Ould Bedre Eddine: les journées de concertations ne sont que des
rencontres entre...
...putschistes
et la Junte militaire se dirige vers la banqueroute (importante interview)
Le
dirigeant du Front National pour la Défense de la Démocratie (FNDD) et
Député de l'Union des Forces de Progrès (UFP), Monsieur Moustapha
Ould Bedre Eddine, déclare que ce que les Militaires appellent 'Journées
de Concertations' "consistent en une réunion de putschistes qui
discutent des affaires de putschistes" et ne constituent en rien une
occasion de dialogue entre les protagonistes de la crise.
Le Député ajoute qu'à son avis, la Junte se dirige droit
vers la banqueroute à cause de la conjugaison de plusieurs facteurs dont la
crise économique mondiale, l'anarchie dans la gestion intérieure et l'isolement
international. Ce n'est pas la chute vertigineuse des cours de la monnaie
nationale (15 % en dix jours) qui viendrait démentir Ould Bedre Eddine!
Ould Bedre Eddine, lors d'une
importante interview réalisée par le journal arabophone "El
Moustaghbal" et traduite en français par les services de For-Mauritania,
dissèque la comédie des journées de concertations en expliquant
qu'elles n'ont aucune valeur légale ni importance politique.
Boycottées par
les 12 partis du FNDD, les Centrales Syndicales, les ONG de la société
civile et des Droits de l'Homme, d'importantes personnalités telles l'ancien
Président du CMJD, Ely Ould Mohamed Vall et même par certains soutiens
des putschistes, ces journées n'ont qu'un but, loin d'être atteint, celui de
légitimer le fait accompli militaire.
Dans cette interview, Ould Berdre Eddine revient sur les rencontres
entre le Président de l'UFP, Monsieur Mohamed Ould Maouloud et
celui du Rassemblement des Forces Démocratiques, Mosieur Ahmed Ould
Daddah pour expliquer qu'ils rentrent dans le cadre de contacts réguliers
entre les deux entités.
Le but de ces rencontres est d'expliquer au RFD que ses positions par
rapport au Coup d'Etat étaient en contradiction avec ses principes et son
histoire faite de lutte frontale contre les régimes militaires.
Revenant sur les relations diplomatiques avec Israël et l'éventualité de leur
rupture, le dirigeant du FNDD rappelle qu'une telle coupure serait
naturelle mais ne mériterait pas qu'on tresse des lauriers au Général limogé
pour autant. Cela ne lui donnerait aucune légitimité supplémentaire.
Et voici le texte de l'interview:
El
Moustaghbel : les journées de concertations ont démarré samedi dernier avec une
participation massive y compris de la part de certaines chancelleries
occidentales accréditées chez nous. Est-ce que cette participation pourrait
leur conférer une sorte de légitimité malgré le boycott du Front ?
Moustapha Ould Bedre Eddine : Pour nous, la réussite des journées de
concertations tient en une chose : sa participation à réduire le différend né
en Mauritanie à la suite du coup d’Etat du 6 août. Ce coup d’Etat a divisé les
Mauritaniens en deux camps : ceux qui s’agrippent à la légalité et à la
Constitution, légalité que représente le Président élu pour cinq ans et reconnu
par tout le monde, Sidi Ould Cheikh Abdallahi et ceux qui on renversé cette
légalité et cherchent à s’en créer une nouvelle en imposant le fait accompli.
Toute initiative qui ne vise pas à rapprocher ces deux camps nous éloigne de la
solution. Les journées de concertations, telles qu’elles ont été organisées,
telles que sont leurs composantes et leurs buts ne pourront pas servir à
rapprocher les deux camps.
Ces journées sont organisées par les autorités putschistes… le Conseil
Militaire et son gouvernement, n’y participent que les soutiens des
putschistes, pas tous d’ailleurs. De mon point de vue leur but principal est la
légitimation et la consolidation du Coup d’Etat.
En face et en dehors restent le Front pour la Défense de la Démocratie, les
Centrales Syndicales avec ce qu’elles représentent comme masses de
travailleurs, les Organisations Non Gouvernementales de la société civile et
nombre de partis et de personnalités non négligeables.
L’une des plus importantes de ces personnalités est, sans doute, Ely Ould
Mohamed Vall que je mettrais au même rang que celui du Président Sidi Ould
Cheikh Abdallahi en sa qualité de Président lors de la période de transition.
Il avait transmis le pouvoir au Président élu. Le boycott de ces journées de la
part d’Ely Ould Mophamed Vall amoindrit leur importance voire leur ôte tout
crédibilité.
Ces journées consistent en une réunion de putschistes qui discutent des
affaires de putschistes. Ils essayent de leur donner de l’importance en y
invitant des personnalités et notabilités qui n’ont strictement rien à y faire,
comme le dit Ahmed Ould Daddah. La plupart de ces personnalités, venues de tous
horizons, peuvent contribuer à tout sauf à la Politique. Elles ne sont là que
pour faire du chiffre.
El Moustaghbel : Boidjel Ould Hmeid a déclaré, lors d’une émission télévisée,
que le Front est pour le dialogue mais qu’il n’a pas été consulté de façon
officielle. Quel est le sens de cette déclaration de votre point de vue au
Front ?
Moustapha Ould Bedre Eddine : Cette déclaration- d’après ce que nous en
avons compris au Front- veut dire que les journées de concertations, telles
qu’elles sont organisées et tels que leurs buts ont été définis, ne constituent
pas un point de départ pour le dialogue.
Pour le Front, le dialogue doit être entre les partenaires politiques sans la
participation des militaires et notamment sans ceux parmi ces derniers qui ont
commis un coup d’Etat et renversé l’ordre constitutionnel. Ce qui est attendu
de ces derniers est de renoncer au coup d’Etat.
Quand tel sera le cas, les forces politiques, dans toute leur diversité y
compris celles qui avaient soutenu le Coup d’Etat, pourront s’asseoir, sous
l’égide du Président élu sidi Mohamed Ould Cheikh Andallahi, pour discuter de
la meilleure manière de sortir de la crise consécutive au Coup d’Etat. C’est
cela le dialogue pour nous. La méthode adoptée pour ces journées de
concertations n’a rien à voir avec le dialogue.
El
Moustaghbel : De nombreuses sources ont rapporté, ces derniers temps, des
rencontres entre le Président Mohamed Ould Maouloud et le Président Ahmed Ould
Daddah. Qu’en est il exactement et est ce là un début de rapprochement entre
les deux partis ?
Moustapha Ould Bedre Eddine : Je voudrai rappeler que les contacts n’ont
jamais été interrompus entre l’Union des Forces de Progrès (UFP) et le
Rassemblement des Forces Démocratiques (RFD). Même dans les périodes les plus
sombres et notamment depuis le 6 août, les contacts ont toujours eu lieu. Je
pense que la rencontre entre Mohamed et Ahmed le dimanche dernier était la
troisième ou la quatrième de la sorte. Son sujet était la recherche de la
solution de sortie de crise.
Plus précisément, l’UFP a, à chaque fois, essayé de démontrer au RFD que les
positions de ce dernier par rapport au Coup d’Etat sont orthogonales à ses
principes et à son programme. Comme tout le monde le sait, le RFD est un
authentique parti d’opposition qui combat le régime militaire depuis les années
90. Nous n’accepterons pas de sa part qu’il se mette à cautionner un régime
militaire.
Nous avons espoir et nous continuons à entretenir cet espoir que le RFD finisse
par adopter les positions qui lui correspondent et qui consistent à repousser
le régime militaire et refuser de se plier aux desiderata de ce dernier, comme
il l’a toujours fait. Evidemment nous ne sommes pas encore arrivés à le
convaincre mais cela n’entamera pas notre détermination à persévérer dans cette
voie. C’est la position de l’UFP mais aussi celle du Front qui est toujours en
contact avec Ahmed Ould Daddah.
Il y a eu entre le RFD et le Front des discussions. Dans un communiqué, Ahmed
Ould Daddah affirmait que le Front porte la responsabilité du refus du
dialogue. Le Front, dans autre communiqué, a répondu en récusant cette
affirmation et en réitérant sa disponibilité à chercher un terrain d’entente
permettant de se débarrasser du régime militaire.
L’objet de ces rencontres a donc toujours été de convaincre le RFD et notamment
Ahmed Ould Daddah de la nécessité de renoncer à aider les putschistes et de
revenir à son positionnement historique à savoir celui de chef de file de
l’Opposition démocratique.
El Moustaghbel : D’aucuns considèrent que l’opposition traditionnelle à Ould
Taya avait fait la preuve, en 2007, qu’à elle seule, elle était capable de
remporter les élections en Mauritanie. Les Mauritaniens lui feraient confiance,
probablement parce qu’elle a moins trempé dans les affaires de gabegie que
d’autres. Mais à chaque fois, une main invisible intervient pour la diviser et
priver les Mauritanien du Changement tant attendu. Qu’en pensez-vous ?
Moustapha Ould Bedre Eddine : Vous avez raison. Si l’Opposition
traditionnelle ne s’était pas divisée entre les deux tours, elle aurait
remporté l’élection de 2007. Si cette même opposition arrive à se retrouver
actuellement, aucune autre force ne l’empêcherait de faire échouer le Coup
d’Etat et de redresser la situation. Mais, malheureusement, ce sont les
divisions actuelles et anciennes qui font le malheur du pays.
A l’UFP et au sein du Front nous sommes décidés à rassembler cette opposition
d’autant plus que cette dernière s’est élargie et compte dans ses rangs une
partie importante des forces qui soutenaient l’ancien régime. Nous pensons que
rien ne pourrait résister devant une telle opposition, une fois rassemblée.
Je reconnais qu’il y a des difficultés et que des différences de sensibilités
entre les composantes d’une telle opposition sont à l’origine de son
émiettement et furent à la cause de sa dispersion lors de la formation du
gouvernement de Ould Elghf. Cette différence de sensibilité était aussi à
l’origine de la différence de positionnement par rapport au Coup d’Etat. Mais
je continue à penser que nous avons en commun un passé de lutte et que nous
avons tous intérêt au retour de l’ordre démocratique.
Nos efforts convergent vers deux points essentiels qui nous uniront : le retour
de la démocratie et l’éloignement de l’Armée par rapport à l’exercice du
pouvoir. Il s’agit là d’un minimum vital qui réunit l’ensemble de l’Opposition,
ceux qui sont au Front et ceux qui n’y sont pas et notamment le RFD.
El Moustaghbel : La classe politique est obnubilée par la situation à Gaza.
Cette tragédie a unifié la classe politique qui a pu se retrouver dans un
meeting unitaire. Pensez-vous que l’éventualité d’une rupture des relations
avec Israël pourrait brouiller les cartes et atténuer les frontières?
Moustapha Ould Bedre Eddine : Comme vous pouvez le remarquer, dans
l’ensemble du monde arabe et musulman, tout le monde est descendu dans la rue ;
gouvernants et administrés, partis de gouvernement et ceux de l’opposition. Les
communiqués et déclarations des uns et des autres sont très proches sinon
confondus. Les tons des condamnations peuvent varier, mais tous dénoncent la
barbarie aveugle. C’est ce à quoi la cause palestinienne nous a habitués… En
tant qu’arabes, nous restons divisés sur tout mais unis quand il se produit
quelque chose en Palestine.
Mais quand la tension tombe à Gaza, nous retournons vers nos divisions
habituelles. Je l’avais dit dans une réunion, nous, les Mauritaniens, nous
sommes redevables à la Palestine qui nous trouve déchirés à couteaux tirés et
nous permet, quand quelque chose s’y produit, d’afficher notre plus belle
unité. Mais, comme tous les autres Arabes, la Palestine ne nous doit que très
peu de chose…
Depuis le temps de ma jeunesse, j’ai vu les arabes manifester pour la
Palestine. Mais je n’ai jamais vu autant de malheur s’abattre sur ce peuple que
ce qui lui arrive actuellement. Jamais l’Histoire n’a enregistré autant
d’impuissance des palestiniens, autant d’aplatissement des Arabes. Si les
centaines de millions d’Arabes avaient pu avoir une position commune contre
trois millions d’israéliens, la question aurait pu être réglée, depuis 60 ans
que cela dure.
Si les Arabes étaient sérieux dans leurs intensions, Israël n’aurait pas pu se
permettre la barbarie actuelle. Mais, visiblement, les gesticulations
auxquelles nous assistons chez nos gouvernants sont destinées à la consommation
locale, sans autres finalités. C’est de la poudre aux yeux qui se dissipera dés
que la crise baissera d’un cran. Et on reviendra à nos querelles habituelles en
oubliant, pour un temps, la Palestine.
C’est un sport purement arabe et nous, les Mauritaniens, nous ne dérogeons pas
à cette règle. Quand le pouvoir trouve que la cause palestinienne peut lui
permettre d’atténuer les effets d’une crise intérieure, il n’hésite jamais à
s’en servir… Je me rappelle de l’année 1968 quand il y eut la tuerie de
Zouérate.
Les Mauritaniens sont descendus dans la rue pour condamner le massacre et
exprimer leur solidarité avec les travailleurs de Zouérate tout en fustigeant
le gouvernement de feu Moktar Ould Daddah. Mais, très vite, ce dernier se
rappela de la cause palestinienne et n’hésita un seul moment à exploiter ce qui
s’y passait en ce moment là. Ce fut le grand meeting unitaire dans lequel le
Président demanda aux Mauritaniens de taire leurs divisions et de se
solidariser avec les Palestiniens meurtris. Et ça avait très bien marché.
Cela ne m’étonnerait pas de voir le pouvoir actuel afficher sa solidarité avec
les Palestiniens de Gaza mais il est clair que le but est plus d’endormir les
Mauritaniens que de soutenir le peuple de Palestine. C’est plus un traitement
de la crise intérieure à la Mauritanie qu’une volonté réelle d’aider les
Palestiniens.
Cependant tout pas dans la direction d’une rupture des relations avec Israël
serait le bienvenu, mais ce ne serait là que faire son travail de la part des
autorités mauritaniennes et de toutes autres autorités arabes. Tant qu’Israël
traite la question palestinienne avec tant de barbarie, de violence et de
violation des droits humains les plus basiques, toute relation avec cet Etat
est une trahison de la cause palestinienne. Un pouvoir qui rompt une telle
relation aurait renoncé à aider Israël à continuer à tuer des Palestiniens.
Devrons-nous le décorer pour ce geste ? lui tresser des lauriers ? bien sûr que
non. Une rupture éventuelle des relations avec Israël ne nous empêchera
nullement de continuer à réclamer le retour à la légalité et la restauration de
l’ordre constitutionnel…
Les forces politiques se doivent de soutenir les Palestiniens et d’exiger des
gouvernants locaux et dans le monde arabe de rompre les relations diplomatiques
avec Israël. Nous devons aider nos frères à Gaza, que nous soyons dans
l’Opposition ou au Gouvernement. Les aider moralement, matériellement et même
aller combattre à leurs côtés. Ce doit être le programme des forces politiques
jusqu’à l’arrêt de l’agression et l’instauration d’un Etat palestinien dont
Elghods sera la capitale.
Pour ce qui est de la crise locale, en Mauritanie, elle était là avant Gaza et
demeurera après. Il est vrai que les événements de Gaza, par l’impacte qu’ils
ont sur tout le monde, impactent aussi cette crise. Mais cette crise locale ne
pourrait avoir d’issue que par une dynamique locale… Le retour à la démocratie
en Mauritanie ne pourrait être envisagé durablement sans le renoncement
définitif à la pratique des coups d’Etat et l’instauration d’une solution
constitutionnelle.
El Moustaghbel : Le Député El Khalil Ould Eteyeb avait dit qu’en cas de rupture
des relations avec Israël, il se joindrait aux journées de concertations.
Quelle signification peut-on donner à de telles déclarations ? Serait ce juste
un défi ?
Moustapha Ould Bedre Eddine : Il se trouve que j’étais là quand la
déclaration avait été faite et il me semble que les journalistes ne l’avaient
pas répercutée avec toute la précision requise. Le Député avait réclamé la
rupture des relations avec Israël en ajoutant qu’il serait reconnaissant au
gouvernement si ce dernier rompait ces relations. Il n’a pas dit qu’il irait
aux journées de concertations, même si certains l’ont compris ainsi.
Pour nous la rupture des relations avec Israël est une obligation. Nous ne
reconnaissons pas les autorités actuelles et une éventuelle rupture avec Israël
ne nous amènera pas à changer d’avis et ne donnera pas à ces autorités plus de
légitimité à nos yeux.
El Moustaghbel : Pensez-vous que le peuple mauritanien soit réceptif à cette
façon de poser la question ? Lui qui est si enthousiaste à la rupture de
relations que même le gouvernement élu n’avait pu rompre.
Moustapha Ould Bedre Eddine : L’importance des relations diplomatiques avec
l’Etat d’Israël a été exagérée. Ce sont des relations entre le gouvernement et
Israël. Les Mauritaniens, dans leur diversité, y compris les membres du
gouvernement quand ils s’expriment en off, détestent Israël.
L’Ambassadeur israélien vit reclus et rares sont ceux qui lui rendent visite
publiquement. Il est souvent absent et a été, à de nombreuses reprises, chassé
de nombreuses cérémonies où il avait essayé de paraître en public. Ces
relations sont donc inexistantes dans la pratique et néfastes pour l’image du
pays à l’étranger. Celui qui les rompra n’aura fait que son devoir et ne peut revendiquer
une récompense particulière. C’est un peu comme quelqu’un qui s’adonnait à la
consommation de l’alcool et des stupéfiants décide d’arrêter. Il ne peut exiger
une médaille contre son abstinence retrouvée. Il n’aura fait que normaliser sa
situation.
Il serait suffisant pour le gouvernement qui romprait ces relations là de se
faire pardonner par le peuple d’avoir attendu si longtemps pour le faire. Il
est vrai que la rue sera contente étant donné la monstruosité de ces relations,
quand elles seront coupées mais n’accordons pas à cet éventuel geste plus de
valeur qu’il n’en a en réalité.
El Moustaghbel : Ne craignez-vous pas que le Général Aziz tire de la gloriole
de cette rupture, se drape dans l’habit du nationaliste héroïque et devienne
plus difficile à combattre politiquement?
Moustapha Ould Bedre Eddine : C’est possible. Il est possible que certains milieux
arabes non informés sur ce qui se passe en Mauritanie le prennent pour un
héros. Pour nous, Mauritaniens opposés aux relations avec Israël, nous ne le
considérerions pas comme un héros car il n’aurait fait que son devoir. Vous le
savez bien, notre différend avec Ould Abdel Aziz ne réside pas dans la question
des relations avec Israël mais dans le fait qu’il avait usurpé le pouvoir. Ce
différend ne pourrait être dépassé sans le retour à la légalité
constitutionnelle en Mauritanie.
El
Moustaghbel : Comment envisagez-vous l’avenir pour résoudre cette crise
politique ?
Moustapha Ould Bedre Eddine : Il me semble que la résolution de cette crise
nécessite un certain temps. Il semble cependant qu’au niveau national il existe
un fort attachement à la démocratie et au respect de la Constitution. Cet
attachement est perceptible pas seulement au niveau du Front mais bien au-delà,
au niveau des forces syndicales, de la société civile, des organisations de
droits de l’Homme, des notabilités et même des milieux traditionnalistes…
Au niveau international, il existe une quasi unanimité sur la condamnation du
Coup d’Etat en Mauritanie et la revendication du retour à la légalité
constitutionnelle. Pour preuve de cette unanimité, le fait que pas un seul pays
n’a déclaré publiquement sa reconnaissance des autorités militaires. Même les
pays qui manifestent une certaine compréhension à l’égard des militaires le font
le plus discrètement possible, comme s’ils en avaient honte.
Autre preuve, pas un seul télégramme ou message de félicitation n’avait été
adressé au général Aziz à l’occasion de la fête de l’Indépendance et ce malgré
les cérémonies qu’il organisa et les lettres qu’il envoya aux quatre coins du
monde et à tous les présidents et chefs d’Etat étrangers. C’est bien là un état
d’embargo diplomatique et un divorce consommé entre la Junte et le monde.
Je crois que cette situation va perdurer et empirer les semaines et mois
prochains, aussi bien au niveau local qu’au niveau international…
Sur le plan national, la crise économique dans laquelle le pays est planté va
s’aggraver à cause de la chute des cours du fer mauritanien pour lequel la
demande se raréfie. En plus, le secteur de la pêche connaît une léthargie sans
précédent. Les Mauritaniens qui travaillent dans ce domaine sont empêchés
d’exporter leur production. Le pétrole, en plus de la révision drastique à la
baisse des quantités annoncées, voit son cours s’effondrer.
Ces secteurs sinistrés sont les principaux pourvoyeurs du budget de l’Etat.
Leur défaillance se traduira par une carence des autorités putschistes et leur
incapacité à honorer le catalogue de promesses et d’engagement qu’ils
distribuent à tire larigot et qui ne pourront être respectés.
Ajouter à cela l’anarchie qui règne sans partage dans tous les secteurs de
l’économie, de l’agriculture, de la culture et le gaspillage sans retenue qui
finiront par assécher les reliquats que les putschistes ont trouvé dans les
caisses de l’Etat. Dans un mois ou deux, le gouvernement se retrouvera au bord
de la banqueroute pour ces raisons endogènes.
Les secours ne pourront évidemment pas venir de l’Etranger et pour cause ! La
Banque Mondiale a arrêté ses programmes d’aide à notre pays. Cette aide qui
s’élevait à 271 millions de dollars américains est suspendue et ne peut être
remplacée. Il sera difficile d’expliquer à la rue mauritanienne que les
promesses ne pourront être tenues par manque de moyens. Nous allons, de mon
point de vue, vers des moments difficiles.
Nous pensons que le régime militaire s’oriente vers une banqueroute généralisée
qui l’amènera à affronter un mécontentement tout aussi généralisé. Il ne pourra
s’en sortir qu’en renonçant au Coup d’Etat et en acceptant le retour à la
légalité et à l’ordre démocratique.
Le
02/01/2009
(Traduction : For-Mauritania)
Source : For mauritania
Tiré
de www.cridem.org
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