays. Et pourtant la Mauritanie dispose de pas mal de ressources et l’autre candidat en l’occurrence kan Amidou Baba a parlé de scandale géologique. Qu’en est il de sa gestion ? Je crois que ces formules à l’emporte piège « scandale géologique », je les réserve à ceux qui les veulent. Moi, je dirai que la Mauritanie a certainement des potentialités qui sont très importantes et que compte tenu de son poids démographique, il n’aurait pas été difficile d’en faire réellement un Etat moyen sans être pauvre. (Avec Sud FM)
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Interview du Président de l’Assemblée Nationale de Mauritanie, Mr : Messaoud Ould Boulkheir
Alakhbar (AL): Une mission de l’UA est venue en Mauritanie après l’échec des médiations libyenne et sénégalaise. On parle aussi d’une initiative française, quelle lecture faites-vous de ce ballet diplomatique, arrive t-il au bon moment ou es- ce peine perdue ? Messaoud Ould Boulkheir (MOB): Franchement, on ne peut avoir une lecture claire des événements tant que le Général reste sur son agenda unilatéral notamment celui d’organiser des élections au 6 juin en prenant le soin de faire un semblant de démission auparavant. Je ne vois pas de quoi il démissionne et quelle valeur a cette démission. On entend qu’il démissionne de l’armée mais pas du BASEP, qu’il quitte la présidence du HCE alors qu’il demande la réhabilitation du palais présidentiel pendant son absence pour empêcher son occupation par celui qui le remplacera. Tout cela n’est pas clair et n’augure pas d’un accueil favorable aux missions de médiation qui principalement sont à la recherche d’un dialogue entre les différentes forces politiques. Les missions qui sont arrivées jusque là n’étaient pas porteuses de propositions concrètes pouvant constituer une plateforme pour un dialogue inclusif afin de sortir de la crise. Elles semblaient plutôt à l’écoute pour savoir si les acteurs politiques sont enfin prêts pour ce dialogue. Deux délégations étaient présentes : une de l’Union Africaine composée de Ramadan LAMAMRA et du Ministre libyen Abdessalam TRIKY, ce dernier semble venir seulement en tant que représentant personnel du Président de l’Union Africaine Colonel Mouammar KADDAFI. Durant la rencontre, il apparaît que l’interlocuteur principal était M. TRIKY et M. LAMAMRA était plus à l’écoute, parlant peu. En ce qui nous concerne, nous somme prêts au dialogue depuis le début. La preuve, j’étais le premier à lancer une initiative pour une sortie de crise et nous sommes toujours dans cette perspective ; le dialogue ne peut se faire que s’il y a deux parties prenantes au moins. Malheureusement, on constate aujourd’hui, que nous sommes les seuls à nous intéresser au dialogue. A contrario, le Junte militaire ne porte d’intérêt que pour un dialogue lui assurant la non-confiscation du pouvoir. Le général s’entête à organiser un simulacre d’élections, continue à prendre des décisions anti-démocratiques par exemple l’emprisonnement des personnes qui ne partagent pas le même point de vue que lui, ainsi que des attaques personnelles, accusations infondées contre ses opposants politiques leur déniant toute popularité. Ceci démontre que l’une des parties cherche à occulter l’existence de l’autre rendant ipso facto la concertation et le rapprochement des points de vues hors du domaine du possible. Je confirme que nous sommes prêts au dialogue, mais sous certaines conditions : - que ce dialogue soit sincère et sous la conduite de l’Union Africaine car concerné en premier lieu par ce dossier sur le plan africain et international arrêt de l’agenda unilatéral pour rétablir la confiance et ramener le dialogue entre toutes les parties libération des prisonniers soit-disant accusés de gabegie, alors que tout le monde sait qu’ils sont incarcérés pour leurs opinions. Parlant de gabegie, le Général et son entourage devraient être les premiers à être incarcérés. - aller de l’avant en créant un climat démocratique où les acteurs politiques peuvent exercer librement leurs droits constitutionnels comme le Général aime à répéter que les institutions démocratiques sont préservées et fonctionnent correctement. Nous avons dit à la délégation que nous étions prêts à nous engager dans ce dialogue si certaines conditions étaient réunies mais force nous est de constater qu’elles ne l’étaient pas. Oui, certaines de nos préoccupations ont été soulevées par la délégation mais seulement sous une forme interrogative qui donne l’impression de vouloir simplement faire du remplissage, noircir du papier. Ce n’était donc pas une prise en considération sérieuse de nos préoccupations. Ce sont les mêmes idées avancées hier par Kadhafi qui sont aujourd’hui servies par M. Treiki. Il en est ainsi du fait de dire : « il difficilement pensable que les militaires vont revenir sur le statut quo, la solution serait donc une démission du Président de la République (M. Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi ndlr) suivie de la formation d’un gouvernement de transition et des choses de cet ordre. Je leur ai dit que ceci était inacceptable en l’état. Nous ne voulons pas fermer la porte au dialogue, mais quand on veut l’initier il faut le faire sérieusement. Une fois celui-ci engagé chaque partie avancera ses propositions qui seront appréciées à leur juste valeur. Nous avons également rencontré la délégation sénégalaise. Nous avions, en réalité, rencontré cette délégation par le passé et lui avions exprimé notre réserve sur le principe d’une médiation sénégalaise. Ceci parce que la plupart des médiations –et c’est une question qui doit vous interpeller en tant qu’observateurs et analystes- ne proviennent que d’Etats ayant affiché leur soutien aux militaires. Nous avions donc dit, poliment, au ministre sénégalais que nous étions réservés sur une médiation menée par le premier Etat à avoir déclaré son soutien aux militaires et qui vient nous proposer ses bons offices maintenant. Ceci est un véritable problème. Toutefois, et compte tenu des relations de voisinage et des liens particuliers qui nous lient à ce pays, compte tenu de l’estime que nous avons pour son Président, nous étions prêts à considérer une telle médiation si son auteur adopte une attitude de neutralité. Nous ne ferons pas obstacle à un bien qu’il pourrait faire pour la Mauritanie en aidant à la sortir de cette crise mais nous avons nos conditions somme toutes raisonnables: il faut, d’abord, que ce dialogue ait lieu sous les auspices de l’Union Africaine car c’est elle qui est saisie de ce dossier et nous n’avons rien vu qui puisse justifier son désaisissement. Par ailleurs, nous ne voulons pas que le Sénégal nous prenne à part, isolés. Mais cela je ne l’ai pas exprimé en ces termes. Le Ministre sénégalais est alors reparti avec l’intention d’exposer ce qu’il a entendu au Président Wade. Il est revenu maintenant avec ce qui ressemble à une proposition. Selon ses dires, le Président Wade souhaiterait venir accompagné de M. Jean Ping (Président la Commission de l’Union Africaine ndlr) pour rencontrer les différentes parties sur des points bien précis. Mais il ne souhaiterait pas que cette rencontre soit soumise à des conditions préalables. Selon lui, les parties doivent se rencontrer d’abord, et examiner les propositions qui leur seront soumises. Nous lui avons réitéré la même position et lui avons réaffirmé que, non seulement nous ne fuyons pas le dialogue, mais qu’en plus nous y tenons et le cherchons activement. Encore faut-il qu’il s’agisse d’un dialogue sérieux, ce qui ne peut avoir lieu sans la réalisation des conditions que nous avions émises. Bien que je ne veuille pas être pessimiste, ma lecture personnelle est qu’on ne nous a pas présenté de proposition sérieuse. La situation de notre pays constitue une source de préoccupations pour le monde entier et pour l’Afrique en particulier. Nous avons une position, et nous pensions que celui qui tenterait de trouver une solution devrait avoir une proposition concrète à même d’inciter les différentes parties au dialogue. Hélas, ce n’était pas le cas en l’espèce. AL: S’agissant du dialogue, il a été remarqué que la délégation de l’UA a rencontré les parlementaires de la majorité alors qu’elle n’a pas rencontré les dirigeants du front ? MOB : C’est effectivement quelque chose de nouveau, qu’elle exclue le Front de ses rencontres alors que tout le monde reconnaît qu’il est un acteur essentiel et en même temps elle s’entretient avec le président de la commission électorale indépendante, cela ne nous semble pas compréhensible. Notre lecture est que la délégation reflète les divergences de vues entre le CPS et la Présidence de l’Union. C’est du moins ce que nous supposons et ça ne nous semble pas de bon augure. Alors que nous aurions accepté volontiers le principe d’une telle rencontre en sachant pourtant que la délégation est envoyée par Khaddafi, le Président de l’UA et que ce dernier vient d’effectuer une visite pour le moins ambiguë, en Mauritanie, il n’était pas avenant que la délégation nous ignore de la sorte tout en intégrant un acteur totalement étranger aux parties. Qu’est- ce qui peut motiver en effet la rencontre du président de la CENI et même des parlementaires, car si ces derniers sont favorables au putsch, il y a des parlementaires opposés au putsch qu’elle aurait dû rencontrer. Autant vous dire que cet alignement et ce manque d’équilibre sont à l’origine de l’échec de la médiation du Guide et à propos justement de ce dernier, je voudrai ici vous dire combien je suis fier de mon amitié avec le frère Mouamar Khaddafi, malgré notre profonde divergence de vues sur le dossier mauritanien et comme on dit les divergences de point de vue n’empêchent pas l’amitié. La responsabilité de cet échec n’incombe pas au Front, mais bien à ceux qui ne se sont pas acquittés comme il se doit de leurs missions quand ils étaient chargés de préparer le dossier en prélude à la visite du Guide. AL: Par rapport à la position française, l’on relève une certaine ambigüité, à la suite des déclarations du Président Sarkozy et des prises de positions contradictoires. La France serait notamment favorable à toute solution interne issue d’un consensus, ce à quoi le Général a fait allusion quand il a dit : « l’extérieur leur a dit, retournez à l’intérieur » ? MOB : De toute manière, je ne suis pas de ceux qui courent derrière les rumeurs et je me dois néanmoins de vous réaffirmer que notre position n’est ni dictée par l’extérieur ni tributaire de celui-ci. Bien au contraire, ceux qui se confondent à l’extérieur et en sont dépendants ne sont autres que ceux qui ont perpétré cette conspiration criminelle et sordide de coup d’Etat. Il est d’ailleurs loisible, une fois que l’on aura connu la vérité, de découvrir que ceux qui ont commis cet acte ne l’auraient pas fait s’ils n’avaient pas consulté l’extérieur. Il est révélateur, en effet, que leurs préoccupations majeures depuis le coup d’Etat est de se faire accepter par l’extérieur. Ils ont pour cela dépensé l’argent, exploité comme ils peuvent les relations dont ils disposent et ont mis à profit les parlementaires et les responsables qui ont sillonné le monde, en quête de soutien ou de sympathie. En ce qui nous concerne, nous n’avons aucune gêne à nous faire dire que cette affaire relève des mauritaniens et d’eux seuls, ceci nous réconforte plutôt. Personne n’ose nous accuser d’affiliation à l’extérieur ni de nous fier à l’extérieur. Notre position, nous l’avons voulue nous-même en prenant la responsabilité de défier les putschistes et de leur dire non. Nous assumons cette position pleinement, nous persisterons et nous userons, pour cela, de tous les moyens dont nous disposons, que nous trouvions ou non, une aide de l’extérieur. Nous n’épargnerons aucun effort pour parvenir à notre objectif de faire échouer ce coup d’Etat. Pour ce qui est de la position française, une lecture attentive des déclarations du Président Sarkozy, ne permet nullement d’en déduire un appui de la France au putsch. Il faut dire que dans leur quête effrénée d’un quelconque appui de l’extérieur, les autorités putschistes ont amplifié ces déclarations en essayant d’y entrevoir un changement de la position française. Quand on se réfère aux dernières déclarations françaises, on se rend compte aisément que la position française n’a pas du tout changé et que la France demeure opposée au putsch. Bien évidemment si la France dit que les candidatures aux élections est une affaire mauritanienne qui relève du droit mauritanien, cela va sans dire et cela ne saurait être interprété comme étant un fléchissement de la position française. En tout état de cause, notre position ne saurait fléchir du fait du changement de la position française ni de celui de l’Union africaine, ni même de celui des Etats-Unis qui continuent à s’opposer farouchement au coup d’Etat. En réalité celui qui mise sur l’extérieur et se dépense sans compter pour gagner sa confiance, ce n’est pas nous, mais le Général. Nous nous sommes rendus à l’extérieur juste pour contrecarrer les mensonges et allégations qu’on essaie de véhiculer sur la situation en Mauritanie. Il s’agit de défendre notre position, d’expliquer notre version des choses et de démystifier la propagande mensongère et je crois, que tout compte fait, si l’extérieur (la communauté internationale) approuve une position en Mauritanie, c’est plutôt, à, la nôtre, quoi qu’on dise, à tort ou à raison, de la position française. AL : Enfin, vous avez rencontré certaines personnalités et précisément l’ex-président Ely Ould Mohamed Vall, est-il possible de dire qu’il vous a rejoint dans votre combat contre le putsch ? MOB : (Rires) Effectivement, j’ai rencontré l’ex-président Ely Ould Mohamed Vall et nous avons discuté de la crise actuelle et il m’a paru clairement que bien qu’il n’ait pas fait de déclaration publique jusqu’à présent, il n’en demeure pas moins qu’il ne trouve aucun intérêt pour la Mauritanie dans la position de la junte militaire. Il a confirmé qu’il ne participerait pas à leurs élections car de telles élections ne sont pas acceptées par l’ensemble des forces politiques et elles n’y participeront pas. Tout comme il a confirmé qu’il n’a jamais manqué d’indiquer cette position à tous ceux qu’il a rencontrés et qu’ils ne leur a jamais demandé de ne pas divulguer ce point de vue . Il ne me l’a pas demandé à moi non plus mais je n’en dirai pas plus. AL: Il est actuellement en visite à l’étranger. Avez-vous coordonné avec lui la substance du message qu’il va porter à l’étranger ou jugez-vous plutôt qu’il n y a pas lieu de coordonner ? MOB : Je l’ai appelé à élargir le front et je lui ai posé des questions précises à ce sujet et il m’a donné des réponses que j’ai trouvées suffisantes et il n y a pas eu de coordination précise. Nous avons choisi de laisser à chacun les actions qui lui conviennent mais il m’a dit que l’espoir reste ouvert dans un élargissement du front y compris son adhésion à celui-ci. AL: Vous avez déclaré à RFI que vous n’épargnerez aucun effort pour faire échouer l’agenda unilatéral et en particulier les élections même si cela devait nécessiter d’occuper la rue au moment où l’autre partie vous décrit comme un petit groupe qu’on peut compter sur les doigts d’une main et que vous êtes cinq hommes et quatre femmes. MOB: Comme je vous l’ai dit cela relève des petites polémiques (aswaga) et moi je ne compte pas les suivre. En revanche, si nous n’étions qu’une poignée, une dizaine ou une centaine, pourquoi y aurait-il besoin de confronter ce petit nombre par les unités de répression quand nous avons décidé de manifester, ceci n’est pas logique. Et le fait de traiter les gens de cette manière n’est tout simplement pas recevable. Ils doivent s’élever un peu s’ils ont l’ambition de la responsabilité et le désir de se faire entendre et cela je l’ai dit à Ould Abdel aziz et je lui ai dit qu’il y a des comportements qui ne sont pas à la hauteur et qu’ils ne servent ni sa personne ni la Mauritanie et que tout le monde devrait s’en éloigner. Mais il n’a pas écouté mon conseil et il a persisté sur cette voie. En tout cas, si nous ne sommes qu’une poignée, l’autre partie ne compte qu’une seule personne qui est Mohamed Ould AbdelAziz et lui le général sait et le monde sait que nous représentons la légalité constitutionnelle, la défense de la légalité , la légitimité populaire et que nous représentons la majorité du peuple. La meilleure preuve sont les marches de manifestants par milliers qui manifestent contre les putschistes. Le dernier meeting qui a fait trembler la capitale avec des dizaines de milliers a montré notre capacité à mobiliser la rue et le fait qu’une majorité du peuple mauritanien se reconnaît dans notre choix. Je voudrais rappeler que nos manifestations et nos marches sont des droits démocratiques garantis par la constitution et il est naturel que les gens protestent et manifestent dans la rue. Nous avons décidé de manifester et nous l’avons accompli et nous continuerons à manifester que la rue soit avec nous (comme nous l’avons démontré) ou contre nous comme les putschistes le prétendent. Qu’ils préparent leurs poignards et qu’ils construisent les prisons comme ils ont menacé de le faire, qu’ils sortent leurs fusils s’ils veulent tuer le peuple mauritanien, nous sommes prêts à faire face et qu’ils ne s’imaginent pas que les choses sont restées figées car la Mauritanie a changé et tout le monde doit changer. Qu’ils ne soient pas aveuglés par la soif du pouvoir et que leurs oreilles ne soient pas bouchées face à la réalité du changement radical que la Mauritanie a connu et qui fait qu’elle ne peut plus être dirigée comme elle l’a été durant ces dernières décennies. J’ajoute que si nous avons une constitution et que
tout le monde y tient et que nous avons des institutions constitutionnelles
en place, pour quelles raisons les mauritaniens seraient privés de leur droit
de manifester ? Nous, nous allons manifester et nous descendrons dans la
rue et si on nous confronte par la répression nous y ferons face et nous ne
ferons que ce qui est légitime et démocratique et s’ils souhaitent prendre
leurs dispositions sécuritaires en prévision de ce qui pourrait provenir de
nous, à dieu ne plaise, qu’ils le fassent |
INTERVIEW DE MESSAOUD OULD BOULKHEIR , LE PRESIDENT DE L'ASSENBLEE NATIONALE
‘’La position ostentatoirement partisane du président de l’Union Africaine (UA), mandaté Farouchement opposé au coup d’Etat du 6 août dernier ayant renversé le pouvoir du Le Calame : Le président Kadhafi, désigné par le groupe consultatif de Paris, pour Ce quitus arrêterait-il, comme il l’a dit, le processus des sanctions
ciblées, décrétées Messaoud Ould Boulkheir : Oui, à mon niveau personnel et je pense, aussi, que c’est le Nous avons dit, dès le départ, qu’il fallait être
bon joueur, éviter d’émettre un jugement
Calame : Vous l’avez rencontré, après cet incident et peu avant son
départ. Qu’est-ce Messaoud Ould Boulkheir : C’est vrai, nous nous sommes rencontrés, avant son départ. Sur le plan protocolaire, je me suis présenté, effectivement, en tant qu’ami de la Libye,
Calame : Si cette médiation est considérée comme un échec de l’UA, de
quelle stratégie Messaoud Ould Boulkheir : Ce qui a échoué, au niveau de notre entendement,
en tout cas,
Calame : Le porte-parole du gouvernement vient de déclarer que le
président Kadhafi Messaoud Ould Boulkheir : Moi, je suis un croyant, je suis un
musulman. Le refus du
Calame : D’aucuns ont dit que vous étiez contre la dissolution du
Parlement, que le Messaoud Ould Boulkheir : Vraiment, je ne comprends pas le sens de cette question. Je C’est alors que le président m’a téléphoné, en m’informant qu’il avait
été saisi,
Calame : Vous avez été menacé par une motion de destitution, venue des députés
qui Messaoud Ould Boulkheir : Vraiment, vous me posez une question à
laquelle il m’est Calame : Lors du dernier meeting du FNDD, vous avez affirmé que Ould Abdel
Aziz ne Messaoud Ould Boulkheir : Par le combat politique que nous continuons à mener, nous
Calame : Contrairement au FNDD, le RFD n’a pas condamné le putsch du 6
août, mieux Messaoud Ould Boulkheir : Vous savez, les gens font de la politique, chacun suit son Calame : Lors du dernier meeting du FNDD, vous avez affirmé que le front
restait uni, Messaoud Ould Boulkheir : Je ne condamne pas votre manière de faire, mais je pense Calame : Certains caciques du pouvoir d’Ould Taya, qui continuent à
graviter autour du Messaoud Ould Boulkheir : Selon mes informations, ceux qui
veulent fonder ce parti Mais ils se réclament, d’emblée, de la majorité ! Calame : C’est un faux-problème. Combien
de gens se sont réclamés de la majorité? Messaoud Ould Boulkheir : Certains membres du FNDD sont embastillés, depuis 18-03-2009 Propos recueillis par Ahmed Ould Cheikh et Dalay
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Interview
exclusive, Messaoud Ould
Boulkheir :
Notre dernier entretien remonte au 28 mars 2005
(Nouakchott Info n°752), quelques jours avant la tenue du Forum du RDU (11 avril
2005) et en pleine crise de l’affaire Jabhalla. Depuis lors, Nouakchott Info : M. le
Président, la première question qui nous vient à l’esprit est de savoir le
pourquoi de cette candidature et de son
timing ? Messaoud Ould Boulkheir : S’agissant du premier volet de votre question, je pense que ma candidature est légitime en tant que responsable d’un parti créé pour viser le pouvoir, assumer les hautes charges du pays, la direction de cet Etat. Quant à son timing, j’aurais pu dire que c’est le fait du hasard, car nous étions au sein de la coalition qui voulait voir la possibilité de nous mettre d’accord sur une candidature unique. C’est pour cela que nous nous somme s accordés un délai de réflexion et je dois dire que j’ai ainsi évité d’être l’un des premiers à offrir également l’occasion à mes détracteurs - et Dieu sait qu’ils sont nombreux - de me tirer dessus. N.I. : Vous n’êtes pas sans savoir que cette recherche d’une candidature unique de la CFCD a toujours été un vœu pieu. Non seulement pour les membres de la Coalition mais aussi pour ses militants et qu’en allant en rangs dispersés l’opposition traditionnelle qui a tant mis d’années à supporter les frustrations, la marginalisation, à rester plus ou moins solide, soudée ou accrochée à ses principes et son combat pour être au pouvoir, est en passe de le rater, de le perdre, alors que ses différentes formations ont le même objectif et le même espoir de changement ? M.O. B. : Bon, c’est une approche. Certains considèrent que partir en rangs dispersés dans les élections affaiblit les chances des différents partis qui ont incarné une opposition traditionnelle. Cette vision n’est pas dénuée de tout fondement et je ne pense pas qu’elle soit totalement absolue et qu’aller en rangs dispersés affaiblit les anciens partis plus que les candidats dits indépendants ou toutes les candidatures. Mais que cela peut être aussi source de consolidation, de renforcement de certains et que cette dispersion, notamment ma candidature, porte chance et non le contraire. Mais, objectivement, je pense que vous avez raison et vous avez dit cela : nous n’avons pas réussi à avoir une candidature unique. La raison en cela, il faut la chercher en les délais dans lesquelles, nous cherchons une candidature unique. Autrement dit quand il y a élection, nous y pensons mais nous y pensons tellement tardivement qu’il est très difficile de se mettre d’accord. Or si nous avions pris le temps pour nous mettre d’accord sur une candidature unique, pour dégager les critères, être d’accord sur un programme qui tienne compte de nos différents programmes et donne satisfaction à chacun, je pense qu’on y aurait réussi mais malheureusement on oublie cela jusqu’au moment où l’échéance arrive, on commence à en parler. Alors qu’il fallait le faire bien avant. Je pense que c’est la raison principale qui fait que nous n’y avons pas réussi. N.I. : Je vous le concède surtout que l’on dit assez souvent que les Mauritaniens ne font les choses qu’in extremis, mais, pour en revenir au timing de votre candidature, n’est-il pas plutôt vrai que des propositions d’un poste de Premier Ministre, vous ont été faites pour ne pas être candidat à la présidentielle ?
M.O.B. : Non je ne pense pas. Mais je dois avouer que tous
ceux qui m’ont abordé même parmi les candidats voire parmi les bonnes volontés
soit disant qui prêchent pour une candidature unique, tous me demandaient de ne
pas me présenter et d’accepter éventuellement une fonction qui ne soit pas celle
de président de la République. Parfois je m’interroge franchement pourquoi les
gens me demandent toujours à moi de désister et de choisir les seconds
couteaux ; C’est peut-être congénital, je ne sais pas, mais c’est contre cette
manière de voir, en partie que je me suis investi en politique et que j’essaye
de remettre les choses à leur place. Etre citoyen, c’est être beaucoup, c’est un
honneur car c’est être un citoyen de son pays et d’avoir le droit le briguer
tous les postes. Plutôt que de demander à quelqu’un de s’éclipser, il fallait
faire le parallèle entre les expériences, les chances, les avantages et les
inconvénients des différentes candidatures et pour cela je suis prêt à discuter
et à débattre. Mais seulement qu’on vienne me voir pour me dire d’opter pour une
candidature unique et que tout ce qui n’est pas président et à votre
disposition, vous choisissez, je réponds poliment que la décision ne
m’appartient pas mais au parti dont je conduis la politique, auquel revient le
dernier mot pour décider du mode de sa candidature et que moi, je ne
m’appartiens pas en tant qu’individu. N.I. : En quoi votre candidature d’aujourd’hui diffère-t-elle des autres ou des précédentes ?
M.O.B. : Je pense qu’une candidature est toujours une
candidature. Maintenant dans les attendus ou les attentes, je pense que nous
vivions une période qui était connue pour sa dureté et l’extrême limite des
libertés accordées aux citoyens de s’exprimer, de choisir et de s’investir dans
la politique. A présent que les choses semblent s’améliorer, on est entrain de
revenir à l’effet contraire et on voit une pléthore de candidatures. Ce qui
m’inquiète le plus. Ceux qui, dans les moments difficiles ont essayé de parler,
de défendre la vérité et l’intérêt du pays, de dénoncer, ils sont rares et si
ces gens ne s’investissent pas on risque de ne pas trouver le changement
souhaité et de tomber dans les mêmes erreurs qui ont marqué le pays depuis vingt
ans. C’est pourquoi nous nous retrouvons dans ce combat là pour que les
patriotes, ceux qui sont vraiment jaloux de l’intérêt national et aspirent
réellement à la démocratie et veulent l’instaurer avec un Etat de droit, il
faut qu’ils ne soient pas absents dans cette multitude de candidatures et c’est
en cela que j’ai voulu que ma candidature vienne renforcer les autres car je ne
dit pas qu’elle est la seule.
N.I. : Devons-nous comprendre qu’il y a, dans cette pléthore de candidatures un clan qui est celui de l’immobilisme et un autre qui est celui du changement ?
M.O.B. : Vous êtes libres de l’interpréter comme vous
voulez mais je ne cite personne en particulier, je dis très sincèrement que
dans cette multitude de candidatures déjà annoncées et que nous connaissons,
rares sont ceux qui ont été connus au niveau de l’opinion mauritanienne comme
des politiques qui s’investissent dans la vie active du pays et dénoncent ce qui
ne va pas, qui essayent de corriger les erreurs. Ils ne sont pas nombreux. Je
dis que si on laisse les candidatures à la merci de ceux qui ont toujours fait
profil bas, qui ne se sont jamais exprimés pour défendre les intérêts suprêmes
du pays, qui n’ont jamais rien dénoncer de ce qui se fait de mal durant vingt
ans, qui, pour des raisons ou pour d’autres ont gardé le silence, on parfois
même applaudi et soutenu ce qui se faisait, je dis que la Mauritanie ne mérite
pas cela et que ceux qui ont eu le courage de défendre le pays, de dénoncer ce
qui ne va pas, il faut également que ces gens-là aient voie au chapitre, je
pense que c’est un droit. Que vous qualifiez les uns de progressistes ou pas,
c’est votre droit mais moi, en tout cas je parle de faits que je constate.
N.I. : Oui, mais n’oubliez pas que c’est votre slogan «l’espoir du changement» qui incarne ce clan ?
M.O.B. : Je ne dis pas que je l’incarne seul et je le dis
haut et fort très sincèrement, mais je dis que si les Mauritaniens aspirent au
changement véritable, ils doivent soutenir ma candidatu re car je suis celui qui
incarne le plus ce changement dont a besoin la Mauritanie, même si d’autres
peuvent également l’incarner.
N.I. : Les résultats des élections sénatoriales rendus publics hier soir montrent la déroute de la CFCD et la montée des Indépendants qu’en pensez-vous ?
M.O.B. : Je fais le commentaire suivant : cela est du à la
précarité de la coalition que nous avons créée et je remarque cela surtout au
niveau de Nouakchott où nous étions la première force au niveau des
municipales. Nous avons engrangé le plus grand nombre de conseillers et ce
sont les indépendants ou les partis hors la Coalition qui l’emporte aux
sénatoriales. Donc on pouvait espérer qu’avec le nombre de conseillers que nous
avons, nous gagnerions au moins six des neuf sénateurs de Nouakchott. Mais
contre toute attente, nous n’avons pu avoir que trois. Cela veut dire quoi ? Eh bien que nous avons eu beaucoup de défections dans nos rangs, que certains n’ont pas joué le jeu de voter pour la Coalition et je conçois parfaitement que l’argent a beaucoup joué, que l’on a acheté les consciences et les votes des uns et que ceci ne dois pas être tout simplement mis à l’actif des listes Indépendantes. Je soupçonne, moi, le pouvoir de s’être tout à fait investi pour couper les jarrets à cette coalition qui semblait prendre des proportions inattendues malgré tout ce qui a été fait pour saper les assises des partis politiques en suscitant les candidatures indépendantes. Et comme cela n’avait pas réussi une première fois, il fallait que cela réussisse la deuxième fois et le pouvoir et tous ceux qui gravitent autour de lui ont mis le paquet pour acheter les consciences des conseillers et aboutir aux résultats que nous connaissons. N.I. : M. le président, au niveau de Nouadhibou votre parti avait déjà connu ce mauvais tour, lorsque le report des voix n’avait pas été fait pour le candidat le mieux placé de la CFCD et qui a fini par perdre la mairie, qu’en est-il ? M.O.B. : C’est une histoire tout à fait simple. Nous avons signé des accords électoraux au sein de la CFCD comme quoi le premier d’entre nous est soutenu par les autres. Mon parti est un parti de principes loin des magouilles et des coups fourrés et comme un autre parti nous a devancé, notre devoir était de le soutenir. Malheureusement, nous avons eu quelques cadres qui n’ont pas suivi pour respecter ce mot d’ordre et je dois dire qu’ils ont été encouragés par tous les autres partis de la Coalition qui les ont incité à se présenter pour dire qu’ils ne soutiennent pas le candidat du parti qui est venu en avant, mais ce n’est pas une raison et nous avons écrit au Wali pour lui dire que notre parti ne brigue pas la mairie et que ceux qui le font ne sont pas des nôtres et nous n’y avons rien à voir. Le parti s’est réuni et il a sanctionné en toute âme et conscience ceux qui ont agit ainsi. Il y a eu des exclusions et nous considérons que la mairie actuellement n’est pas gérée par l’APP car nous tenons avant tout au respect des autres. Cela a créé pour nous des problèmes car on m’a accusé moi de frustrer la base d’une municipalité qu’elle cherchait depuis longtemps (la préférant aux beydanes plutôt qu’aux haratines). Donc tout le monde s’est levé contre nous et lorsque nous avons envoyé une mission sur place elle a été agressée verbalement et on a même voulu la violentée. N.I. : Pour en revenir à la présidentielle, on présente certains candidats comme étant sous le manteau du Pouvoir. C’est une rumeur grave qui fausse le jeu au départ, qu’en dites –vous ?
M.O.B. : Bien sûr que cela fausse le jeu. Même si on fait
circuler de telles rumeurs de manière mensongère, cela aura son influence sur
l’électorat sachant que notre électorat pense que le devoir est de faire ce que
les autorités demandent de faire, à plus forte raison, je pense que ces rumeurs
ne sont pas infondées, qu’il y a des choses qui confirment que se ne sont pas
des fausses rumeurs, qu’il y a eu des contacts réels de certaines autorités du
CMJD pour dire qu’il faut voter dans tel sens. On a essayé de luire le blason du
candidat du CMJD au détriment du noircissement d’autres candidatures et nous
pensons que ce n’est pas juste. Et si des choses doivent être reconnues pour une
armée de métier qui se respecte, c’est que l’officier tient à sa parole. Si on
passe à côté, c’est malheureux. S’agissant de notre transition, cela l’entache
forcément. Cela l’avait déjà entaché une première fois quand les candidatures
indépendantes ont été suscitées, ce qui a contribué à une situation où il est
difficile de gérer le Parlement où il n’y a pas une majorité claire qui se
dégage, pas de frontières définies entre les parlementaires qui ont été élus
dont on ne sait ni qui est progressiste ni qui est réactionnaire, de droite ou
de gauche. C’est vraiment la meilleure manière d’arriver à ne rien gérer du
tout. De même que ces municipalités où il n’y a aucune majorité qui se dégage
quelque part, on a éclaté ces majorités de manière volontaire pour que les
communes soient ingérables. Ce que je constate, c’est que le CMJD qui est venu
soit disant instaurer une démocratie, nous a créé une situation d’ingérabilité
des institutions que ce soit les mairies ou le Parlement et même la présidence.
je ne sais si on a encore le temps, je demande aux autorités de revenir à la
raison pour terminer en beauté, s’ils veulent réellement partir et non pas
prolonger leur mandat.
N.I. : Qu’en est-il de cette idée de prolongation du mandat du CMJD ?
M.O.B. : Je reviens d’une visite au Hodh Charghi où j'ai
entendu parler de marches qui vont être organisées là-bas et à Nouakchott pour.
On m’a demandé de rentrer car le président du CMJD rencontrait les présidents
des partis politiques et on a demandé après moi. C’est vrai, j’ai entendu donc
parler de l’organisation de marches de soutien pour la prolongation au pouvoir
du CMJD mais je constate qu’il n’en est rien. D’ailleurs dans mon discours de
candidature présidentielle j’ai abordé cela pour dire aux militaires de
respecter leurs engagements et je pense que personne n’a le droit de décider
pour les Mauritaniens pour choisir qui doit les diriger.
N.I. : Une dernière question : Si Messaoud est au deuxième tour, ce sera avec qui ? Ou s’il n’y est pas qui soutiendra-t-il ?
M.O.B. : Non, je ne veux pas jouer à ce jeu-là, surtout
que la prophétie n’est pas reconnue comme assez courante chez les Messaoud ou
les M’barkate (rires). Depuis longtemps j’avais émis des réserves sur la
conduite de cette transition et que je voulais bien accompagner les militaires
mais pas à n’importe quel prix. Au fur et à mesure que les choses avançaient,
les gens ont remarqué que j’avais raison de ne pas donner un chèque en blanc aux
militaires. Maintenant ce que je peux espérer pour la Mauritanie, c’est que ceux
qui passent au deuxième tour soient les meilleurs pour la Mauritanie. Et si
Messaoud n’est pas au deuxième tour, il essaiera en son âme et conscience et
compte tenu de l’expérience qu’il a de la Mauritanie et des Mauritaniens de
choisir le meilleur candidat pour la mauritanie.
Propos recueillis par Mohamed Ould Khattat
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Interview
de Messaoud ould Boulkheir
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Compte-rendu de l'interview de Messaoud Ould Boulkheir sur
Al-Arabiya
Posté le 24 March 2007 à 20:32:53 CET 24
mars 2007 :
Compte-rendu de l'interview de Messaoud Ould Boulkheir sur Al-Arabiya Messaoud Ould Boulkheïr, ancien candidat à l’élection présidentielle en Mauritanie s’en est pris au Rassemblement des Forces Démocratiques (RFD), au motif d’avoir prémédité la conclusion d’un accord secret avec le Conseil Militaire, moyennant l’obtention du poste de Premier Ministre. Et Ould Boulkheïr de déclarer, lors d’un entretien avec Alarabiyah : « Nous détenons des preuves certaines que le Rassemblement des Forces Démocratiques (RFD) et ses soutiens étaient prêts à occuper la fonction de Premier Ministre sous une Présidence prolongée du Conseil Militaire. » En
réplique aux rumeurs visant son parti après sa décision de soutenir le
candidat Sidi Ould Cheikh Abdallahi, il précise qu’il « n’admettra
pas de surenchère sur son patriotisme ni la sincérité de son engagement
d’opposant », ajoutant qu’il fut le premier à contester Ould
Taya : « Tous m’ont rejoint dans Le leader de l’Alliance Populaire Progresssite (APP) révèle qu’au lendemain de l’éviction de Ould Taya, il croyait retrouver, enfin, des camarades parmi les opposants auto-proclamés, pour coordonner les positions envers le Conseil Militaire mais « j’ai décelé chez eux l’inverse : des personnes sans principes, dépourvus d’orientations claires, en déficit d’opposition résolue. Cette situation m’a déçu et déconcerté. En conséquence, j’ai opté, à cette étape du cheminement, pour choisir en toute liberté et lucidité, le sens adopté par mon parti et il n’y a nul regret à cela ».
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CONFIDENCES
DE : Messaoud Ould Boulkheïr
En quoi consiste cette violation?
Les plus hautes autorités de l’État ont entrepris d’encourager et de soutenir
les candidatures indépendantes aux différents scrutins, au détriment de celles émanant des
partis.
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Interview de Messaoud Ould Boulkheïr à l'occasion des élections présidentielles 2003
Je suis né en 1943 ou plus exactement vers 1943 à FARA el KITANE, une localité située à 50 kilomètres au sud de Néma. Néma est le chef-lieu du HOD EL CHARGHI, une région de l’extrême sud-est de la Mauritanie, limitée à l’est et sud par le Mali, ex-territoire du Soudan français. .A cette époque l’état civil était presque inconnu dans le pays et plus particulièrement dans les zones de brousse, souvent éloignées des centres administratifs coloniaux. Je suis né de parents Haratines, c’est-à-dire de parents Noirs ( sûrement d’origine négro-africaine ), devenus esclaves des Arabo-berbères de race blanche ( communément appelés bidhanes ), auxquels ils ont été totalement assimilés du point de vue de la langue (le hassania, arabe dialectal), du mode de vie (nomade), de la culture et de la civilisation (avec, toutefois, certaines nuances tout à fait caractéristiques de leur très lointaines origines dont ils n’ont jamais plus gardé, dans leur écrasante majorité aucun souvenir.) Je suis membre de la petite collectivité maraboutique dite AHEL TALEB ETHMANE, aujourd’hui encore recensée dans le département central de Néma Les rapports de mes parents avec leurs maîtres étaient des plus ambigus : statutairement esclaves, mes parents n’étaient cependant pas attachés directement à leurs maîtres et vivaient en totale autonomie par rapport à eux. Comme tous les Haratines de l’époque (et même aujourd’hui), ils vivaient d’agriculture (cultures fluviales de l’oued Fara el Kitane, justement), d’élevage et de cueillette. Mon père pratiquait aussi la chasse à courre et à la trappe. Ma famille n’était pas assez grande et était plutôt assez bien lotie : elle possédait une tente noire en laine de mouton, du mobilier traditionnel standard de l’époque, quelques têtes de chèvres et de moutons, des animaux de bât (surtout des ânes.) Elle était composée, outre le père et la mère, d’une soeur utérine, l’aîné des enfants et de trois frères germains dont je suis le deuxième. Il y avait, en outre, mes deux grands-mères (maternelle et paternelle) un oncle maternel (plus âgé que ma mère) et une tante paternelle (plus jeune que mon père), qui constituaient la structure de ma grande famille.
Les péripéties de mon entrée à l’école française Mon souvenir le plus lointain remonte à cette matinée de fin septembre ou début octobre 1950 où, alors que je me trouvais en compagnie de mon frère aîné au milieu de notre troupeau de chèvres et de moutons, je fus surpris de l’entendre presque crier ces mots , d’une voix pleurnicharde:> A peine avais-je eu le temps de me retourner, que je me vis arraché du sol par mon ravisseur, lequel, en quelques pas, poussé par le deuxième ravisseur resté sur la selle, partit en grandes foulées au milieu de mes pleurs et de mes cris ainsi que ceux de mon, frère. Ce dernier nous avait poursuivis, autant que le lui permettait son handicap inhérent à des séquelles de syphilis et le terrain particulièrement rocailleux parce que collinaire ; cependant, je ne pouvais pas l’apercevoir, masqué que j’étais par mon ravisseur qui bouchait mon horizon à l’arrière. Nos pleurs et nos cris se répercutèrent longtemps dans la vallée. Plus tard, je devais apprendre mes ravisseurs n’avaient été perçus par personne d’autre que nous, malgré la proximité de notre campement, à peine distant de deux kilomètres. L’alerte avait été donnée par mon frère, longtemps après qu’il se soit exténué à nous poursuivre. Notre seule consolation, mon frère et moi, si consolation ce jour là il pouvait y avoir, était que les ravisseurs étaient des membres de la collectivité et non des inconnus. Pour ma part, je n’avais aucune idée des raisons et des objectifs de mon enlèvement. Ce
fut sous la tente du chef de la collectivité, alors que son épouse
s’acharnait vainement à me consoler en me tenant dans les bras,
que j’entendis parler, pour la première fois, de l’école à
laquelle on semblait apparemment me destiner. C’est
ainsi que je fus le premier ressortissant de cette collectivité à
être admis à l’école des blancs,
l’école
des français ; à l’époque, l’école était surtout réputée
pour être celle des fils de chefs en particulier, de l’aristocratie
en général. Si l’objectif déclaré de la puissance coloniale
était de se doter de futurs auxiliaires et collaborateurs du
terroir, la réalité inavouée était que ces écoles servaient
surtout à masquer le recours honteux au système des otages. Pourquoi moi et pas un autre… ? L’école
française était très mal perçue en milieu maure, où elle était
assimilée à l’école religieuse catholique. C’est pourquoi,
certaines familles maraboutiques, plutôt que d’y envoyer leurs
propres fils, préféraient leur substituer des esclaves, ce qui, à
leurs yeux, était tout à fait moral et normal. C’est ce qui
explique, en partie au moins, le dévolu porté sur moi, ou plus
exactement sur ma famille, car c’est elle que l’on voulait
atteindre à travers moi. Ma
mère avait deux maîtresses, d’une famille très pauvre, voire
misérable. Leur misère était telle que leur cousin avait tendance
à les déconsidérer. Ma mère, plus par générosité que
contrainte et forcée, Revenue à la vie, sans rien changer à son état de délabrement physique et vestimentaire, elle s’était rendue à Néma pour se plaindre à l’administration coloniale. Cette dernière, bien que se rangeant rarement du coté des esclaves ou des Haratines, victimes des mauvais traitements de leurs maîtres, tuteurs ou simplement en rupture avec eux, face à l’atrocité des blessures de ma mère sur laquelle ses tortionnaires s’étaient acharnés sans aucun scrupule, avait non seulement exigé de réparations immédiates (restitution et remboursement des biens détruits ou disparus) mais également décidé que la plaignante, ainsi que toute sa famille, seraient dorénavant libres de toute sujétion. Il fut suggéré à ma mère de s’installer à Néma, pour éviter d’éventuelles représailles, ce qu’elle rejeta, fermement décidée qu’elle était à s’assumer et s’imposer dans son milieu. C’est
ainsi que ma famille, pour prix du sang versé par ma mère, fut la
seule femme Haratine de sa collectivité à bénéficier, à
l’époque, du statut administratif de « famille », à être
recensée distinctement des maîtres bidhanes, donc à payer ses
impôts… C’était en 1942 ou 1943. On dit qu’au temps où se
déroulaient ces événements, j’étais âgé de 12 mois. Rebelle
et indépendante mais poursuivie par la haine d’une femme
influente, ma famille était donc une proie toute désignée… Il
est à noter pour S’agissant maintenant du ravisseur qui m’a arraché du sol, il me rend jusqu’ici visite à Nouakchott, chaque fois qu’il y est de passage, le deuxième étant décédé peu de temps après l’enlèvement. Ma vie d’écolier A l’époque il n’y avait que deux écoles, de trois classes chacune, dans toute la région. L’une était installée à Timbédra et l’autre à Néma, les deux villes étant distantes d’une centaine de kilomètres. Les trois classes de école correspondaient respectivement au cours préparatoire (2ans), et au cours moyen (2ans). A l’école de Néma que je fréquentais, il y avait une cantine scolaire pour les élèves venus de la brousse comme moi. Nous y avions droit aux trois repas du jour : petit déjeuner, déjeuner et dîner ; nous avions droit aussi à une tenue une ou deux fois en année scolaire composée d’un boubou et d’un saroual en percale blanche. Nous logions en ville chez les correspondants de nos familles, voire de nos tribus. Ma correspondante était une femme assez âgée, de la tribu des Tadjekante. Elle avait sa maison dans le quartier de Néma, dénommé Délouba. Elle était veuve ou divorcée et vivait seule avec son fils âgé de 25 à .30 ans, souvent malade et absent. Nos enseignants étaient surtout des africains : sénégalais, maliens et mauritaniens. Le régime scolaire était très sévère. Nous étions battus par les maîtres. Le châtiment était parfois des plus atroces.
Je n’avais comme encadrement que celui des maîtres, quand j’étais en classe. Ma logeuse était incapable de m’encadrer, d’abord parce qu ‘elle n’en avait aucune envie et ensuite parce qu’elle me voyait très rarement. Coupé brutalement de mes parents, de leur amour, de leur chaleur, du contact des proches et des amis, j’avais très tôt ressenti tous ces besoins, d’où ma tendance à changer souvent de correspondant, recherchant de nouveaux amis, la chaleur et l’amour perdus, etc.… Je n’étais pas un mauvais élève, mais seule la peur du châtiment corporel m’astreignait à une certaine assiduité ou sérieux. A mon âge, dans mon isolement, ma solitude, mon abandon et au milieu de l’indifférence général, il n’y avait que cette peur pour me guider, me conseiller, me raisonner, me tenir compagnie. Ma scolarité primaire s’était déroulée normalement seulement entrecoupée par le décès de ma mère, en septembre ou octobre 1953 ou 1954, puis de mon père en mai ou juin 1954 ou 1955.Bien évidemment, j’avais ressenti très douloureusement ces pertes et j’avais dû les affronter seul, sans presque personne pour me consoler. Dans
le désarroi et la solitude de mes pensées puériles, j’avais
décidé de ne plus adorer cet Allah J’ai obtenu mon C.E.P.E. (Certificat d’Etudes Primaires Elémentaires) en 1956 et réussi mon admission au concours d’entrée en sixième en 1957. Mon
expérience au Collège Xavier Coppolani à Rosso (Sud-ouest de la
Mauritanie) a été de courte durée. Comme un malheur ne vient jamais seul, ce fut également au cours de cette même année que je perdis mon unique sœur, foudroyée sous notre tente. C’était elle qui, courageusement, avait pris le relais de papa et maman. Elle laissait derrière elle deux petites filles âgées respectivement de trois ans et d’à peine une année. Le terrible retour du bâton… Le
choc de mon renvoi avait été terrible. Brusquement j’avais
réalisé que mon expérience d’écolier avait été un échec
total et donc une très grande déception pour les miens et pour moi
; au fil des ans, en effet, nous nous étions fait à l’idée que
ma scolarité n’était pas, après tout, une mauvaise chose.
Chacun s’était habitué à y voir un signe du destin. Certes ma
mère n’était plus là pour partager notre douleur et notre
déception, se rendre compte par elle-même combien ma honte était
grande, combien je me méprisais et me haïssait : j’avais réalisé
tout à coup que j’étais seul responsable de ce qui Je
ne saurai sûrement jamais par quel miracle j’ai pu survivre à
cette terrible épreuve de mon renvoi du collège alors que cette
mesure était, à mes yeux, synonyme déjà de la mort… pas plus
que je ne comprendrai peut-être jamais pourquoi, après avoir
lâchement rejeté cette mort, ma vie n’a plus été Dorénavant véritablement seul, ne connaissant pratiquement personne, jeune, novice, très peu crédible et, ce qui n’était pas pour me faciliter les choses, hartani de surcroît, je n’avais pas d’autre alternative que de surnager ou périr. M’imposer, me faire accepter, me faire respecter devint une obsession… Je
compris très vite que cette ambition démesurée pour mon âge et
mon niveau et cette rage insatiable d’exister véritablement
passaient d’abord et avant tout par moi-même : Il fallait que je
Ma soif de culture générale, celle de la vie en particulier, ne trouva à s’étancher qu’à travers la lecture qui fut, pendant de très longues années, mon passe-temps favori. Je lisais tout ce qui me tombait sous la main et j’écoutais beaucoup la radio, attentif à tout ce qu’elle pouvait diffuser. J’étais tout à fait attentif à écouter les autres surtout quand ils font étalage de leurs connaissances et de leurs expériences quelles qu’elles soient.
Une carrière administrative vite commencée… Je fus, à la suite d’un petit test de sélection, retenu pour remplir des tâches de bénévole au secrétariat du Cercle de Néma, immédiatement après mon exclusion. Très vite donc le chef du secrétariat du commandant de cercle put se décharger sur moi en ce qui concerne de nombreuses tâches courantes : enregistrement du courrier, dactylographier du courrier non confidentiel, etc. En décembre 1959, un concours direct fut ouvert au niveau national pour le recrutement de commis ou secrétaires d’administration. J’y participais naturellement avec toutefois un coup de pouce du Commandant de cercle français de l’époque qui avait accepté mon inscription parmi les candidats alors que je n’avais pas l’âge requis de 18 ans. L’opération avait consisté à informer, par message radio, de ma candidature en spécifiant que le dossier suivrait. Le concours se déroula le 10 décembre sur toute l’étendue du territoire. Il fallait cependant attendre presque sept longs mois avant d’apprendre les résultats. Ce n’est qu’en juin ou juillet 1960 que l’arrêté proclamant les résultats et portant affectation des admis parvint à Néma. Je faisais partie des heureux élus et j’étais muté à Atar, en Adrar, à l’autre bout du monde, dans le nord tout à la fois craint et abhorré par les populations du sud-est de la Mauritanie à cause de ses rezzous meurtriers et surtout à cause de ses rafles d’esclaves qui n’ont jamais visé que les Haratines. J’arrivai donc à Atar le 21 juillet 1960. J’étais plus que jamais désemparé, désorienté, complètement isolé et perdu jusque pour moi-même dans un environnement et parmi un monde à la fois inconnu et qui, de surcroît, me faisaient peur. Présenté
au Commandant de cercle, Monsieur Vésy, un français aussi,
celui-ci s’était exclamé : > Il L’indépendance du pays fut proclamée quelques mois après : le 28 novembre 1960. Les compétences des autorités administratives – commandants de cercle, adjoints et chefs de subdivision- furent transférées peu après à des administrateurs nationaux Bidhanes et Négro-africains. Affecté à la subdivision centrale d’Atar, je m’étais retrouvé sous les ordres à la fois du chef de subdivision et d’un secrétaire plus ancien et plus expérimenté que moi ; tous deux étaient des Bidhanes. Au bout de quelques mois (je n’ai aucune idée de leur nombre) je m’étais retrouvé seul face au chef de subdivision et surtout face à mes responsabilités, le premier secrétaire ayant été muté au cabinet du commandant de cercle, au premier et seul étage de la bâtisse qui abritait les deux administrations territoriales. …et très mouvementée… Le premier défi existentiel me mit aux prises avec le commandant de cercle de l’Adrar lui-même, feu Ibrahima KANE, à Atar. Un garde très fouineur et très envahissant lui ayant rapporté que > il m’avait convoqué dans son bureau et avait exigé que je lui présentasse mes excuses devant témoins : le commandant de la brigade de gendarmerie (un français encore) et le garde en question. Ayant considéré que la manière et la forme étaient trop vexatoires, voire humiliantes, j’ai refusé net de présenter mes excuses et ce après avoir confirmé les propos rapportés par le garde. Il me renvoya sèchement de son bureau en me traitant de tous les noms et m’interdit de remettre les pieds dans les lieux, jusqu’à nouvel ordre. J’étais stagiaire et mon renvoi était quasiment automatique, mais je l’avais préféré à l’humiliation. Il mit un point d’honneur à me faire revenir sur ma position, alternant les pressions extérieures et les siennes, la persuasion et les menaces, le tout en vain. A l’issue d’une ultime convocation et constatant qu’il ne m’impressionnait pas du tout, il m’avait enjoint de rentrer chez moi en me tenant ces propos : > Une ou deux années après ce généreux conseil, je fus muté par décision de Nouakchott dans le sud du pays, dans le Brakna, à Boghé. Le désappointement du commandant de cercle avait été tel qu’il m’avait sommé de quitter Atar, le lendemain même. La providence fit qu’il tomba la même nuit une très forte pluie (on était en août 1962) qui provoqua la fermeture de la seule piste ou route. Informé de ce contretemps, le commandant de cercle décida de me céder sa place dans l’avion qui partait le même jour, mettant un point d’honneur cette fois à me faire > Venu
à l’aéroport, accompagné de son épouse, pour me voir embarquer
dans l’avion en partance pour Nouakchott, il fut certainement
surpris de me voir venir à eux et de m’entendre dire, en lui
tendant respectueusement la main : > Pourquoi cette réaction de ma part ? La réponse, je l’ai déjà donnée plus haut : Mes défis et mes combats ont toujours été contre moi-même, pour me forger un caractère, une personnalité, être un homme, atteindre mes propres limites. Je n’éprouve généralement ni haine ni rancune pour mes contradicteurs, car dans mon esprit ils n’ont occupé qu ‘une place tout à fait secondaire, fortuite, par rapport à celle, très principale, permanente, qu’occupe mon Ils ne sont pour moi qu’un champ expérimental, jamais recherché mais rencontré, par hasard… Je
surprends toujours ceux qui me connaissent par mes colères
orageuses qui tombent aussi vite Mes réactions les surprenaient et les révoltaient toujours, considérant ma fierté, mon assurance et le sentiment général de liberté et d’aisance que je dégageais, pour de l’arrogance. Il me souvient par exemple qu’ayant un jour fort contrarié mon chef, le préfet feu Cheikh DIALLO, dans son bureau, il était allé jusqu’à menacer de me gifler si je répétais le propos en cause. Sans aucune hésitation, je l’avais répété. Le préfet s’était levé fou furieux de son fauteuil, avait fait le tour de la table, s’était planté devant moi et avait levé le bras pour apparemment m’asséner la gifle promise. Il avait hésité une fraction de seconde et avait rabaissé le bras, l’index pointé en avant et, l’appuyant légèrement sur ma tempe, s’était étonné : > D’un amour propre très chatouilleux, j’avoue de côté qu’il m’est souvent arrivé de me formaliser pour des rien, y percevant parfois une volonté maligne de la part de mes contradicteurs, ce qui ne saurait être toujours vrai. Parfois aussi certains abus délibérés de mes chefs, envers les administrés, généralement des haratines dans ces cas, m’avaient poussé à engager ouvertement les hostilités. A
l’issue du stage effectué à Nouakchott entre 1964 et 1965, nous
étions 10 à être reçus au concours de fin de stage et promus au
grade de rédacteurs de l’Administration générale (cycle B) pour
compter du 1 janvier de l’année suivante (1966.) J’avais été
reçu major de la promotion, ce qui ne m’épargna pas, cinq ans
après, à Maghama, au Gorgol, de me retrouver sous les ordres d’un
promotionnaire catapulté préfet alors qu’il était classé
sixième de la promotion. Mes
vigoureuses protestations écrites eurent pour conséquence mon
affectation, en juillet 1972, en qualité de chef d’arrondissement
d’une localité sans population et sans eau, Temessoumitt
(département de Moudjéria) au point d’intersection des régions
de l’Adrar, du Trarza et du Tagant dont elle dépend
administrativement. Contraint
et forcé de résider à Moudjéria, j’eus des problèmes avec mon
chef direct, le préfet du département, feu Ismaïl Ould
ABOUMEDIANA. Mis au courant de la situation qui prévalait entre
nous, le pouvoir central me muta à Ouadane, en Adrar, un
arrondissement perdu lui aussi dans le désert, mais beaucoup plus
vivant que Temessoumit. Le
ministre en personne me convoqua et tenta de me persuader de ne pas
renoncer à ce pour lequel il m’avait convoqué, allant même
jusqu’à me rappeler que je n’étais pas sûr de réussir mon
entrée à J’acceptai néanmoins de lever le défi en signant ma démission. Le résultat fut qu’à la rentrée, un cycle nouveau, le cycle A Long (Administrateurs civils bilingues) était introduit à l’ENA. Les conditions pour y entrer était pour le professionnel que j’étais, les mêmes que pour le cycle A Court. Le concours direct concernait quant à lui les bacheliers. Je passai donc les deux concours et je fus reçu aux deux. J’optai pour le A Long, malgré les matières arabes et les mathématiques qui occupaient une part non négligeable de l’enseignement qui y est dispensé et mes limites certaines en ces matières. La promotion, les premières, ne comptait que dix étudiants dont neuf bacheliers et moi. La scolarité dura quatre ans. A la sortie, j’avais été classé 3ème de la promotion et je fus immédiatement promu adjoint au gouverneur du district de Nouakchott, chargé des affaires administratives. Quatre mois après, je fus nommé préfet central à Rosso où j’eus trois épreuves de force avec les trois gouverneurs qui se sont succédé durant la seule et unique année effectuée en charge de ce département. Je
fus ensuite promu gouverneur de la région de Gorgol (Kaédi) le 1er
janvier 1981. J’y suis resté jusqu’au 10 octobre 1984 et j’eus
, là aussi, à relever des défis importants contre des proches du
chef de
Il
y a aussi que j’avais jugé, à juste titre, je crois, qu’il y
avait de l’exagération en ce qui concerne Bien évidemment, la situation aujourd’hui est pire que celle décrite en 1986. Aucun mot ne pourra jamais faire saisir tout à fait l’intensité et l’horreur de la vague de répression qui à déferlé sur ces communautés. Nous travaillons de concert avec tous ceux qui croient encore à l’idéal de justice, de paix, d’unité et de solidarité. Notre foi et notre détermination pour la réalisation de cet objectif ne faibliront jamais. Je
suis au courant de nouvelles tendances qui se dessinent chez les
FLAM et j’attends, pour y voir clair réellement, que les FLAM
cessent de répandre des aberrations mensongères à propos des
haratines qu’ils considèrent être la source de leurs maux et
donc leur principal ennemi. Je crois très sincèrement et très
simplement que les haratines qui ont ( par eux-mêmes ou parce
qu’ils ont été manipulés par A
l’heure actuelle le pouvoir en Mauritanie agit sans la moindre
logique, de manière presque paranoïaque. Ainsi la Mauritanie s’est
retirée de la CEDEAO, pour se couper encore davantage du monde noir
africain alors que celui-ci fait partie de la substance de son
peuple, qu’il fait partie de son héritage culturel et
historique. Sans un rôle constructif et d’avant garde à jouer en Afrique noire, la Mauritanie ne représente aucun intérêt pour le monde arabe, ni pour le monde islamique, ni même pour ses propres citoyens. La
Mauritanie a pour seule vocation d’être ouverte sur le monde
arabe, sur le monde africain car par Dois-je enfin rappeler que l’Afrique noire constitue le seul et unique arrière-pays pour les bidhanes ? Je
souhaite donc du fond du coeur l’avènement dans mon pays, comme
dans le reste du monde, d’une démocratie véritable, d’un
dialogue sincère et constructif, seule alternative à la violence.
Il faut que le pouvoir en Mauritanie crée les conditions d’un tel
dialogue. Une fois ces conditions réunies, Les haratines représentent environ 50% de la population totale du pays, elle même estimée à 2.500.000 habitants. Aux élections de 1996, Action pour le Changement a été le seul parti véritablement de l’opposition à avoir fait élire un député qui, depuis a pris le large… Aux élections de 2001, AC a fait élire 4 députés ( deux à Nouakchott dont moi-même, un à Nouadhibou et un au Guidimaka) , 4 maires ( dont trois à Nouakchott et un à Sélibaby) et plusieurs conseillers municipaux sur le territoire national devenant ainsi le premier parti de l’opposition, malgré toutes les contraintes imposées par le régimes et sa machine administratives. Après la dissolution arbitraire de mon parti AC en janvier 2002, dans les conditions que vous connaissez et le refus de ce régime de reconnaître notre nouvelle formation politique Convention pour le Changement ; il a été convenu de fusionner Convention pour le Changement (CC) et l’Alliance Populaire pour le Progrès (APP) au sein du parti APP. Malgré
l’attachement du peuple mauritanien à la démocratie, son
aspiration à participer à la gestion des affaires du pays et la
lutte qui a été engagée par ses forces vives, patriotiques et
démocratiques, le processus démocratique dans notre pays est
adopté surtout pour répondre aux orientations et pressions des
pays occidentaux ainsi qu’aux changement survenus dans le monde,
précisément la chute du bloc socialiste et la course des pays de
l’Europe de l’Est vers le système libéral et la mode libérale
qui a gagné l’Afrique. Ces conditions ont coïncidé avec une
crise aiguë multidimensionnelle vécue par le régime militaire en
place qui était dans un isolement politique total et se débattait
dans une crise économique profonde. Ce qui l’a amené à accepter
immédiatement des orientations françaises d’Avril 1990 visant le
changement dans sa forme pour éviter les conséquences de
C’est ainsi que le pluralisme est arrivé dans notre pays sous la pression de l’extérieur pour répondre à des besoins pressant du régime lui-même. Il s’agit notamment de dépasser sa crise et de camoufler ses crimes et ses violations des Droits de L’Homme qui ont culminé en 1989-91 durant toute la période d’exception et de conserver le pouvoir à travers des élections truquées. Ce processus démocratique a été préparé unilatéralement sans aucune implication des forces et acteurs politiques dans le pays de manière à assurer au régime sa pérennité. Ceci s’avère clair à travers les textes qui gèrent le processus démocratique. L’article 104 rajouté à la constitution, après le référendum, les textes relatifs à la protection de l’ordre publique et ceux organisant les élections promulgués dans des périodes précédent le processus démocratique, dont certains relèvent de la période coloniale, vident de fait la Constitution de son contenu. Les élections étaient des mascarades pour pérenniser l’armée au pouvoir (Présidence de l’Etat, Présidence du Parlement, Direction des grandes entreprises économique du pays). Cette période a été riche d’oppression, d’arbitraire, de confiscation des libertés publiques et des violation des droits de l’homme. Elle se singularisait par: -La
dissolution des partis d’opposition et le blocage des activités
politiques des autres partis de -La censure de la presse indépendante et du barreau des avocats pour les museler -Les multiples arrestations des dirigeants des partis politiques d’opposition et organisations de masse ( syndicats, etc. ) -Les arrestations et tortures d’hommes d’opinion -Les massacres et tortures de citoyens innocents -L’absence de neutralité de l’administration -La carence de l’appareil judiciaire et l’inexistence de voies de recours. -La gabegie, la corruption, le détournement des deniers publics, etc. Cette période est marquée aussi par la détérioration du climat politique et économique par le régime à travers la réanimation des cadres tribaux et régionaux et le recrutement des chefs traditionnels comme ses clients politiques, et la transformation de l’appareil de l’Etat en une entreprise de corruption. Les nominations, les services, avantages et toutes sortes d’intérêts publics sont conditionnés par le soutien au régime Ainsi
l’appartenance à la tribu a supplanté l’appartenance à
l’Etat, ôtant à la loi son rôle et son pouvoir de protection et
faisant du clientélisme le moyen de protection à la place des
lois. Ce qui a conduit à la destruction de la notion et de la
présence matérielle de l’Etat au niveau du citoyen, hypothéquant
Les fraudes dans les élections ont fait perdre au citoyen toute confiance en celles-ci et en la démocratie. Même si l’opposition parvient, par le biais des élections, à certaines places électives (députés ou maires), les portes resteront toujours fermées devant tout changement effectif car les institutions parlementaires et communales ne disposent d’aucune compétence réelle. L’expérience
des dernières élections a prouvé que le régime est incapable
d’admettre l’opinion de Les réalités de la société et de l’opposition s’ajoutant à la volonté et au comportement du régime ont conduit le processus démocratique à de tels résultats. La
société, à cause de son sous-développement et de analphabétisme,
était un instrument docile aux mains du régime et des chefs
tribaux qui usent à la fois de séduction et de pression. Les
partis Celui-ci, se trouvant dans l’impasse, toute ouverture d’horizons futurs est conditionnée par la capacité de l’opposition à unir ses efforts afin de créer les conditions favorables à une transition démocratique capable de se développer, non de tenter d’améliorer un processus en crise dés son départ. Le
parti APP a pris la décision de participer aux élections
présidentielles, en présentant ma candidature -le candidat du parti soit l’unique candidat de l’ensemble de l’opposition afin de sauvegarder l’unité de celle-ci ; -Au cas où il y aurait pluralité de candidats, que prévale une bonne coordination entre eux; -L’élaboration d’une stratégie d’actions communes de l’opposition pendant et après la campagne, ce qui suppose de travailler, ensemble, dans le cadre d’une vision, en partage, de l’alternance démocratique. Octobre 2003
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