Etats Généraux de la démocratie : Le torchon brûle entre la CFDD
et les ambassades européennes.
La Coordination des Forces de défense de
la démocratie, qui regroupe l’ensemble des forces politiques issues du FNDD et
les organisations de la société civile ainsi que les syndicats qui lui sont
affiliés, n’est plus en odeur de sainteté avec les ambassadeurs de l’union
européenne à Nouakchott.
La lune de miel est apparemment finie depuis que le FNDD s’est vu «invité» par
les diplomates européens «à saisir l’opportunité des états généraux de la
démocratie». Une invitation à participer que la CFDD assimile à une
«légalisation » du putsch contre un président légitimement élu.
Rien ne va plus entre la coordination du Front de défense de la démocratie et
les principaux ambassadeurs européens accrédités à Nouakchott. A l’origine de
cette incompréhension, la position exprimée par les diplomates européens quant
à la recherche d’une solution négociée à travers l’organisation par les
autorités issues du putsch de nouvelles concertations nationales dites états
généraux de la démocratie.
Un forum qui
devrait proposer un agenda pour une nouvelle transition et l’organisation d’une
élection présidentielle dans le pays courant 2009.Longtemps censés acquis à la
cause des anti putschs, les diplomates européens, français et allemand, en
particulier, avaient exprimé leur souhait de voir toute la classe politique
mauritanienne, y compris l’opposition au putsch, se retrouver pendant ces états
généraux pour évoquer l’avenir politique du pays.
L’ambassadeur
de France dans le collimateur de la CFDD
«La Coordination des Forces de Défense de la Démocratie est surprise par les
propos publics attribués à Monsieur l’ambassadeur, qui sont en totale
contradiction avec les prises de position maintes fois réitérées au plus haut
niveau par la France et précisant son rejet ferme du coup d’état du 6 août 2008
et de l’agenda des autorités issues de ce putsch et visant à le légitimer et le
consacrer comme fait accompli» note la CFDD dans la première déclaration qui
fait suite à sa mise en place. Elle se déclare notamment «surprise par le
soutien explicite apporté par Monsieur l’ambassadeur à l’agenda de la junte,
agenda qu’elle a posé depuis le premier jour, consistant à organiser de
prétendus «journées de concertation» pour légitimer une transition militaire
consacrant le fait accompli et qui a été catégoriquement rejeté par la
Coordination des Forces de Défense de la Démocratie et par la Communauté
Internationale.
Par ailleurs, la CFDD se dit «consternée par l’invitation adressée par Monsieur
l’ambassadeur à la CFDD pour participer à ce qu’il considère comme une grande
opportunité de refondre le système démocratique mauritanien pour les décennies
à venir et mettre donc au placard ses positions démocratiques».
Mieux encore, la CFDD «se demande à quelles questions fait allusion Monsieur
l’ambassadeur quand il donne l’impression de remettre en cause la qualité et la
crédibilité du processus transitoire démocratique de 2005 à 2007…». La CFDD
note encore «que par son apparente adhésion publique à la «feuille de route »
proposée par les putschistes et notamment à une sortie de crise sans le
Président de la République, Monsieur l’ambassadeur envoie un mauvais signal à
la junte qui se trouve ainsi soustraite à toutes les injonctions et pressions
de la Communauté Internationale et de la France en particulier».
Un
soutien de façade?
Depuis l’avènement du putsch contre le président Sidioca, le microcosme
politique et plus particulièrement le FNDD, avait décelé dans plusieurs
déclarations d’officiels français le soutien de Paris au président évincé. Mais
plus le temps avançait avec l’ajournement des sanctions contre la junte au
Pouvoir, l’ancienne métropole, qui présidait alors l’Union Européenne, semble
être revenue à une position plus tempérée. Même si elle se rendait compte de
l’illégalité du régime né du putsch, elle réalise paradoxalement qu’une
majorité indéniable des représentants du peuple (les parlementaires et les
maires) soutient les auteurs du coup d’Etat. Et comme le réitérait aussi
l’ambassadeur d’Allemagne en Mauritanie, l’essentiel, après la libération du
président destitué, était d’envisager un retour rapide vers l’ordre
constitutionnel.
Une seconde condition que les Etats généraux devraient pouvoir aborder. Mais là
où les divergences se feront particulièrement sentir, c’est lorsque les
ambassadeurs européens, indiqueront que seule une solution
mauritano-mauritanienne était possible pour sortir de la crise. Une position
que la CFDD marque comme un recul ; un revirement de l’UE quant à ses positions
exprimées au lendemain du putsch lui-même. La CFDD désarçonnée par ce qu’elle
soupçonne comme une «duplicité» des ambassadeurs européens fait le constat
d’une perte conséquente d’un soutien politique dont elle s’est toujours
enorgueillie.
Quoiqu’il en soit aujourd’hui, les ambassadeurs européens, comme le confirmait,
Eberhart Schanze, ambassadeur d’Allemagne, assisteront à ces assises et s’en
tiendront au sérieux des conclusions de ces journées de concertation pour voir
dans quelle mesure la seconde condition de l’UE, c'est-à-dire le retour à
l’ordre constitutionnel, est envisagée par les Etats généraux de la démocratie.
De ces résultats dépendra l’attitude européenne d’éviter au pays les sanctions
prévues à l’article 96 des Accords de Cotonou et peut être même une
reconnaissance internationale. Mais ce n’est certainement pas gagné d’avance.
Paradoxalement d’ailleurs, le refus de participer à ces états généraux place la
CFDD dans une positon inconfortable aux yeux de l’UE dont il espérait un
soutien indéfectible à sa cause.
Le 28/12/08
Jedna Deida
Source : Le Quotidien de
Nouakchott
Tiré de www.cridem.org
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