ARTICLE 563 :
Les signes ostentatoires du racisme d’Etat en MauritanieCe texte est motivé par les nombreuses réactions suscitées par un article que j’avais publié l’année dernière en début juillet je crois, au journal hebdomadaire La Tribune en son numéro 600 du 02 juillet 2012 et que j’avais intitulé « Ces graves menaces d’instabilité qui, à l’instar du Mali, pèsent sur la Mauritanie ». Mon objectif dans cet article n’était nullement de plancher sur le phénomène du racisme d’Etat en Mauritanie, mais tout simplement de soumettre au débat mon analyse des « menaces » qui pesaient et pèsent encore sur notre patrie. Il s’agissait donc bien pour moi d’impulser un débat sur le sujet peu fréquenté de la question sécuritaire en Mauritanie ; seulement, les lecteurs, du moins pour la majorité d’entre eux, n’ont rebondi que par rapport aux « facteurs internes », particulièrement sur celui du racisme d’Etat et de l’esclavage comme sources potentielles de déstabilisation de la Mauritanie. Ce qui n’étonne point le critique littéraire que je suis : un texte, à partir du moment où il est soumis à l’appréciation du public, subi parfois de telles appréhensions que son auteur s’en trouve bien des fois surpris. A ce sujet, les nouvelles théories littéraires soulignent l’avènement du « texte des lecteurs »… Parmi les nombreuses réactions engendrées par ce fameux article, disais-je, il y’en a une qui a particulièrement attiré mon attention : celle d’Ahmed Aly Ould Jiddou. Sans doute à cause du sérieux et de la retenue dont il y a fait preuve. Il va sans dire que j’ai apprécié très positivement le déploiement de l’argumentaire en réfutation de ce journaliste (ancien officier) qui force le respect. J’aurai voulu lui répondre immédiatement mais mon temps était alors complètement accaparé par mes travaux académiques qui ne pouvaient hélas attendre ; aussi je m’en excuse. C’est donc seulement maintenant que j’ai le temps de poursuivre ce débat fort intéressant, d’abord pour contribuer modestement à l’évolution positive des mentalités à travers le croisement des opinions contradictoires ensuite dans l’espoir intime que celle-ci aboutirait à la résolution du crucial problème de la cohabitation qui plombe plus qu’on ne l’imagine, le développement intégral de notre pays. Pour illustrer le caractère transhistorique du racisme d’Etat en Mauritanie, j’avais souligné que même face à la mise à mort (par décision de justice) les Mauritaniens, selon qu’ils soient noirs (Négro-africains et Hratines) beïdanes (blancs) ne sont pas traités de la même manière. J’avais alors illustré ce fait en mentionnant que la seule fois où des présumés putschistes (le terme présumé se justifie ici par le fait qu’il s’agissait d’une intention de coup d’Etat, l’acte n’ayant pas connu un début d’exécution) ont été condamnés à mort et exécutés, ce fut avec la « tentative »[1] de coup d’Etat des Négro-africains en 1987. Les officiers Ba Seydi, Sarr Amadou et Sy Saïdou furent passés par les armes après un simulacre de procès dans l’opacité d’une caserne militaire. Quand on sait que durant les 15 dernières années du règne de Ould Taya il y a eu en moyenne une « tentative » de coup d’Etat par an et que pour ces « conspirateurs », tous arabo-berbères, il n’y a jamais eu aucune exécution ; que le coup d’Etat de Ould Hanana s’est traduit par 26 morts (chiffre officiel) et que malgré le caractère de flagrant délit de ce putsch, il n’y a eu aucun condamné à mort, il devient évident que les exécutés du coup d’Etat de 1987 l’ont été parce qu’ils étaient noirs. C’est cette déduction historique que monsieur ould Jiddou a voulu remettre en cause en invoquant notamment un contre exemple : l’exécution en 1979 de Kader, Niang, Ahmed Salem Ould Sidi, Seck (pour ne citer que les plus connus d’entre eux) à la suite de leur tentative de renverser le régime de Mohamed Khouna ould Haïdalla. Mais l’information que notre ami Ahmed ould Jiddou a alors occulté sans doute pour rendre son « contre exemple » acceptable, c’est que, au plan pénal, l’exécution des putschistes de 1979 se justifie amplement du fait justement du passage à l’acte qui consacre de facto à leur action un caractère de flagrant délit. Ces vaillants hommes (on ne peut ne pas admirer Kader, Niang et leurs amis si on est un temps soit peu, sensible à la bravoure humaine) ont été arrêtés les armes à la main après avoir ébranlé d’une manière fort épique les institutions de l’Etat. Or, ce ne fut pas le cas de l’intention de putsch de 1987. Ceux-là auraient peut être eu l’intention de renverser le régime de Taya (c’est du moins ce que stipule Boye Alassane Harouna dans son ouvrage-témoignage intitulé J’étais à Walata ou le racisme d’Etat en Mauritanie Paris, L’Harmattan, 1999) mais jamais leur intention ne s’est traduite en acte. Aucune juridiction sérieuse ne condamne un citoyen à la peine capitale simplement parce qu’il a imaginé renverser l’ordre établi. Je maintiens donc que dans l’histoire de la Mauritanie, la seule fois où des militaires ont été exécutés par décision de justice parce qu’ils ont songé à s’accaparer du pouvoir, ce fut des Négro-africains. Cette conclusion est d’autant plus irréfutable que le « putsch » de 1987 a été le seul connu où les acteurs étaient tous noirs. Ba Seydi, Sy Saidou et Sarr Amadou ont été mis à mort parce que, selon les régimes racistes qui se sont succédés à la tête de la Mauritanie jusqu’au jour d’aujourd’hui (soulignons l’exception du régime hélas trop bref de SIDIOCA – sans doute a-t-il été renversé parce qu’il ne voulait pas perpétuer le système esclavagiste et raciste) en tant que Noirs, ils ne devaient pas songer à diriger la Mauritanie. Et lorsqu’une telle idée leur passe par la tête, il fallait que s’abattît sur eux la plus lourde main qui soit, pour l’exemple. C’est aussi cela le racisme d’Etat en Mauritanie. En outre, s’il est nécessaire de recourir à l’analyse pour prouver que les composantes nationales, selon leur langue et la couleur de leur peau, ne sont pas égaux devant la peine de mort, il suffit d’observer objectivement la scène du public en Mauritanie pour se rendre compte du caractère fondamentalement raciste de l’Etat mauritanien y compris sous sa forme républicaine. Pour vous le prouver je vais m’arrêter successivement sur quelques symboles de l’Etat et non des moindres.
1. L’hymne national L’hymne national est, par définition, cette musique-symbole qui, associé au drapeau national, incarne l’unité de la nation solennelle. C’est pourquoi aux côtés des couleurs (étoile et croissant jaunes sur fond vert) l’hymne national retentit à chaque fois qu’il est question de la Nation mauritanienne[2]. Aussi, le discours du président de la république à la radio comme à la télévision est annoncé et clôturé par l’hymne ; lors de ses sorties à l’étranger, il est rendu hommage à la nation mauritanienne par la montée des couleurs et le jeu de l’hymne national en sa présence. Enfin c’est le caractère sacré de ces symboles qui « impose » que les citoyens doivent se figer devant eux dès qu’ils sont mis en mouvement, c’est du moins ce que veut la logique républicaine. Et pourtant en concevant l’hymne national l’Etat a oublié le principe fondamental sans lequel, il ne saurait y avoir de nation unie au sens politique : l’égalité de tous ! En effet, en décidant de ne composer l’hymne national qu’en arabe, l’Etat exclut symboliquement les Négro-africains et leur ôte toute possibilité de ressentir, face à la levée des couleurs nationales, cette émotion patriotique qui fonde l’appartenance intrinsèque du citoyen à la patrie. Dans tous les pays africains anciennement colonisés où sont parlées plusieurs langues, le français a été adopté comme langue de l’hymne. La Mauritanie qui, en plus de présenter 4 langues, comporte deux races, aurait eu plus de raison de recourir au français comme langue transnationale, mais pour cela, il aurait fallu que ses dirigeants ne soient pas racistes. Je vois déjà se formuler les réponses de quelques nationalistes étroits qui ne manqueront pas de souligner que le français est une langue étrangère et qu’en tant que telle, elle ne peut véhiculer le « Moi » mauritanien. Je reviendrais alors à la charge pour dire que le français a certainement été la langue du colonisateur, mais que la réalité pragmatique est là : qu’on le veuille ou pas, en dépit de tous les complexes, le français qui n’est mentionné nulle part dans notre constitution est bien devenu une langue mauritanienne qui est étudiée à l’école, parlée dans les foyers, au marché et dans la rue. Je tiens toutefois à lever l’équivoque au cas où certain seraient tentés de croire que je suis un de ces défenseurs inconditionnels du français. Comme la plupart des Négro-africains, je ne défends pas le français ! Le français n’en a d’ailleurs pas besoin ! Les langues que nous défendons légitimement, au nom du droit à l’égalité, ce sont nos langues nationales (pulaar, soninké, wolof) que les différents régimes se sont efforcés de reléguer au stade de langues de seconde zone, juste bonne pour colorier une diversité démagogique mais qui ne sont jamais bonnes pour être enseignées à l’école. En imposant à nos langues et à nos cultures un statut folklorique, les dirigeants racistes de la Mauritanie les étouffent – et nous avec – insidieusement mais surement ! Supposons que c’est l’opinion anti-impérialiste qui domine l’opinion mauritanienne et que l’on ne voudrait pas utiliser le français dans les communications officielles (l’hymne est une communication), alors ceux qui ont choisi de diriger la Mauritanie doivent traiter les composantes racio-linguistiques mauritaniennes sur le même pied d’égalité en considérant objectivement que le Peul, le Soninké et le Wolof de Mauritanie ne sont pas des Arabes et ne le deviendront jamais. Ils doivent donc recourir à toutes les langues de la Mauritanie à chaque fois que l’enjeu est national. Au nom de cet impératif de justice, l’hymne national doit être recomposé dans toutes les langues de la Mauritanie ! Sinon, eh bien tel qu’il est actuellement notre hymne restera la seule propriété de la communauté beïdane. Comme nous le voyons maintenant, à part ceux d’entre eux qui assument des fonctions d’Etat, les Négro-africains passent impassibles devant cette musique nationale eux qui frémissent pourtant lorsque chante Hamady Gawdel, Demba Tandia, Youssou Ndour ou Yéro minen Tey !
2. L’équipe nationale de football Cet exemple est très important parce qu’il aura été constaté même par la frange de la jeunesse mauritanienne qui n’a pas été à l’école ou n’a pas eu la chance de pousser son instruction assez loin. Plusieurs fois des jeunes négro-africains m’ont posé la question de savoir qu’est ce que c’est que « Mourabitounes », nom donné à l’équipe nationale de Mauritanie. Quand je leur réponds que les Maurabitounes sont des tribus arabo-berbères qui au 11ème siècle ont propagé l’Islam du nord au sud de la Mauritanie, ils ne comprennent pas pourquoi leur équipe nationale s’appelle ainsi. Parce que les jihadistes de l’Islam qu’ils connaissent et en qui ils se reconnaissent s’appellent « Futankoobè » avec à leur tête un certain Elhadj Oumar Tall ! Le fait est que, là aussi, au lieu de proposer un nom qui fédère tous les Mauritaniens comme on le voit partout en Afrique, les dirigeants de notre pays qui, même dans le domaine du jeu ne peuvent faire abstraction de leur sectarisme raciste sont allés choisir un nom purement arabo-berbère pour une équipe d’un pays où plus de 80% n’est pas arabe et se définit ontologiquement comme différent de l’arabité tout en revendiquant son appartenance irréversible à l’Islam. De sorte que les Négro-africains et les Hratines pourtant majoritaires dans l’équipe nationale se sentent à la fois stupides et idiots quand on les appelle les « Mourabitounes », quant à ceux qui sont censés les supporter ils ne voient tout simplement aucune raison de supporter une équipe qui arbore un nom qui les exclut dans l’histoire des couleurs que l’équipe doit représenter. Dès lors, il n’est point étonnant que notre équipe nationale n’ait jamais remporté, non pas la coupe du monde ou d’Afrique, mais tout simplement une compétition sportive bien plus modeste. Je vous le dis, comme des millions de Négro-africains de ce pays, je ne supporterai jamais une équipe dont le nom me renvoie constamment mon exclusion dans mon propre pays. S’il en est ainsi le peul que je suis, qu’en sera-t-il pour les Hratines ? Eux pour lesquels « Mourabitoune » signifie « anciens maîtres » donc esclavagistes. Car, faut-il le rappeler, l’Islam propagé par les Mouraboutines est cet Islam malikite d’orientation esclavagiste que toutes les organisations anti-esclavagistes n’ont toujours pas réussi à débouter malgré leur abnégation ! L’incinération du « Khalil » par Biram Dah Abeid, président de l’IRA s’inscrivait d’ailleurs, à juste titre, dans la déstabilisation symbolique de ces références esclavagistes. Pourquoi, à l’instar du Mali, du Sénégal, du Maroc et de bien d’autre pays en Afrique, les dirigeants de la Mauritanie n’ont pas choisi un nom symbolique d’animal pour fédérer tout le monde ? Pourquoi l’équipe nationale de Mauritanie ne s’appellerait pas, par exemple, les « Taureaux » ? Toutes les composantes nationales se reconnaissent dans ce bel animal ! Evidemment pour y songer il fallait ne mépriser l’autre, les Noirs qui doivent s’assimiler ou disparaitre. Il y a décidément en Mauritanie de l’injustice à faire disparaitre tout l’oxygène de l’Humanité !
3. Les radios et télévisions nationales Ce sont là d’autres lieux où le racisme d’Etat se manifeste de manière frappante. Dans ces médias de masse, tous les programmes qui sont plus ou moins importants sont à la fois réalisés par des Arabo-berbères et diffusés systématiquement en langue arabe. A la télévision et à la radio, les deux grandes éditions du journal de la mi-journée et de la soirée sont diffusées en arabe (bien détaillé) et en français (juste un résumé). Après le journal en arabe et en Français, les citoyens négro-africains sont en droit d’attendre qu’on leur communique les informations qui touchent à la vie de leur pays dans leurs langues, mais les directeurs de ces médias (généralement choisi à dessein parmi les nationalistes arabes les plus étroits) préfèrent passer des clips d’artistes maures si aucun débat politique ou religieux en arabe n’est prévu. Autant dire qu’en Mauritanie, les directeurs des télés et radios préfèrent égayer la communauté mauresque (luxe) que de permettre aux citoyens négro-africains de s’informer (le fondamental). C’est à croire que tout est fait pour détourner les Négro-africains de la télévision nationale. Comment regarder une télévision ou écouter une radio de son pays si à longueur de journée, on n’a aucune chance d’entendre parler sa langue ou regarder un programme culturel où l’on pourrait se retrouver ? Mieux, plus de 90% des présentateurs des journaux et autre émissions sont beïdane. Le mot d’ordre est clair : il faut, contre toute réalité, véhiculer l’image d’une Mauritanie à majorité beïdane, si ce n’est celle d’une Mauritanie exclusivement beïdane. Que dire des autorisations d’ouverture de radios et de télévisions (licence) depuis qu’il a été voté la loi de libéralisation des ondes ? Dans le groupe de ceux qui furent autorisés à ouvrir des chaines de radio ou de télévision, il n’y a pas un seul Noir ! La conséquence de cette exclusion des populations noires des médias de masse est tout simplement incalculable sur le long terme. En effet, il est à présent établi que les Négro-africains, dans leur écrasante majorité ne captent pas les radios et télévisions nationales. Ils préfèrent tous, même en payant au prix fort, regarder les chaines sénégalaises et maliennes où ils ont la chance de suivre des programmes où ils se retrouvent ne serait-ce que culturellement. Alors le fossé entre citoyens noirs d’une part et arabo-berbère d’autre part se creuse de plus en plus car en ne regardant ni les mêmes infos ni les mêmes programmes annexes, on ne saurait avoir les mêmes références ni les mêmes avis sur l’essentiel. Tout cela ajouté à la frustration d’être exclu, c’est tout simplement tout espoir de construction d’une Nation mauritanienne unie qui s’éloigne.
4. Les forces armées et de sécurité La configuration présentée par nos forces armées et de sécurité constitue le quatrième signe ostentatoire du racisme d’Etat en Mauritanie. Il ne s’agit pas pour moi ici de revenir sur le génocide perpétré sur la composante négro-africaine de Mauritanie par les forces armées et de sécurité sur commande des plus hautes autorités du régime de Mouawiya ould Taya. Evénements qui ont entaché à jamais les treillis des armées car en s’adonnant à une tentative d’extermination de citoyens qu’elles avaient le devoir de défendre, notre armée s’est transformée en milice obéissant aux ordres d’une oligarchie désespérément raciste. En exécutant par trahison (extrajudiciaire) plus de 500 de leurs frères d’armes uniquement parce qu’ils sont négro-africains, nos militaires se sont à la fois décrédibilisées et déshonorées. Enfin en ne diligentant pas en leur sein une enquête, en dehors de toute pression, pour faire la lumière sur ces purges racistes dans leur rang, les forces armées et de sécurité écartent leur chance de redorer leur blason face à la Mauritanie biraciale et multiethnique. De toutes les façons, tout porte à croire que ceux qui les dirigent assument et même revendiquent ce caractère exclusivement arabe de leurs corps. Il suffit pour s’en convaincre de s’arrêter sur deux exemples : - le lycée militaire, sis à côté du ministère du pétrole, présente des élèves à plus de 95% Arabo-berbères Comment, dans une Mauritanie composée à plus de 80% de Noirs (Hratines, Peuls, Soninkés et wolofs) une école nationale peut afficher une telle disproportionnalité. C’est là un fait qui frise l’arrogance gratuite et pousse vraiment à la révolte des jeunes générations ; -L’encadrement des forces armées (officiers et sous-officiers) affiche les mêmes déséquilibres terribles entre les composantes du pays. Les Hratines et les Négro-africains sont relégués aux postes de soldats subalternes et à la limite de sous-officiers alors que plus de 95% des postes d’officier sont réservés aux Arabo-berbères. Il suffit pourtant de la moindre lucidité pour savoir que si ce sont généralement les officiers qui font les coups d’Etat, les révoltes des soldats se traduisent toujours par des conséquences encore plus dramatiques.
Conclusion Au regard de tout ce qui suit, il apparait que le caractère raciste de l’Etat mauritanien ne fait aucun doute. Le Mauritanien selon qu’il soit Hratine, Peul, Soninké, Arabo-berbère ou wolof est traité en fonction de son origine raciale et/ou linguistique. Les manifestations populaires organisées par Touche pas à ma Nationalité (TPMN) pour combattre l’exclusion sans commune mesure des noirs dans les enrôlements et défendre des langues nationales d’une part, celles d’IRA-Mauritanie contre l’esclavage toujours pratiquée sur une partie des Noirs mauritaniens d’autre part, constituent, s’il en était besoin, des faits incontestables de l’existence dans notre pays des crimes de racisme et d’esclavage. Dès lors, il n’est pas étonnant qu’un commerçant maure de Kaédi ose porter la main sur une femme noire qui pourrait être sa mère, juste à la suite d’une altercation bénigne. Ce n’est pas étonnant, non plus que, conduit au commissariat après une plainte de la victime, le commissaire relâche le Beïdane quelques minutes après en classant le dossier sans suite. Enfin, la réaction des jeunes de Kaédi qui, dans un mouvement de ras-le bol se sont mis à tabasser les Beïdanes à leur portée, peut paraitre disproportionnée, mais exprime le désespoir d’un peuple soumis à l’oppression multiforme sans aucune possibilité de recourt. Malheureusement le Président Mohamed ould Abdel Aziz semble croire que les maux de la Mauritanie se résument à deux : la pauvreté et la corruption. Je ne nie pas que ces deux problèmes soient d’une grande importance. L’objectivité scientifique voudrait d’ailleurs que l’on reconnaisse que le président actuel capitalise de réels acquis dans la lutte contre la pauvreté et la gabegie. Mais là où il commet une erreur monumentale, c’est dans sa négligence du crucial problème de la cohabitation. Il doit savoir que plus que la lutte contre les voleurs de la république et la nourriture basique, la Mauritanie a plus que jamais besoin de se retrouver avec elle-même, de discuter (débat national) pour s’entendre, non pas sur tout, mais sur l’essentiel : l’institution d’une citoyenneté mauritanienne non raciste et non esclavagiste. Je souhaite que le Président Aziz et son gouvernement se rendent vite compte de l’impératif de ce débat national, autrement, je crois que dans un avenir proche, ils le découvriront mais à leur dépend ; j’espère que ce jour là, il ne sera pas trop tard pour la Mauritanie…
Mamadou
Kalidou BA
[1] Je mets entre guillemets le terme « tentative » parce qu’il est impropre pour désigner une simple intention et non pas un acte. Cette différence est de taille tant dans le droit pénal musulman que dans le droit pénal occidental. [2] L’honnêteté intellectuelle nous oblige à lever l’équivoque sur l’emploi des termes « Nation mauritanienne ». Cet emploi est purement démagogique car dans les faits la « Nation mauritanienne » au sens politique est plus un projet qu’un fait accompli. En toute objectivité la Mauritanie est composée de cinq nations au sens anthropologique du moins… |
Réaction
Un résumé sur l’esclavage par Delouyle
Pour ce qui est de l’esclavage et du racisme en Mauritanie. Le texte de Monsieur Ba est le signe d’une souffrance réelle, une souffrance quotidiennement vécue par des milliers de Mauritaniens d’origine négro-africaine (de souche Harratins et d’autres ethnies). Ce texte démontre la persistance, évidente, en Mauritanie, d’une forme de séparation, une sorte de mur culturel et sociétal entre les différentes ethnies qui composent ce pays auquel le colonisateur Français a donné le nom de Mauritanie, en souvenir de la Mauritanie antique qui couvrait l’actuelle Tunisie et l’Algérie orientale.
Figure 1 : Jeunes esclaves chaînes au cou et leur geôlier fusil sur l’épaule.
Les principales victimes de « cet apartheid » sont, incontestablement, les esclaves et les Harratins qui sont, depuis des siècles, réduits à des objets ou au mieux sont considérés comme des sous-hommes. L’esclavage est la pire pratique, la plus criminelle, que l’homme ait inventée. Les écrits les plus anciens qui nous soient parvenus relatent l’existence de sociétés et même de civilisations essentiellement esclavagistes depuis la haute antiquité. Par exemple, le code de Haammurabi (1792 avant J. -C.) regroupait un ensemble de lois dont plusieurs portaient sur les esclaves en tant que biens ou « objets » qui pouvaient être vendus, cédés, reçus en héritage ou acquis en réparation d’une dette ou d’un crime. La persistance de l’esclavage en Mauritanie tient essentiellement à deux facteurs. D’abord, à l’instar de tous les pays africains, il s’agit d’un pays très jeune qui n’est pas encore totalement sorti d’un mode de vie antique, dans un espace géographique dans lequel l’esclavage a probablement toujours existé. Il y a aussi le fait que cette situation particulière rend l’émancipation des individus (« maîtres » et « esclaves ») très lente.
Figure 2 : Jeunes esclaves cordes au cou et chaînes aux pieds et leur geôlier musulman, à gauche en retrait. Par ailleurs, dans cette partie de l’Afrique, l’esclavage fut, pendant des siècles, l’objet d’un commerce des plus inhumains. Les Arabo-berbères de la Mauritanie actuelle y ont évidemment participé. Mais ils ne sont pas les seuls. Ce qui ne les excuse point ! Les négriers Bretons et les rois musulmans Mandingue et Toucouleur (qui ont été, à l’apogée de leurs pouvoirs, plus riches et plus puissants que n’importe quel émir arabo-berbère de la Mauritanie ancienne ou actuelle et même de toute l’Afrique du Nord) y ont joué un rôle de premier plan, durant toute la durée de cette tragédie. Les premiers ont convoyé des bateaux entiers remplis, à fond les cales, d’esclaves noirs vers les Amériques, les Antilles et les Caraïbes et les seconds en furent les principaux fournisseurs en Afrique de l’Ouest bien avant même la traite transatlantique.
Figure 3 : principales routes du commerce d’esclaves noirs au Moyen âge
Avant que l’homme Blanc ne pénètre en profondeur en Afrique de l’Ouest, un témoin incontournable, le premier Blanc a avoir parcouru une grande partie de cette Afrique, à pieds, René Caillé, est un témoin oculaire, qui rapporte, dans ses mémoires, le cas d’esclaves noirs vendus aux caravaniers maures par les rois de Ségou sur les marchés de Tombouctou et de Djenné pour être acheminés vers l’Afrique du Nord à travers le désert du Sahara. René Caillé décrit avec force détails les châtiments cruels que subissaient les malheureux esclaves par le chef de la caravane avec laquelle il voyageait vers le Maroc. Selon René Caillé, il s’agissait d’un homme de la tribu des Tajekant, la tribu de l’actuel Premier ministre de Mauritanie. Les esclaves étaient revendus par les caravaniers Maures sur le marché de Goulimine (alors frontière entre le monde maure et le monde berbère) en bordure du Sahara aux Berbères Marocains. Nul part ailleurs, en Mauritanie, René Caillé, qui a séjourné longtemps dans le Trarza (région qui regroupe le plus grand nombre de Harratins et d’esclaves en Mauritanie et qui est aussi la première à avoir noué des contacts avec les Européens), ne relate de faits semblables. René Caillé décrit cependant les mauvais traitements que subissaient des esclaves noirs, dans les campements Maures Trarza où il avait été accueilli pour apprendre l’arabe et quelques rudiments de l’Islam. Mais il n’évoque aucun cas de vente d’esclave ni aucun marché où étaient vendus des esclaves noirs. On peut donc penser que les pistes caravanières qui reliaient Tombouctou à Goulimine, Alger et le Caire ont acheminé, pendant des siècles, le plus grand nombre d’individus noirs victimes du commerce criminel, transsaharien, d’esclaves noirs.
Et il est évident que les razzias menées par les cavaliers arabo-berbères en Afrique noire ont contribué à cette pratique criminelle. Mais leur méfait reste très inférieur, par son ampleur, comparé à ce qui a été un commerce industriel d’esclaves entrepris par les négriers européens. Les nombreuses îles et pays, peuplées de populations noires issues de ce commerce infâme l’attestent mieux que tous les livres d’histoires sur ce sujet. Mais que sont devenus les noirs vendus en esclaves dans « la traite transsaharienne » ? Beaucoup ont regagné l’Orient par le port de Tanger au Maroc et ceux des villes de Tunis, d’Alger, de Tripoli et le Caire qui feront, après le Moyen âge, partie de l’Empire Ottoman. Avec l’avènement de l’empire Ottoman la traite a continué, et la plupart des esclaves terminaient leur triste périple à Constantinople (Istanbul) avant d’être envoyés pour les travaux forcés dans tout l’empire Ottoman. Et on trouve encore, aujourd’hui, la trace, notamment en Irak où il existe une communauté de descendants d’esclaves africains qui subit les mêmes discriminations qui persistent en Mauritanie ou aux États-Unis d’Amérique et encore en France (qui sont pourtant de grandes démocraties où l’esclavage a été réellement aboli mais où les discriminations contre l’homme noir persistent):
http://articles.latimes.com/2004/jan/17/world/fg-blackiraqis17
http://www.nytimes.com/2005/09/21/world/europe/21iht-france.html?_r=0
http://www.time.com/time/world/article/0,8599,1574817,00.html
La plupart des esclaves noirs venus d’Afrique de l’Ouest en Orient ont disparu, car il s’agissait selon toute vraisemblance d’une population essentiellement mâle et fort probablement « la castration était largement pratiquée pour éviter leur reproduction ». Cependant, une minorité d’esclaves noirs passés par le Maroc, à destination de l’Orient, y a fait souche. Les Gnawas, par exemple, en sont les descendants. D’autres ont été intégrés dans les armées et les cours des rois ou chefs religieux d’Afrique du Nord et d’Orient. Et on en trouve même des descendants qui sont princes en Arabie Saoudite, au Koweït et dans les Émirats Arabes-Unis. Mais, partout où elle persiste encore, la discrimination contre les noirs, une discrimination qui n’est pas sans lien avec l’esclavage, relève plus aujourd’hui d’un problème sociétal que d’un problème de racisme pur, érigé en politique d’État ou édicté par une religion.
Par exemple, la France et les États-Unis d’Amérique sont de grandes nations qui ont connu des révolutions, qui ont lutté pour la liberté de leurs citoyens, qui ont proclamé et qui défendent de grands principes, qui ont abrité et qui abritent, depuis des siècles, de grands philosophes, écrivains et intellectuels humanistes, antiesclavagistes, antiracistes qui se sont élevés contre toutes les formes de xénophobie et de racisme. Mais les discriminations, en particulier, contre la personne noire y sont encore et toujours criantes. Pourtant ni la France ni les États-Unis d’Amérique ne sont des États racistes. Mais au contraire de la Mauritanie, les pouvoirs y reconnaissent l’existence de ces discriminations, punissables par ailleurs par les lois de ces grandes nations, mais toujours persistantes, notamment dans l’accès aux hautes fonctions, autant dans les institutions publiques que privées.
Figure 4 : châtiment public d’un esclave en Amérique du Nord
Et pour abolir l’esclave, les États-Unis d’Amérique ont connu une guerre civile qui a été aussi la guerre la plus meurtrière, en ce qui les concerne, en vies humaines (plus que chacune des deux guerres mondiales, plus que la guerre du Vietnam) ! Mais les séquelles de l’esclavage sont encore bien visibles dans cette grande démocratie. « Je suis noir et je n’aime pas le manioc », crie aux Français un Camerounais « naturalisé français », qui aspire ainsi à être reconnu comme français à part entière.
Figure 5 : un négrier sciant à bord les fers d’un esclave
Figure 6 : esclaves en attente de départ aux Amériques avec leurs geôliers musulmans
Comme s’il suffisait d’opposer sa « négritude » à cette plante nourricière originaire des Amériques et largement consommée en Afrique noire pour devenir Français à part entière ! Non, Monsieur, hélas, cela ne marche pas ainsi ! Pour lutter contre toutes les formes de discriminations il faut être plus sérieux. Il s’agit là d’un effort, qui doit être universel, collectif et continu. Et certainement un effort de longue haleine :
http://societieswithoutborders.files.wordpress.com/2011/12/parker2011final.pdf
La Mauritanie quant à elle est très insignifiante. Elle sort à peine de l’antiquité. Hier encore, il y a moins d’un siècle, on y vivait partout sous la tente, comme aux temps bibliques d’Abraham, avec comme seuls biens son troupeau de chèvres, de moutons, de dromadaires ou de vaches et quelques palmiers et hélas ses esclaves noirs avec leurs petites tentes d’esclaves, faites de milles et une pièces de chiffons rapiécées, dressées devant les pavillons imposants, en laine de moutons noirs, de leurs maîtres et qui ne choquaient même pas le colonisateur français lorsqu’il venait prélever l’impôt chez les indigènes ! Et, la Mauritanie n’a jamais compté, dans sa petite histoire, un seul philosophe, ni aucun écrivain, aucun Voltaire, aucun Zola, digne de cette appellation pour s’élever contre cette pratique abominable.
Figure 7 : Un panneau publicitaire annonçant l’arrivage prochain d’un négrier chargé de 250 esclaves (en bonne santé)
Le racisme existe bel et bien en Mauritanie et il y est porté par des extrémistes de tous bords, aussi bien Beïdanes que Négro-africains. Et il y est même enraciné bien avant que la Mauritanie ait vu le jour, le 28 novembre 1960. Et ce racisme tire sa source exclusivement de l’esclavage. Des rois noirs musulmans avaient eu dans leurs harems des épouses mauresques. Et un émir maure avait eu comme épouse une princesse noire dont les descendants sont reconnaissables en Mauritanie par la couleur noire de leur peau. Tous ces émirs maures et tous les rois noirs d’Afrique de l’Ouest, Toucouleur ou Mandingues notamment, musulmans ou animistes ont été tous esclavagistes ! Et les victimes en sont et ont été massivement et exclusivement noires ! Hélas, l’esclavage en Mauritanie n’est pas seulement une pratique qui n’existe que dans la communauté mauresque. Dans la région du fleuve, dans le Gorgol, dans le Guidimaka et dans l’Assaba où Deyloule a vécu jusqu’à l’âge de 16 ans, il existe aussi des descendants d’esclaves noirs, aux noms de famille bien identifiés, ayant été réduits à la servitude par leurs frères noirs et qui subissent eux aussi cette discrimination.
Figure 8 : la traite transatlantique (et ses chiffres tragiques)
L’esclavage en Mauritanie est un fléau national.
Enfin, ce n’est pas en affirmant que telle ou telle communauté est minoritaire (ce du reste aucune statistique fiable ne confirme qui contredirait les écrits du colonisateur qui a nommé ce pays aussi celui des Beïdanes qui en comptait près d’un million à l’indépendance) que l’on va résoudre le problème de l’esclavage et du racisme en Mauritanie. Dresser, par ce biais, les communautés les unes contres les autres ne va jamais résoudre ces problèmes sociétaux qui concernent le destin de groupes humains devenus, par le hasard des choses, citoyens d’une même nation en devenir. La diversité du peuple mauritanien constitue, sans aucun doute, sa principale richesse. Il faut sauver cette diversité. Mais il est à craindre que le chemin soit long et semé d’embûches étant donné la médiocrité des militaires qui gouvernent le pays depuis 1978.
Pour ce qui est des langues et de l’hymne nationaux. Parlons-en. Le breton, le castillan, le basque, le poitevin, les créoles, le catalan, le languedocien, l’alsacien, le corse, le tahitien, l’occitan, le français, etc. sont les langues parlées et écrites en France. Et si certaines sont reconnues localement, une et une seule, le Français, est la langue officielle du pays. Et quelques-unes, comme par exemple les langues amérindiennes de Guyane, sont même en voie, très avancée, d’extinction. Et l’on constate que la Marseillaise n’est pas déclinée dans toutes ces langues pour la bonne raison qu’elle a été écrite par Rouget de L’Isle en Français. Il convient donc, pour des raisons de bon sens, d’opter pour une et une seule langue officielle, ne serait-ce que pour éviter la cacophonie. Faut-il choisir le Français, l’Arabe ou une autre langue ? Cette question a été tranchée par la première constitution de la Mauritanie, dès son indépendance. Mais une constitution peut être modifiée, de préférence démocratiquement. En revanche, il est inadmissible, qu’en Mauritanie, toutes les langues nationales n’aient pas leur place dans l’espace médiatique et culturel. Du temps de Moktar Ould Daddah et même après le coup d’état du 10 juillet 1978, le journal radiodiffusé était décliné dans les principales langues nationales : français, arabe, halpoular, soninké. Chacun doit être libre d’avoir sa radio ou sa télévision privée dans sa langue maternelle.
Pour ce qui est du nom de l’équipe nationale de foot-ball de Mauritanie. C’est un grand honneur pour cette équipe de s’appeler « Al-Murabittin ». En effet, dans les armées Almoravides, les soldats noirs étaient très nombreux. La garde personnelle de Youssouf Ibn Tachefin comptait pas moins de 7000 hommes noirs. Donc s’il y est un élément de l’histoire susceptible d’être fédérateurs des Mauritaniens c’est bien cette appellation. Sauf que les Almoravides avaient gagné des batailles décisives. La première fut contre le roi de L éon et de Castille, Alphonse VI et ses alliés Francs aux portes de Saragosse. Les archers et fantassins noirs armées de lances y avaient joué un rôle de premier plan. Malheureusement, il est vrai que l’équipe football mauritanienne n’a jamais, quant à elle, gagné aucun trophée ! En conclusion. Le premier mal que les Mauritaniens devront combattre c’est l’ignorance. Les Harratins et les esclaves ne s’émanciperont que par eux-mêmes. Il revient à leur leaders de collecter des savoirs et des fonds, de par le monde, pour bâtir leurs propres écoles, inventer leur propre destin, s’émanciper et ainsi damer le pion à tous les descendants de ceux qui avaient réduits en esclaves leurs ancêtres. Car en effet, la liberté ne se donne pas. Elle s’acquiert, soit par les armes soit par le savoir. Deyloule est partisan, tant que faire se peut, de la deuxième méthode qui doit de toute façon primer sur la première et nécessairement la précéder. Et bien sûr si cela n’est pas possible pacifiquement, il y aura des révoltes et des révolutions sanglantes. C’est inévitable !
Monsieur Obama, un métis, né d’un noir africain, Kenyan, dont les ancêtres n’avaient jamais posé le pied aux États-Unis d’Amérique et d’une blanche américaine du Kansas, de souche irlandaise, n’a pas gagné deux élections présidentielles successives, dans ce qu’est la première puissance économique et militaire du monde, parce qu’il est noir ou parce qu’il est soutenu par l’un des deux plus puissants partis politiques des États-Unis d’Amérique, mais essentiellement et d’abord par son intelligence supérieure. Une intelligence qui crève les yeux ! Il suffit d’entendre l’homme parlait devant la foule lors de la proclamation de sa première victoire contre son adversaire républicain, le quatre novembre 2008. Quelle facilté ! Quel brio ! Quelle force morale et intellectuelle ! Son intelligence a fait de lui l'un des plus brillants étudiants de la très prestigieuse université de Harvard ! Un de ses professeurs, une femme, dit à son père dont elle avait hérité la chaire, la plus prestigieuse de cette université, qu’Obama est le plus brillant étudiant qu’elle ait jamais eu ! Mais le président Obama s’est aussi avéré être un très grand homme politique, à l’instar des plus grands présidents des États-Unis d’Amérique. Monsieur Obama est et demeurera un modèle à suivre pour toutes les classes opprimées, où qu’elles se trouvent, dans l’univers habité par l’homme : http://www.youtube.com/watch?v=3K8GWCl7P7U.
Source :
Deyloule-Mail : Deyloule@yahoo.fr |
Ces
graves menaces d’instabilité qui, à l’instar du Mali,
Introduction Le développement des tristes événements, ces derniers mois au Mali, et surtout les lectures qui en sont faites par de nombreux analystes m’ont conduit à me poser un certain nombre d’interrogations que je juge pertinentes. En effet, c’est sans aucun doute l’écrasante majorité des communicateurs qui semble stipuler que le « triomphe » des mouvements islamistes (AQMI, Ansar Eddine) et la victoire de la rébellion touareg (MNLA) qui ont abouti à la proclamation de l’indépendance du Nord-Mali sous l’appellation de l’Etat de l’Azawad ont été possibles à cause du laxisme du régime d’Amadou Toumani Touré. Tout en reconnaissant que la chute du régime de Moamar El Khaddafi engendrée par l’intervention militaire de l’OTAN, sous l’égide des Nations Unies, a été l’une des causes « lointaines » de la situation au Mali, les mêmes commentateurs ajoutent que ces seules causes ne sont pas suffisantes, puisqu’au Niger, en Mauritanie et en Algérie, les mêmes effets qu’au Mali (rébellion), n’ont pas été enregistrés. Ainsi, à en croire ces analystes, si le Mali s’est retrouvé dans cette situation, c’est uniquement de la faute des Maliens, en l’occurrence de l’ancien pouvoir d’Amadou Toumani Touré ; que les risques pour les pays limitrophes sont minimes. De ce point de vue, la Mauritanie – puisqu’elle combat activement contre le terrorisme – ne peut en aucune manière se retrouver dans une situation similaire. Mais ces allégations sont-elles rationnellement fondées ? Le caractère offensif et apparemment équipé et structuré de l’armée mauritanienne est-il une garantie suffisante de prévention contre toute instabilité ? Rien n’est moins sûr lorsqu’on évalue objectivement un certain nombre de risques. 1. L’état des lieux La situation de crise multidimensionnelle que vit la Mauritanie d’aujourd’hui est censée interpeller, non seulement les Mauritaniens, mais aussi toutes les grandes puissances soucieuses de la paix et de la stabilité du monde. En effet, tant par sa position géographique que par sa configuration démographique, la Mauritanie occupe naturellement une place stratégique dans la géopolitique de la sous-région ouest-africaine. Vaste zone tampon entre l’Afrique noire (Sénégal, Mali) et le Maghreb arabe (Algérie, Maroc), le pays s’étend sur 1 039 000 km carré dont plus des deux tiers sont désertiques. Il s’agit d’une étendue de sable réfractaire à l’épanouissement de toute vie humaine, de sorte que la densité démographique y avoisine un (1) à deux (2) habitants au km carré. C’est pourquoi cette grande partie du territoire, peu fréquentée, est privilégiée par des groupes de malfaiteurs de tous genres (extrémistes islamistes, cartels de drogue) qui ne ménagent aucun effort pour en faire leur bastion. Quand on sait que cette bande saharienne du territoire mauritanien est naturellement prolongée d’une part dans le territoire malien, et d’autre part jusqu’en Algérie, il devient alors plus aisé d’imaginer l’ampleur des enjeux en rapport avec la maîtrise de ces espaces immenses 1.1. Facteurs exogènes Il pèse sur la Mauritanie deux menaces extérieures d’instabilités graves : la présence au sein du territoire malien de 5000 à 10 000 réfugiés négro-mauritaniens qui se sont inscrits dans les liste du HCR pour rentrer dans leur pays et que les autorités mauritaniennes actuelles s’évertuent à nier alors même que Sidi Ould Cheikh Abdallahi (renversé par le putsch du 06 Août 2009) avait reconnu officiellement l’existence de ces réfugiers. Rappelons que la présence de ces réfugiers au Mali date de 1989 où le régime anti-noir de Mouawiya ould Sid’Ahmed Taya (actuellement réfugié au Qatar) a déporté et chassé plus de 120 000 Mauritaniens de race négro-africaine avant de s’adonner, à l’encontre de la même communauté, à une véritable tentative de génocide. Grâce au Président Sidi, une bonne partie de ces anciens déportés au Sénégal sont rentré à la suite de l’accord tripartite signé entre l’Etat du Sénégal, le HCR et la Mauritanie en 2008. L’opération de retour qui devrait également concerner les 10 000 réfugiers du Mali, à été brutalement interrompue par le Président Aziz qui ne l’a jamais souhaitée en réalité. Aussi, ces réfugiers qui désespèrent de rentrer chez eux seraient bien tentés de prendre des armes pour reconquérir leurs terres et leur citoyenneté mauritanienne. Ils sont d’ailleurs encouragés en cela par la situation d’anomie dans laquelle se trouve leur pays d’accueil (absence d’autorité de l’Etat au Mali) et surtout la réussite de la rébellion touareg. Pourquoi pas nous, pourraient-ils se dire ? La deuxième menace est sans aucun doute la plus importante. Il s’agit du danger que constitue Al Qayda au Maghreb Islamique (AQMI). En effet, depuis 2007, un noyau d’extrémistes salafistes originaires pour l’essentiel d’Algérie, précédemment appelés Groupe Salafiste pour la Prédication et le Combat (GSPC) a prêté allégeance à l’internationale Alqayda pour devenir sa section opérante au Maghreb d’où leur nouvelle dénomination d’AQMI. Leur première action d’éclat contre la Mauritanie a été l’assassinat de touristes français, en 2007, aux alentours d’Aleg (ville située à 250 km à l’Est de Nouakchott, la capitale). Depuis, cette organisation terroriste s’est renforcée à la foi en moyens humains (recrutement dans les banlieues de Nouakchott, d’Alger…) qu’en équipements militaires (véhicules Tout-terrain neufs, fusils mitrailleurs, lance-roquettes…) grâce aux fonds perçus ça et là comme rançons de ressortissants européens souvent pris en otage. L’armée mauritanienne fait ce qu’elle peut pour anéantir cette organisation, mais la grande mobilité de l’ennemi sur un territoire grand comme presque deux fois la France rend sa tâche presque impossible, eu égard à la proportionnalité des forces en présence. Aujourd’hui encore AQMI reste une menace sérieuse, tant directe (possibilité d’attentats, prise en otage de ressortissant occidentaux) qu’indirects (instabilité dans la sous-région) pour la Mauritanie. 1.2. Facteurs endogènes Il existe au moins trois principaux facteurs internes qui, même pris séparément, sont chacun, suffisants pour plonger la Mauritanie dans une instabilité sans précédent dont elle aura du mal à se relever. Ces facteurs – que nous allons citer par ordre de dangerosité – sont le crucial problème de la cohabitation raciale et ethnique, la crise du jeu démocratique, et enfin la position et le poids de l’armée nationale dans les institutions de la république. - La cohabitation raciale et ethnique Le non traitement du problème de la cohabitation constitue de loin la plus grande menace historique interne que traverse la Mauritanie. En effet, depuis 1960, année de l’accession du pays à la souveraineté internationale, la Mauritanie est minée par l’incapacité dont firent preuve les différents régimes qui se sont suivis à sa tête quant à se positionner à équidistance par rapport à ses composantes nationales. Car de par sa configuration démographique, la Mauritanie est composée d’une majorité raciale noire (Hratines[1], (autour de 40%) Peuls, Soninké et Wolof (autour de 40%, communément appelés Négro-africains) et d’une minorité arabo-berbère (autour de 20%)[2]. Toutes les communautés noires sont confrontées à une discrimination qui se traduit par un déni d’humanité pour une partie des Hratines, encore aujourd’hui soumis à l’esclavage, et un déni de citoyenneté pour les Peuls, les Soninkés, les Wolofs et l’autre partie des Hratines libérée du joug esclavagiste. Ces très graves discriminations (Racisme et esclavage) se sont traduites dans l’histoire lointaine et récente de la Mauritanie par des soubresauts qui, à chaque fois, ont creusé davantage l’écart entre les composantes nationales mauritaniennes. En 1986, le Manifeste du Négro-mauritanien opprimé publié par les Forces de Libération Africaines de Mauritanie (FLAM)[3] aboutit à l’arrestation et l’incarcération de toute l’élite progressiste négro-africaine ; en 1987 une tentative de putsch attribuée à des officiers négro-africains se termine par l’exécution de trois d’entre eux (ce fut la seule fois où des Mauritaniens sont tués pour une tentative de coup d’Etat, sans doute parce qu’ils étaient noirs). En 1989, le pouvoir mauritanien de l’époque (dominées par le courant Nassériste et Batthiste) entreprend d’amputer à la Mauritanie sa composante noire d’abord en déportant et chassant plus de 120 000 Négro-africains, avant de s’adonner à l’extermination de ceux qui sont restés. La dernière grande opération sanguinaire a été l’exécution de 500 officiers et sous-officiers noirs en 1991 avec une pique jamais égalée : la pendaison de 28 militaires d’entre eux, la veille du 28 novembre 1960 pour « célébrer funestement » l’indépendance de la Mauritanie. Plus récemment, la lutte négro-africaine, après une longue période « d’hibernation », à l’intérieur du pays, a connu une recrudescence aiguillonnée par quelques discours racistes prononcé par les membres de l’actuel gouvernement sur le poids et l’importance accordés aux langues mauritaniennes mais encore et surtout par les débuts d’exclusion de cette même communauté dans les enrôlements sensés sécuriser par la biométrie l’état civil mauritanien. Constatant l’orientation exclusionniste que prenaient ces enrôlements (rejets massifs de la composante négro-africaine) plusieurs organisations à caractère politique ou non se sont regroupées au sein d’un collectif dénommé « Touche pas à ma Nationalité »[4] entamant ainsi une série de manifestations pour exiger l’enrôlement de tous. Par ailleurs, le même collectif réclame également l’introduction dans le système éducatif des langues poular, wolof et soninké dans le système éducatif. Parallèlement à la lutte des Négro-africains (Peuls, Soninkés et Wolofs) pour la reconquête totale de leur citoyenneté, c’est-à-dire de l’égalité avec les Arabo-berbères, le combat des Hratines contre le déni d’humanité a été peut-être moins sanglant, mais certainement pas moins douloureux. Les militants de SOS Esclave[5] et plus récemment de l’Initiative pour la Résurgence du mouvement Abolitionniste (IRA)[6] ont souvent séjourné en prison, subi des tortures et humiliations de toutes sorte à l’instar de leurs frères négro-africains. Aussi, depuis 2010, il est rare qu’un mois se passe sans que l’actualité ne signale des heurts entre les militants – toujours plus nombreux – antiracistes et anti-esclavagistes et les forces de l’ordre dans la capitale mauritanienne. Il suffit d’ailleurs de se promener dans Nouakchott pour se rendre compte, par l’omniprésence des forces de l’ordre, que le pays est sous haute tension. - La crise dans le jeu démocratique. Comme si la situation n’était pas suffisamment compliquée avec les graves problèmes de cohabitation, la crise du jeu démocratique vient s’y ajouter accroissant ainsi les risques d’instabilité. Après l’échec des négociations entre la majorité présidentielle et une partie de l’opposition démocratique (RFD, PLEJ, UFP …), cette dernière ne cesse de faire monter la tension en invitant à ses partisans à renverser le pouvoir par une descente massive et permanente dans la rue, à l’instar que ce qui s’est passé dans les pays arabes. La dernière sortie de l’opposition aurait réuni près de 30 000 personnes, du jamais vue auparavant en Mauritanie. En réalité la stratégie de l’opposition semble être d’harceller le régime d’Aziz pour le pousser à commettre des erreurs et justifier ainsi l’exécution d’un nouveau coup d’Etat par une partie de l’armée. N’a-t-on pas entendu un certain nombre de leaders de l’opposition appeler ouvertement à un putsch contre Aziz ? En outre c’est un secret de polichinelle que de savoir qu’Ely Mohamed Vall, le tombeur de Maouya devenu opposant d’Aziz, compte toujours des amis haut placés dans l’appareil sécuritaire de l’Etat. Tout porte à croire que cette tension ira en s’amplifiant puisque, ni cette opposition, ni le pouvoir ne semblent vouloir laisser du lest. Il ne serait même pas exagéré d’affirmer que par les temps qui courent, la Mauritanie n’est pas à l’abri d’un coup d’Etat imminent. La situation délétère que l’on connait dans la capitale ces dernières semaines, est très analogue à celle qui prévalait en 2009 lorsque Mohamed ould Abdel Aziz se préparait à faire son putsch contre Sidi ould Cheikh Abdallahi. - La position de l’Armée. Si face à la menace du terrorisme islamiste, l’institution des Forces armées et de sécurité constitue une grande partie de la solution, il n’en demeure pas moins qu’au point de vue de l’instauration et de la consolidation de la démocratie, elle reste un frein sérieux. En effet, depuis la prise du pouvoir par l’armée le 14 juillet 1979, elle n’a en réalité jamais consenti à retourner définitivement dans ses casernes. Les militaires tiennent soient à gouverner directement (régimes de Khouna ould Haydalla, celui de Maouya ould Taya, la transition d’Ely ould Mohamed Vall et enfin celui de Mohamed ould Abdel Aziz) soit indirectement Et lorsque le pouvoir civil élu démocratiquement s’exerce souverainement, refusant ainsi d’être une marionnette entre leurs mains, l’élite militaire n’hésite pas à mettre un terme au jeu démocratique en orchestrant – comme à ses habitudes – par coup d’Etat. Ce fut exactement ce qui s’est passé en Août 2008 lorsque l’Armée, avec à sa tête l’actuel locataire du palais gris, déchut Sidi ould Cheikh Abdallahi, le seul Président démocratiquement élu et qui comprit réellement les enjeux vitaux du problème de la cohabitation intercommunautaire en Mauritanie. Les coups d’Etat étant devenus une tradition dans ce pays, il n’est pas étonnant que la moindre querelle dans la hiérarchie de l’armée se traduise par un nouveau putsch. C’est d’ailleurs ce qu’à compris l’opposition actuelle qui fait tout pour, d’une part créer une situation d’instabilité pour justifier un coup d’Etat et d’autre part inciter insidieusement une partie de l’armée à renverser le pouvoir en place. Conclusion On voit bien au terme de notre analyse que la Mauritanie est bien plus en danger que ne semblent s’en apercevoir bien des observateurs. Aussi, en ce moment, la pertinente question est celle de savoir si l’actuel Président Mohamed ould Abdel Aziz est suffisamment outillé pour parer aux graves dangers qui menacent organiquement la sécurité du pays. Difficile de répondre par une simple affirmative ou négative à cette interrogation. Toutefois, en considérant, d’une part les actes posés ça et là par l’homme, son mode de gouvernance caractérisé par un exercice à la fois absolutiste et individuel du pouvoir, il est permis de douter raisonnablement sur ses capacités à sauver la Mauritanie des grandes tensions, en tout cas de l’instabilité institutionnelle du moins de l’implosion Parmi les éléments qui corroborent à cette inquiétude, on peut citer d’abord son incapacité à faire l’égalité entre les composantes raciales et ethniques et à combattre efficacement l’esclavage qui se traduit par l’identification de plus en plus partagée des communautés hratines, peules, soninkés et wolofs à un destin commun de race opprimée, malgré les différences de langues et de cultures. Ensuite son incapacité à promouvoir un dialogue inclusif pour s’entendre avec toute l’opposition sur le minimum, et réussir ainsi à ramener à l’intérieur le calme et la sérénité nécessaires pour pouvoir de consacrer plus efficacement à la lutte contre le danger extérieur représenté par AQMI, Ansar eddine et autres menaces aux frontières. C’est pourquoi, si la communauté internationale (notamment la France et les USA) qui a déjà exprimé ses vives inquiétudes quant à la situation qui prévaut au Mali, a intérêt à ce que l’instabilité ne s’étende pas à la Mauritanie, elle doit alors d’ores et déjà user de toute son influence pour que le gouvernement de Mohamed ould Abdel Aziz prennent les devants et ouvre un débat national tant sur le problème de la cohabitation que sur celui de la refondation effective de la démocratie. Il semble que plutôt que d’attendre l’éclatement des conflits pour jouer aux pompiers, elle gagnerait à œuvrer dans le sens de la prévention de ces conflits. Dr
Mamadou Kalidou BA
[1] Les Hratines sont racialement noirs, linguistiquement hassanophones (langue arabo-berbère) et culturellement hybrides (sédiment culturel négro-africain et apparence arabo-berbère. Cette communauté comporte les Esclaves et anciens esclaves. [2] Jusqu’au jour d’aujourd’hui, il n’existe pas de statistiques basées sur un recensement démographique précis. Les chiffre que l’on retrouve à l’Office National des Statistique chiffrant notamment les Négro-africains à 16% correspondent à une estimation faite sous l’ère de Maouya ould Taya dont le régime est connu pour son extrémisme anti-négro-africain. [3] Dont le leader charismatique est Samba Thiam, aujourd’hui encore réfugié aux USA avec de nombreux militant de cette organisation [4]
Parmi les Organisations membres, on peut citer : l’Initiative
Mauritanienne pour l’Egalité et la Justice ‘IMEJ), Fede jokere
endam, (groupe pour la bienfaisance et la concorde) Conscience
Citoyenne (CC) et des Individualités venant de plusieurs partis
politiques. [5] Toujours dirigé par l’infatigable Boubacar ould Messaoud ; Messaoud oul Boulkheir, l’actuel Président de l’Assemblée nationale aussi a été membre fondateur de SOS-Esclave et reste toujours militant de cette cause. [6] Organisation dirigée par Biram Abeid ould Dah, en ce moment même en prison pour autodafé d’ouvrages d’interprétation islamique qui cautionnent l’esclavage. |
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