MAURITANIE:
Mattalla Ould M’Boirk, « Je préfèrerais qu’on me tue plutôt
que de retourner chez mes maîtres »
NOUAKCHOTT, 6 janvier
2011 (IRIN) - En août 2007, l’Assemblée nationale de Mauritanie a
adopté à l’unanimité une loi criminalisant l’esclavage. Mais
selon l’organisation non gouvernementale SOS Esclaves, 18 pour cent
des 3,1 millions de Mauritaniens étaient encore esclaves en 2009. A
ce jour, personne n’a été poursuivi et cette
pratique ancienne continue.
Mattalla Ould M’Boirk travaille pour SOS Esclaves dans la
capitale mauritanienne Nouakchott. Ayant passé le plus clair de sa
vie comme esclave, il sait ce que l’esclavage et la liberté
représentent. Il a raconté sa vie à IRIN :
« Quand je
voyais ma mère et ma sœur battues par nos maîtres, ça m’était
insupportable. Je voulais m’enfuir. Mais ils me battaient, moi
aussi.
Mon travail était de m’occuper des animaux et de
faire du charbon de bois. Je partais avec les chameaux le matin,
faisais du charbon et allais chercher de l’eau potable. Je ne
rentrais au campement que vers minuit.
Notre « maison »
n’était qu’un coin du campement entouré d’un drap. On ne nous
donnait rien à manger, sauf quand nos maîtres avaient des restes.
Nous avions l’habitude d’aller dans le désert pour chasser des
petits animaux comme des lézards, pour les faire cuire et les
manger.
C’était tout simplement impossible de s’en
aller. Ici, c’est le Sahara. Si nous nous étions enfuis, nous
serions morts de faim ou de soif. Et de toute façon, nos maîtres
seraient venus nous chercher avec leurs véhicules. Les esclaves qui
avaient tenté de fuir étaient souvent tués. Nous avons connu des
cas comme ça.
Nous étions battus si nous perdions un
chameau, si nous nous asseyions sur la même natte que nos maîtres
ou si nous leur désobéissions. Une fois, j’ai perdu un chameau à
cause du vent, et le fils de mon maître m’a donné des coups de
matraque dans les yeux.
Un jour, j’étais près d’une
route et des soldats m’ont ramassé, en me demandant de leur
montrer où ils pourraient acheter un mouton et du lait… J’ai
fini par dire aux soldats de ne pas me ramener chez mes maîtres.
Puis mes maîtres sont arrivés, demandant où j’étais.
J’ai dit aux soldats que je préfèrerais qu’on me tue plutôt
que de retourner chez mes maîtres ; les soldats ont dit aux hommes
de partir.
Finalement, SOS Esclaves a entendu parler de moi
et m’a aidé à m’échapper pour de bon. Ma famille veut
toujours s’enfuir, mais elle n’en a pas trouvé le moyen. »
af/np/cb – og/amz
Theme
(s): Démocratie
et gouvernance, Droits
de l'homme,
source: http://www.irinnews.org/fr/ReportFrench.aspx?ReportID=91550
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