Mauritanie
Les autorités françaises votent
pour la junte putschiste
Communiqué de
Survie, le 17 juillet 2009
A la veille de l’élection présidentielle organisée en Mauritanie ce 18 juillet,
l’association Survie dénonce l’attitude de la diplomatie française qui, par
l’intermédiaire de ses réseaux plus ou moins officieux, apporte son soutien à
la junte arrivée au pouvoir par les armes. La France poursuit ainsi en Afrique
une politique inacceptable de soutien aux dictateurs et de déstabilisation de
processus démocratiques, allant à l’encontre des aspirations des populations.
Le 6 août 2008, des militaires avec à leur tête le général Mohamed ould Abdel
Aziz renversaient le président élu Sidi ould Cheikh Abdallahi provoquant des
protestations et manifestations violemment réprimées.
Cette prise de pouvoir par la force a été condamnée par l’ensemble de la
communauté internationale. De leur côté, les responsables français ont été plus
ambigus : si le discours officiel a été de condamner le putsch et l’organisation
d’une présidentielle, le secrétaire d’Etat à la Coopération Alain Joyandet
déclarait dès août dernier que « les revendications des militaires ne sont
pas toutes illégitimes ».
La communauté internationale a tout de même amené à la table des négociations
les putschistes et leurs opposants démocrates (FNDD et RFD) aboutissant à la
signature, le 2 juin dernier, des accords dits de Dakar.
Ces accords prévoyaient la dissolution de la junte, la démission du président
légitime renversé et une nouvelle élection présidentielle, ce 18 juillet,
organisée par un nouveau gouvernement de transition nationale.
Depuis, la junte au pouvoir a multiplié les manœuvres dilatoires afin de
retarder la mise en place de cet accord s’assurant ainsi un avantage certain
face à une opposition sans moyen et n'ayant que peu de temps pour faire
campagne.
De nombreux observateurs et analystes constatent toutefois que le
général-candidat ne devrait même pas passer le premier tour malgré l’argent
distribué pour acheter des voix. Ceci suscite leur inquiétude grandissante,
ainsi que celle des démocrates mauritaniens et d'une majorité de la population,
quant à l'ampleur des fraudes. Le général Abdel Aziz a même menacé à plusieurs
reprises et publiquement de réaliser un nouveau coup de force si les choses
n'évoluaient pas en sa faveur.
Face à cette situation, l’association Survie exprime ses plus grandes
préoccupations quant aux fraudes prévisibles en faveur du candidat putschiste
Abdel Aziz et le soutien que les plus hautes autorités françaises lui
apportent.
La junte a, en effet, très rapidement trouvé des relais parmi les réseaux de la
diplomatie française, notamment autour de la personne de M. Robert Bourgi,
avocat et conseiller de nombreux dictateurs africains ainsi que du président français
N. Sarkozy. Principal soutien international de la junte, l’Elysée a ainsi
réussi à empêcher l'Union Européenne et l'Union Africaine de promulguer des
sanctions individuelles à l’encontre des putschistes et de leurs soutiens,
contrairement aux Etats-Unis.
Par ailleurs, de multiples témoignages accusent le premier secrétaire de
l'ambassade de France d'être le conseiller de l'ombre de la junte. En outre,
lors de son dernier séjour à Paris, Abdel Aziz a rencontré M. Erard Corbin de
Mangoux, directeur général de la Sécurité extérieure française (DGSE), M.
Guéant, secrétaire général de l'Elysée, et M. Bourgi. Le numéro deux de la
junte s'est lui aussi récemment rendu en France pour acheter du matériel
militaire au salon du Bourget. Ces derniers jours, M. Bourgi a même fait
campagne à Nouakchott pour le général-candidat.
L’association Survie interpelle les parlementaires français sur cette situation
et appelle les autorités françaises à :
- cesser tout soutien au candidat Abdel Aziz ;
- clarifier la fonction de M. Bourgi ;
- dénoncer toute fraude lors du scrutin présidentiel du 18 juillet prochain ;
- s'abstenir de reconnaître tout résultat qui ne sera pas accepté par
l'ensemble des candidats et notamment ceux de l'opposition ;
- condamner toute menace portée au processus démocratique.
Contact presse : Olivier Thimonier olivier.thimonier@survie.org Tél. : 01 44 61 03 25
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