Messaoud Ould Boulkheir répond à Nicolas Sarkozy
Dans
un communiqué rendu public cette nuit, le Président de l'Assemblée Nationale Messaoud
Ould Boulkheir exprime son
étonnement et sa grande surprise devant les propos, tenus par le président
français Nicolas Sarkozy, lors d'une
conférence de presse à Niamey.
Nicolas Sarkozy avait déclaré qu'aucun parlementaire
mauritanien n'avait protesté contre
le Coup
d'Etat du Général Ould Abdel Aziz.
Or, le Président de l'Assemblée Nationale avait
condamné, dès le début, ce coup d'Etat et avait porté le combat pour le faire échouer partout dans le monde. Ould Boulkheir avait été
reçus à l'Elysée, à l'Assemblée Nationale française et auditionné par la
Commission des Affaires Etrangères du Parlement français.
Voici le texte du communiqué :
Communiqué du président de l’Assemblée
Nationale, M. Messaoud Ould Boulkheir
J’ai été, ces derniers jours, assez surpris par des propos attribués au
Président de la République française, Monsieur Nicolas Sarkozy, qui
répondait à une question relative à la crise mauritanienne, lors de sa
visite au Niger, le 27 Mars 2009, propos qui ont été vite repris, interprété et
brandis par la junte militaire comme une volte-face de la France.
N’eût été mon absolue certitude que la France d’aujourd’hui du président
Sarkozy où se réaffirme sans cesse sa volonté d’éviter la
réactivation des réseaux de la France d’hier, victime des tractations et des
manipulations d’une certaine Françafrique, qui bien qu’obsolète et anachronique, ne
désespère toujours pas de renaître de ses cendres, j’aurais été profondément
dubitatif, à l’instar de nombreux de mes compatriotes, quant au sens à attribuer à de
telles affirmations.
Ma surprise est d’autant plus fondée que la résistance (en question) au coup
d’Etat a été immédiate, forte, et continue. Dès le premier jour, un Front national anti-putsch, regroupant les
principales forces vives a vu le jour en Mauritanie ; cas unique en Afrique !
J’ai moi-même, dans une déclaration solennelle devant la presse nationale et
internationale, exprimé mon rejet catégorique du coup d’Etat,
en soulignant, loin de toute considération personnelle, le danger qu’il
constitue pour la stabilité, le développement et l’image de
la Mauritanie. Depuis cette date, je n’ai cessé de parcourir le monde, de Paris
à Johannesburg, passant par de nombreuses capitales africaines. J’ai été reçu
par plusieurs Chefs d’Etat et par le Président de la Commission de l’Union
Africaine, Monsieur Jean Ping et j’ai partout plaidé la résistance au coup
d’Etat et la nécessité d’un retour à l’ordre constitutionnel en Mauritanie,
sous peine de constituer un précédent dangereux pour le Continent tout entier
et même pour le Monde.
A l’étape française, j’ai été reçu officiellement et avec les honneurs au
Palais Bourbon par mon collègue le Président Bernard Accoyer, avec qui j’ai eu
des entretiens fructueux. Nous avons été, ma délégation et moi, conviés à un
déjeuner au Palais de l’Elysée, qui a été l’occasion d’un échange profitable avec
de Hauts responsables de la Présidence française. J’ai eu, par ailleurs,
l’occasion de m’adresser à la Commission des affaires étrangères de l’Assemblée
Nationale française devant laquelle j’ai fait un exposé détaillé sur la crise
née du coup d’Etat du 6 août 2008.
Je dois signaler également que des délégations de parlementaires opposés au
putsch ont sillonné, à leur tour, le monde, y compris la France et d’autres
pays européens pour les sensibiliser sur la nécessité de faire échouer le coup
d’état.
Il va sans dire que notre action à l’extérieur s’est accompagnée à l’intérieur
d’une lutte courageuse et continue contre le coup d’Etat : des meetings, des
manifestations durement réprimées, des sit-in et d’autres formes de
protestation de masse, nonobstant la férocité de la machine répressive des
putschistes (le Premier ministre et certains hauts responsables du Front
anti-putsch sont toujours en détention). Après toutes ces visites et ces
actions, il nous avait semblé, qu’une fois pour toutes, la cause avait été
entendue et bien entendue, notamment par la France qui est notre principal
partenaire européen le plus à proximité et donc censé être le plus au courant
de ce qui se passe chez nous.
Les ambiguïtés que les putschistes entretiennent aujourd’hui autour de la
position française et l’exploitation qu’ils en font au plan intérieur, en
invoquant tantôt des intérêts économiques (exploration pétrolière dans le Nord
de la Mauritanie), tantôt des impératifs militaires (installation d’une base
militaire française), rappellent malheureusement les méthodes désuètes d’un
passé que tous les démocrates et tous les progressistes du monde doivent
s’empresser d’oublier définitivement. Pour toutes ces France un traitement
particulier, qui découle de son rôle historique de Grande Nation démocratique
et des idéaux censés fonder son action en Afrique et son rayonnement dans le
Monde.
Les démocrates et les progressistes de Mauritanie, d’Afrique et du Monde
attendent de la France et du Président Nicolas Sarkozy d’appuyer fermement les
décisions pertinentes de l’Union Africaine, saluées et soutenues par la
Communauté Internationale dans son ensemble.
Nouakchott, le 29 Mars 2009
Messaoud Ould Boulkheir
Source : www.tagadoumy.com
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