ARTICLE 513 :
Nouakchott : des dizaines de personnes dénoncent la mort de Souadou et réclament l’ouverture d’une enquête
Vidéo : http://www.youtube.com/watch?v=B5W-RqW19EA&feature=youtu.be
Condamnation
de Mint Bakar Vall : ...qu’elles vont continuer jusqu’à ce qu’il y’ait un procès pour esclavage.
Dégageant d’un revers de la main ces chefs
d’accusation, Boubacar Messaoud a
dit que si Mint Bakar Vall
"a été arrêtée et jugée, c’est
par volonté d’équilibrage".
Presque 20 ans après… : Le règlement du passif humanitaire vu par Boubacar Messaoud
Le rénovateur quotidien
Mais, depuis l’arrivée de Mohamed Ould Abdel Aziz, au pouvoir, cet optimisme est vite retombé comme un soufflet. Le Haut Conseil d’Etat (HCE) n’a pas montré, comme le Conseil Militaire pour la Justice et la Démocratie (CMJD) à l’époque, une réelle disponibilité et un vif intérêt à résoudre cette épineuse question. Tous les pouvoirs se succèdent mais jamais aucun d’entre eux, à part celui de Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi, n’a osé prendre à bras-le-corps ce dossier. Ce qui fait dire à M. Boubacar Messaoud, président de S.O.S. Esclaves, que les pouvoirs publics veulent gagner du temps dans le règlement du passif humanitaire. "C’est un problème que les autorités ne se résolvent pas à aborder. Elles veulent, par l’usure, obtenir des victimes et des ayants droits un pardon alors qu’en définitive celui-ci ne peut pas être un préalable dans la question du passif humanitaire." Crimes, il y en a bien eu ! Mais, pour le Président de S.O.S. Esclaves, la première étape à franchir dans la résolution de cette question, c’est d’abord qu’on identifie les auteurs et qu’ils reconnaissent leurs crimes. C’est à partir de là seulement qu’on pourra parler d’absolution. "Tant que l’Etat et les autorités ne veulent pas s’engager dans cette voie, on va continuer à tricher et à raconter des histoires à dormir debout", dit-il. Ainsi, donc, pour lui, il appartient de prime abord à l’Etat mauritanien de jeter la lumière sur tous les crimes commis en son nom. Pour y parvenir, il a préconisé la mise sur pied d’une commission nationale indépendante tout en dégagent du revers de la main l’idée d’une commission mixte qui associerait les militaires dans le traitement de ce dossier. Le passif humanitaire est toujours frais dans l’esprit des centaines de milliers de victimes. "Si on ne traite pas cette question, on continuera à penser que ce sont les maures qui ont tué les halpoulars et qu’un jour ou l’autre, peut-être que les halpoulars chercheront également à tuer les maures, prévient Boubacar Messaoud. Ce sera donc un problème qui va continuer de génération en génération même après cent ans ou deux cents ans Par contre, si le passif humanitaire est réglé de manière correcte, on saura d’abord et tout le monde sera obligé d’accepter que ce ne sont pas les maures qui ont tué les négro-africains mais certains criminels identifiables qui doivent assumer leur responsabilité." En outre, Boubacar Messaoud a regretté l’attitude de l’Etat mauritanien qui a refusé jusque-là de s’engager dans cette voie d’identification des criminels."Pendant les Journées Nationales de Concertation sur le retour des déportés et le règlement définitif du passif humanitaire [du 20, 21, 22 novembre 2007, Ndlr], nous avions pensé qu’il y avait une ébauche", se rappelle-t-il. Pendant ces journées, il y eut beaucoup de remous dans les ateliers notamment dans celui du passif humanitaire. Certains militants des droits de l’Homme, dont Boubacar Messaoud, avaient boudé ces journées. A cette époque, on avait proposé dans le cadre du règlement définitif du passif humanitaire la mise sur pied de trois types de commissions : une commission indépendante, une commission mixte et une commission nationale. La deuxième option fut rejetée par la plupart des participants qui y voyaient un certain prolongement de la main de l’armée accusée d’être impliquée dans ce dossier. Sous la présidence de Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi, on était en train de préparer la mise en place de cette commission. Aujourd’hui, Boubacar Messaouad déplore le fait que les Organisations nationales de défense des droits de l’Homme comme le S.O.S. Esclaves ne soient pas impliquées ni consultées dans l’élaboration de cette commission. "Même si aujourd’hui, on en parle, je reste toujours sceptique. Je ne croirais à la résolution du passif humanitaire que lorsque j’entendrai, je verrai une disposition mettant fin aux fonctions des criminels qui sont toujours en activité. Ceux qui ont commis ces crimes n’ont reçus que les honneurs de l’Etat. Je ne vois pas comment on peut me faire croire qu’on va résoudre le passif humanitaire", affirme-t-il. Dans le cadre aussi du règlement du passif humanitaire, certaines organisations de défense des droits de l’Homme sont souvent montées au créneau pour exiger, par le biais et l’appui de la communauté internationale, la mise en place d’un tribunal spécial qui sera chargé de juger les auteurs. N’ayant pas obtenu gain de cause, elles continuent à dénoncer l’inflexibilité de l’Etat mauritanien dans ce dossier et son indifférence totale sur cette question. "Il est clair que les criminels sont connus et identifiés", explique Boubacar Messaouad qui souhaite que ces derniers soient arrêtés et portés devant la justice. Ceux-là, faut-il les juger et par qui ? C’est là où se situe la grande question car une polémique est née autour de cette question relative à la mise en place d’un tribunal international chargé de juger les criminels. Mais, pour Boubacar Messaoud, le cas de la Mauritanie ne nécessite pas autant la mise en place d’un tel tribunal international comme cela a été le cas en Rwanda, au Sierra Léone ou au Libéria et tant d’autres pays qui ont connu des violations massives des droits de l’Homme. "La mise en place d’un tel tribunal pourrait être la conséquence du refus de la classe dirigeante en Mauritanie de s’attaquer à ce problème de manière sérieuse parce que tout simplement on n’a jamais voulu résoudre", souligne-t-il. Pour lui, le problème du passif humanitaire peut être résolu par les mauritaniens. "Si on ne le résout pas, il n’est pas exclu qu’un tribunal international soit installé", prévient-il. "L’installation d’un tribunal international serait quelque de très grave parce que cela veut dire que les choses auront tellement pourri et créer d’autres drames qu’un tel tribunal serait imposé par la communauté international", poursuit-il. Pour certains, la mise en place d’un tel tribunal dépend de la bonne volonté des pouvoirs publics à résoudre la question du passif humanitaire. Et, de l’avis de Boubacar Messaoud, la mise en place d’un tel tribunal serait en quelque sorte une forme de sanction des politiques mauritaniens. "Si cela arrive, c’est parce que ceux qui dirigent le pays n’ont pas pris leur responsabilité et n’ont pas développé, ceux que nous espérons tous, un Etat de droit où les gens sont tous égaux et justiciables", constate-t-il. Pour lui donc, la Mauritanie n’a pas spécifiquement besoin d’un tribunal international pour régler la question du passif humanitaire. "Il suffit de prendre les dispositions nécessaires pour reconnaître et identifier les criminels, reconnaître les droits des victimes, les indemniser et proposer des solutions, engager une politique de réconciliation", énumère-t-il. "Aujourd’hui, les pouvoirs publics veulent qu’on dépasse le problème du passif humanitaire. Mais, qu’est-ce qu’ils proposent aux gens ?", s’interroge Boubacar Messaoud qui considère par ailleurs que le dépassement de ce problème passe inéluctablement par l’instauration d’un Etat de droit. Pour lui, c’est la seule solution de rétablir ceux qui ont été tués pendant "les années de plomb" de manière extrajudiciaire. C’est le premier pallier de l’escalier de la réconciliation à franchir… Babacar Baye Ndiaye |
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