A.H.M.E.
COMMUNIQUE 158 :
Crise politique mauritanienne : Le CPS de l’Union Africaine désavoue Kadhafi
La 182ème réunion du Conseil de Paix et de Sécurité de l’Union Africaine (CPS de l'UA) a décidé mardi à l’issue d’une réunion marathon qui a duré 5 heures d’horloge, de confirmer les sanctions individuelles adoptées à l’encontre de la junte qui a pris le pouvoir en Mauritanie. Par la même occasion, le CPS a décidé de se donner un mois pour établir la liste nominative des personnes visées par ces sanctions. L’unique point inscrit dans l’ordre du jour était : « Suivi du Communiqué de la 168éme réunion du Conseil de paix et de sécurité sur la situation en République Islamique de la Mauritanie. » D’après les premières indiscrétions qui ont filtré à l’Africa Hall, la durée de la réunion s’explique par le fait que la plus part des Etats membres étaient réticents à désavouer, de manière ouverte, le président du Conseil Mouammar Kadhafi. Le deuxième point qui aurait allongé la réunion, c’est celui de la détermination de la du temps nécessaire pour établir une liste de personnes visées par les sanctions. "Nous avons réitéré notre décision sur la prise de sanction à l'égard des renversements anti-constitutionnels de régime, et à l'égard de la Mauritanie, nous avons réaffirmé que nous prendrons des sanctions à l'égard des gens au pouvoir, civils et militaires, impliqués dans ce renversement de régime", a déclaré l'ambassadeur du Bénin, Edouard Aho-Glélé. "La liste nominative des gens visés par les sanctions sera établie dans un délai d'un mois" par la Commission de l'UA, a-t-il précisé. Les sanctions contre la junte ont été prises par le CPS de l'UA le 5 février. Elles prévoient notamment l'interdiction de voyager et le gel des avoirs des principales personnalités actuellement au pouvoir. On se rappelle que le président en exercice de l'UA, Mouammar Kadhafi qui a tenté une médiation début mars en Mauritanie, est considéré par le FNDD comme s’étant rangé dans le camps des militaires dont il a publiquement approuvé la calendrier et le schéma de sortie de crise. Il a ainsi entériné le coup d'Etat en Mauritanie en déclarant que M. Ould Cheikh Abdallahi devait "accepter le fait accompli" de son éviction du pouvoir. M. Kadhafi avait déjà suscité la colère du FNDD en jugeant clos le dossier des sanctions de l'UA contre les membres de la junte, après l'annonce qu'une élection présidentielle aurait lieu le 6 juin prochain. Ce qui a eu pour conséquence de le disqualifier aux yeux de Sidi Ould Cheikh Abdallahi et ses partisans pour mener à son terme la médiation qui lui a été confiée par le groupe consultatif réunis sur la mauritanie. Interrogé sur la contradiction entre la dernière décision du CPS et les déclarations du guide libyen, M. Aho-Glélé a répondu que "le CPS est un organe qui prend ses décisions en toute connaissance de cause et les fait appliquer". Ce qui en terme diplomatique veut dire que le CPS n’est pas sous la férule de Kadhafi dont les déclarations et les engagements ne le concernant pas. L’ambassadeur finit quand même par préciser :"Maintenant au niveau de l'UA, le président Kadhafi est un autre organe, et il a pris ses propres dispositions. Toujours est-il que nous ne sommes pas au courant de la décision ou d'une position de M. Kadhafi à ce propos". Il faut noter que c’est la deuxième fois de son existence que le CPS adopte de telles mesures cœrcitives. La première fut lorsqu’il édicta des restrictions sur les déplacements et le gel des avoirs financiers à l'étranger contre les autorités de l'île d'Anjouan, à l’époque le Commissaire en charge du dossier était un certain, Said Djinnit actuellement chargé du dossier mauritanien auprès des l’ONU. Le CPS avait approuvé des sanctions individuelles contre d’une durée de 45 jours renouvelables. Si durant cette période, les autorités illégales d'Anjouan acceptent d'organiser de nouvelles élections, ces sanctions seront levées. Dans le cas contraire, le CPS prendrait des mesures plus coercitives comme un blocus aérien et maritime", avait conclu M. Djinnit. Un mécanisme de suivi des sanctions avait été mis en place et tous les Etats membres de l'UA avaient été appelés à mettre en oeuvre ces sanctions. Cependant ce qui est inquiétant pour les autorités de Nouakchott, c’est que de telles mesures soient entérinées par des puissances comme la France ou les Etats-Unis.
Pour ce qui est de la France, celle-ci distingue trois types de sanctions financières internationales : 1. Sanctions imposées par l’ONU suite à une résolution du Conseil de sécurité qui met en place un régime de sanctions financières, à charge pour chaque pays de l’appliquer et de le transposer en droit interne, le cas échéant via l’Union européenne. 2. Sanctions mises en œuvre au niveau européen : elles sont un outil de la Politique étrangère et de sécurité commune (PESC) et prennent la forme d’une position commune de l’Union. Lorsque les positions communes décident d’une action dans les domaines de compétence de la Communauté européenne, elles sont mises en œuvre par un règlement de l’Union européenne (règlement du Conseil ou de la Commission). Les règlements européens ont force de loi dans l’ordre juridique français. 3. Sanctions mises en œuvre au niveau national : elles sont mises en oeuvre par décret en application de l’article 3 de la loi n° 66-1008 du 28 décembre 1966 relative aux relations financières avec l’étranger (Article L151-3 du code monétaire et financier). Pour ce qui est des USA, à Nouakchott on craint que la récente agitation du DCM de l’ambassade à Nouakchott soit le prélude au dépôt d’un projet de résolution auprès du Conseil de Sécurité. On se rappelle que l’Administration Bush avait ai de même en proposant des sanctions ciblées à ceux qui sont responsables de la crise politique au Zimbawé. Le projet prévoyait d'infliger un gel des avoirs financiers et une interdiction de voyager à l'étranger à douze personnalités du Zimbabwe, dont le chef de l'Etat. Ces douze personnes étaient considérées comme ayant entravé le processus démocratique dans le pays ou participé aux violences, avant la réélection de M. Mugabe, jugée illégitime, par une large part de la communauté internationale. Seulement pour le cas de la Mauritanie les choses risque d’être un peu plus compliquées à mettre en œuvre. En effet la Libye et surtout la Chine présents dans cette instance pourraient mettre en échec les projets de Washington. 26/03/2009 MSS |