Mauritanie
: l’autre printemps arabe
Mauritanie.
Beaucoup de gens n'ont jamais entendu parler de ce pays, et la
plupart ne seraient probablement pas en mesure de le localiser sur
une carte, même si sa superficie est plus grande que la France et
l'Allemagne réunies. Beaucoup d'Arabes ne savent pas non plus que le
pays est membre de la Ligue arabe.
Même Black Berry ne le reconnaît pas. Son
service de messagerie automatique corrige "Mauritanie" en
"martien" et, compte tenu de l'ignorance du public du pays,
la Mauritanie pourrait aussi bien être sur Mars. Toutefois, cela
pourrait et devrait changer.
Interviewée pour une émission
de télévision récemment, on m'a demandé si la Mauritanie sera le
prochain pays à découvrir le printemps arabe. En fait, elle a tenté
l’expérience depuis Janvier 2011, lorsque Yacoub Ould Dahoud
s’immola mortellement par le feu devant le palais présidentiel.
Des manifestations ont eu lieu à travers la Mauritanie
depuis, stimulées par les mêmes facteurs que dans d'autres Etats
arabes : économiques, privation des droits politiques et sociaux.
Mais contrairement à celles de la Tunisie, de l’Egypte, de la
Libye, du Bahreïn, du Yémen, de la Syrie et d’ailleurs dans la
région, les manifestations en Mauritanie ont à peine attiré
l’attention des medias internationaux. Cela a conduit Al-Jazira
à les décrire comme le «soulèvement négligé ». L'usage
d'Internet étant très faible dans le pays - moins de 2% des ménages
y ont accès- il a été difficile pour les Mauritaniens de faire
connaitre leurs points de vue, témoignages et images dans le reste
du monde comme cela s'est produit ailleurs dans le monde Arabe.
La communauté internationale a toujours
fait preuve de peu d'intérêt pour la Mauritanie depuis son
indépendance vis-à-vis de la France en 1960, parce que jusqu'à
récemment, elle a été considérée comme une étendue de désert
avec une valeur stratégique limitée (le pays a un des plus faibles
PIB en Afrique, ce qui en fait un des pays les plus pauvres dans le
monde).
Cependant, son importance est susceptible d'augmenter,
et avec elle l'attention du monde. La Mauritanie recèle de vastes
dépôts de minerai de fer, qui représentent près de la moitié de
ses exportations, et qui ont augmenté en valeur en raison de la
hausse des prix des métaux, conduisant à plus de prospections et de
nouvelles exploitations. Les recettes de l’Etat pour l’année
dernière s’élèvent à des centaines de millions de dollars.
En
outre, le pétrole a été découvert en 2001, bien que les
Mauritaniens n’en aient pas encore bénéficié parce que le pays
manque de l'infrastructure nécessaire pour exploiter pleinement ses
réserves. Cependant, avec la production à la hausse et plusieurs
conventions d'exploration pétrolière signées l’année
dernière, pour une population d'un peu plus de 3 millions, la manne
potentielle est énorme.
Du fait de la percée de la Chine et
du développement en Afrique, ce ne sera qu'une question de temps
avant que les ressources largement inexploitées de la Mauritanie
fassent l’objet de plus d’intérêt. Cela pourrait irriter les
Etats-Unis qui cherchent aussi une plus grande implication en
Afrique, laquelle est en passe de devenir un champ de bataille
économique pour les superpuissances actuelles et à venir.
La
montée d'Al-Qaida dans le Maghreb a également attiré l'attention.
Bien qu'il n'y ait aucune preuve qu'elle a infiltré le soulèvement
en Mauritanie, l'instabilité régionale indique qu'il y a toujours
une opportunité pour le groupe extrémiste de faire sentir sa
présence.
Potentiellement, le développement le plus
déstabilisant sur le plan régional est le mouvement sécessionniste
dans le nord du Mali, conduit par des combattants aguerris, les
forces touareg largement laïques qui ont combattu pour la Libye du
défunt dictateur Mouammar Kadhafi, ainsi que des combattants
islamistes.
Il y a des tensions croissantes entre ces groupes,
avec les islamistes opposés à la déclaration d'indépendance
Touareg, ainsi que les différences sur la manière de gouverner le
territoire, en particulier en ce qui concerne la loi
islamique.
Ajoutez
à cela le refus de la communauté internationale de reconnaître
l'indépendance touareg, le gouvernement du Mali menace de livrer
"une guerre totale et implacable» pour reprendre le terrain
perdu, les tensions entre les résidents dans le nord, et la
Communauté économique des États d'Afrique occidentale laissant
entrevoir la perspective d'une intervention militaire, et vous avez
une poudrière potentielle qui pourrait exploser à travers une
frontière longue et poreuse. Des milliers de personnes ont déjà
fui vers la Mauritanie.
Il y a aussi la possibilité, ou
peut-être même la probabilité, que les protestations en Mauritanie
vont s'intensifier, principalement parce que le gouvernement ne
semble pas avoir appris des erreurs des autres régimes arabes qui
sont sous la menace. Il a utilisé une combinaison de répression et
des promesses de réformes qui ont plutôt ajouté à la frustration
des mauritaniens au lieu de les convaincre.
Les manifestations
ont été jusqu'à présent pacifiques et centrées autour des
réformes. Cependant, comme dans d'autres Etats arabes, si les
manifestants estiment qu'ils sont indéfiniment ignorés ou opprimés,
ils pourraient appeler à un changement de régime plutôt qu’à
des réformes et, la violence pourrait devenir un moyen de faire
avancer ces demandes - un développement particulièrement dangereux
si l’on tient en compte la composition du pays en différents
groupes ethniques.
Quand le monde commencera à prêter
attention à ce pays, nous espérons que ce sera parce
que les Mauritaniens ne sont pas moins dignes de leurs droits que les
autres peuples du monde, pas du fait que les intérêts
personnels de puissances mondiales sont en cause, ni du fait de
l’incantation morbide des médias : ". Quand ça saigne, ça
appâte"
Sharif
Nashashibi
Traduit pour Kassataya Source:
The Guardian (Royaume Uni)
Mauritania's 'overlooked' Arab spring
A woman refilling her bucket from a well in Natriguel, in the south of Mauritania. Photograph: Pablo Tosco/AFP/Getty Images
Mauritania. Many people have never heard of it, and most would probably be unable to pinpoint it on a map,
even though its land mass is larger than France and Germany combined.
Many Arabs are unaware that it is a member of the Arab League. Even
BlackBerry does not recognise it. Its messenger service auto-corrects
"Mauritania" to "Martian" and, given public ignorance of the country,
Mauritania might as well be on Mars. However, this could and should
change. Interviewed for a TV programme recently, I was asked
whether Mauritania will be the next country to experience the Arab
spring. In fact, it has been part of the spring since January 2011, when
Yacoub Ould Dahoud fatally set himself alight in front of the presidential palace. Protests
have taken place across Mauritania ever since, spurred by the same
factors as in other Arab states: economic, political and social
disenfranchisement. But unlike those in Tunisia, Egypt, Libya, Bahrain,
Yemen, Syria and elsewhere in the region, Mauritania's have been barely a
blip on the news radar. This has led al-Jazeera to describe it as the overlooked uprising.
Very low internet usage in the country – reportedly less than 2% of
households – has made it difficult for Mauritanians to get their views,
eyewitness accounts and images out to the rest of the world as has
happened among other restive Arab populations. The international
community has historically taken little interest in Mauritania since its
independence from France in 1960, because until recently it was seen as
a poor expanse of desert with little strategic value (it has one of the
lowest GDPs in Africa, making it among the poorest countries in the
world). However, its importance is likely to increase, and with it
the world's attention. Mauritania's extensive iron ore deposits, which
account for almost half of its exports, have increased in value due to
rising metal prices, leading to more mines being opened, and hundreds of millions of dollars earned last year. Furthermore,
oil was discovered in 2001, although Mauritanians have yet to benefit
because the country lacks the necessary infrastructure to fully exploit
its reserves. However, with production on the rise, several oil
exploration deals inked in the last year, and a population of just over 3
million, the potential windfall is huge. As China makes economic
and developmental inroads into Africa it may only be a matter of time
before Mauritania's largely untapped resources come into focus. This
could irk the US into also seeking greater involvement, as Africa is
fast becoming an economic battleground for the current and upcoming
superpowers. The rise of al-Qaida in the Maghreb is also
attracting attention. While there is no evidence that it has infiltrated
Mauritania's uprising, regional instability means there is always
potential for the extremist group to make its presence felt. Potentially
the most destabilising regional development is the secessionist
movement in neighbouring northern Mali, driven by battle-hardened,
largely secular Tuareg forces who fought for Libya's late dictator
Muammar Gaddafi, as well as Islamist fighters. There are rising tensions between these groups, with the Islamists opposing the Tuareg declaration of independence, as well as differences over how to govern the territory, particularly with regard to Islamic law. Add to that the international community's refusal to recognise Tuareg independence, Mali's government threatening "total and relentless war" to recapture lost ground, tensions among residents in the north, and the Economic Community of West African States raising the prospect of military intervention,
and you have a potential powder keg that could explode across a long
and porous border. Thousands have already fled to Mauritania. There
is also the possibility, or perhaps even the probability, that the
protests in Mauritania will intensify, mainly because the government
seems not to have learned from the mistakes of other Arab regimes that
are under threat. It has used a combination of repression and pledges of
reform that have left Mauritanians unconvinced and more frustrated. Demonstrations
have thus far been peaceful and centred around reforms. However, as in
other Arab states, if protesters feel they are being indefinitely
ignored or oppressed, not only might calls for reform become demands for
regime change, but violence may become a means to advance those demands
– a particularly dangerous development given Mauritania's ethnic fault
lines. When the world does start paying attention, let us hope it
is because Mauritanians are no less deserving of their rights, rather
than the self-interests of world powers, or the morbid media mantra: "If
it bleeds, it leads."
Sharif
Nashashibi Source:
The Guardian (Royaume Uni)
Human rights groups allege Biram Dah Abeid is being held on
trumped-up charges
The Mauritanian anti-slavery campaigner
Biram Dah Abeid, head of the initiative for the resurgence of the
abolitionist movement in Mauritania, has been in custody since 13
December, charged with assaulting two police officers.
Human
rights organisations have condemned his arbitrary detention and the
harassment Abeid has suffered in his struggle against slavery. He was
arrested with five other campaigners, on leaving hospital after
treatment for head and leg injuries.
He had been beaten up by
the police a few hours earlier, on the outskirts of the capital.
Since then he has been in prison awaiting trial. He is in the
high-security jail in Nouakchott, which is mainly used to hold
Islamic extremists.
The International Federation for Human
Rights and the World Organisation Against Torture have condemned "the
assault and arrest of Abeid, the only purpose of which is to punish
his activities upholding human rights in Mauritania".
The
organisations say that his detention coincides with the choice of SOS
Esclaves Mauritanie as the winner of France's human rights award, in
recognition of the NGO's work campaigning against slavery in
Mauritania and neighbouring countries.
Abeid originally went
to a police station with two girls, aged nine and 13, who had been
forced to work as servants for the family of the local police
commissioner, according to the press release published by the NGOs.
An argument took place, which allegedly ended with Abeid being
injured. The "mistress" of the girls was charged but
released on bail.
A 2007 law made slavery illegal in
Mauritania. "But in fact no one has ever been sentenced. Charges
are dropped because the courts are under constant pressure from
traditional, religious and tribal forces, all of which tolerate this
practice," said Fatima Mbaye, head of the Mauritanian Human
Rights League.
"It is estimated that almost 40% of the
Mauritanian population [3.1 million] lives in a state of slavery or
have relatives who are slaves." The slaves are mainly black
Mauritanians in an Islamic republic that is dominated politically and
economically by Moors (of Berber or Arab extraction).
Mbaye is
convinced that Abeid is being persecuted "on account of his
campaigning". According to Ibrahima Diallo, the spokesperson in
western Europe for the African Liberation Forces of Mauritania
(Flam), an exiled paramilitary group: "He [Abeid] knew they
wanted to end his political activities. Now he fears for his
life."
Abeid could face up to five years in
prison.
Source: http://www.guardian.co.uk/world/2011/jan/04/mauritania-slavery-campaigner-human-rights
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