Affaire
Biram : C'est flagrant , c'est révoltant ! Par le commandant Mohamed
Ould Vall Ould Handeya
Tôt,
en cette matinée du lundi 20 décembre 2010, l’information tombe
comme un couperet : Biram Ould Dah Ould Abeidy et ses compagnons,
tous militants des droits de l’homme, ont été mis sous mandat de
dépôt et écroués à la prison civile de Nouakchott suite à leur
découverte d’un cas d’esclavage avéré. Ainsi se joue le second
acte - qui ne sera certainement pas le dernier – de la
rocambolesque affaire d’esclavage de mineures dans la Moughataa de
Arafatt. En agissant de la sorte, les autorités mauritaniennes
délivrent à l’opinion publique nationale et particulièrement aux
Harratines, un message d’une clarté sans équivoques : l’état
mauritanien fait entrave à l’application de la loi incriminant
l’esclavage et protège les esclavagistes.
D’ailleurs,
comment pourrait-il en être autrement quand les auteurs de flagrants
délits d’esclavage sont relâchés alors que ceux qui ont osé
dévoiler leurs forfaits, subissent les brutalités de la police et
sont écroués dans les prisons sous des prétextes fallacieux,
fabriqués de toutes pièces et rappelant curieusement les procédés
abjects d’une époque supposée être révolue. Personne n’est
dupe ; et tout le monde connaît bien les modes de fonctionnement de
nos pseudos institutions. La police n’aurait pas mis un tel
acharnement à provoquer et à agresser des citoyens venus réclamer
l’application de la loi, si elle n’avait pas reçu des ordres ou
se savait protégée par la haute hiérarchie. Il est vrai aussi
que, par ses diatribes, ses anathèmes et autres propos à
l’emporte-pièce, le président de IRA/Mauritanie agaçait et
indisposait beaucoup de mauritaniens dont je suis. Malgré cela,
ses discours n’ont jamais comporté matière susceptible de le
traduire devant les juridictions de l’état. J’en veux pour
preuve que les autorités n’en ont jamais usé et cela ne pourrait
être que parce qu’elles étaient à court de preuves et
d’arguments pour le juger. Une telle frustration les a
conduites à échafauder ce stratagème mal conçu et mal exécuté
pour essayer de régler certains comptes de manière lâche et
stupide. La diffusion des « aveux » des fillettes et de leurs
parents dans la matinée du 20décembre sur les ondes de la radio
nationale puis la même soirée à la TVM, a fini par discréditer
les pouvoirs publics dont personne ne doute désormais de leurs
mauvaises intentions et de leurs partis pris.
De
mon humble avis, cette affaire aura des conséquences aux antipodes
de ce qui a été planifié ou voulu par l’état. D’un côté,
elle a déjà contribué grandement à crédibiliser davantage et
donner un sens au combat de monsieur Biram Ould Dah Ould Abeidy et
ses camarades, rien que parce que le cas d’esclavage pour lequel
ils ont été incriminés, est avéré et ne fait l’ombre d’aucun
doute. D’un autre côté, elle a approfondi la faille et
déchiré un peu plus le tissu social de la composante maure
(Bidhanes et Harratines) du pays dont la relation est rendue
turgescente par ce regain de tension inutile qui met en péril
soudain une situation sociale qui se précarise de jour en jour.
Ceci est d’autant plus regrettable et préoccupant qu’il
intervient à un moment où, de diverses manières, une vague de fond
s’exprime en ce moment au sein des milieux maures blancs (Bidhanes)
traduisant une nouvelle prise de conscience de l’urgence d’apporter
un début de solution à la sempiternelle condition de
marginalisation et de misère particulières des masses Harratines.
Les
générations actuelles n’ont pas le droit de léguer en héritage
à la postérité le feu de la haine qui couve sous les cendres et
qu’elles ont allumé et entretenu par leurs comportements égoïstes,
hypocrites, lâches et irresponsables. N’oublions pas qu’en
cette période de recrudescence des particularismes, l’histoire
nous enseigne que la multitude de passerelles et de relations
humaines, tissées à travers les siècles, peuvent être annihilées
et voler en éclat en quelques instants. Les pogroms ethniques en
ex-Yougolavie, au Rwanda, au Burundi et même chez nous dans les
années 89-90 sont là pour nous rappeler qu’on n’est pas à
l’abri de tels désagréments. S’ajoute à cela, la menace
d’AQMI qui pointe vigoureusement à l’horizon avec pour ultime
objectif la fondation, à termes, d’un Emirat Taliban en
Mauritanie. Pourrait-on, dans ces conditions, continuer à jouer
avec le feu et favoriser le développement des abcès de fixation des
plaies béantes et des tares congénitales de la Mauritanie moderne
? Il est temps d’accepter que l’esclavage ou ses séquelles ou
ses conséquences, structurent toujours notre société. Il est
aussi temps d’accepter que l’inégalité de naissance ne peut
plus continuer à être relayée, entretenue, voire renforcée par
l’inégalité des chances. Il est, en outre, plus qu’évident
que l’état patrimonial, au service d’une nomenklatura militaro
fasciste, a fait son temps ; vouloir l’imposer plus que de raison
nous mène tout droit à la catastrophe.
Ne
laissons donc plus ces problèmes à la discrétion du pouvoir –
n’importe quel pouvoir - et rassemblons-nous au sein de mouvements
citoyens, regroupant toutes les bonnes volontés de toutes les
couches, de toutes les races, de toutes les ethnies, de toutes les
couleurs politiques pour endiguer ces dérives et trouver des
solutions justes et équitables aux défis qui menacent l’avenir de
notre patrie.
COMMANDANT
Mohamed Vall Ould Handeya
www.flamonline.com
www.flamnet.info
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