Une année après
l’élection de Aziz:L’heure du bilan
Le
président de la République, Mohamed Ould Abdel Aziz, va faire le
bilan des différentes réalisations de son régime au terme d’une
année d’exercice du pouvoir, dans le cadre d’un show
politico-médiatique organisé mercredi dans la soirée au Centre
International des Conférences de Nouakchott (CICN-Palais des
Congrès). Il y a juste un an jour pour jour que le président de la
République, Mohamed Oulld Abdel Aziz avait prêté serment
devant le Conseil Constitutionnel le 5 août 2009 au cours d’une
cérémonie grandiose organisée à l’Office du Complexe Olympique
(OCO) de Nouakchott. Le chef de l’état va ainsi faire face à
la presse nationale et internationale, et à un public dont les
membres ont été choisis dans les communes de Nouakchott. Des
hommes et des femmes triés, semble-t-il, sur le volet grâce aux
soins d’une administration locale traditionnellement attachée au
principe du politiquement « correct ». Un exercice inédit dans
le contexte mauritanien sur le modèle du bolivarien Hugo
Chavez, au cours duquel Mohamed Ould Abdel Aziz passera en
revue le bilan de son pouvoir à la fois au plan
politique, économique, social, sécuritaire et la configuration
actuelle des rapports diplomatiques avec l’environnement sous
régional de la Mauritanie au Nord (Algérie et Maroc) et au Sud
(Mali et Sénégal). Un petit regard sur le rétroviseur des deux
dernières années de la nation mauritanienne (dans une phase de
gestation extrêmement douloureuse) renvoie au coup d’état du 6
août 2008, qui a renversé le président Sidi Mohamed Ould Cheikh
Abdallahi. La suite est une bourrasque politique et institutionnelle.
Une crise dont la première dimension se dilue dans l’accord de
Dakar du 2 juin 2009, emportant la démission d’un président, de
toutes les façons, déjà déchu. D’où la reconnaissance d’un
fait accompli. Taillé sur mesure au profit d’un candidat en
campagne depuis une année par « les moyens de l’état », selon
ses détracteurs, le scrutin présidentiel du 18 juillet 2009 est
marqué par la victoire de l’ex putschiste, désormais investi de
la reconnaissance des urnes grâce à un accord politique entre trois
mouvances : le camp de Mohamed Ould Abdel Aziz, le Front National
pour la Défense de la Démocratie (FNDD) et le Rassemblement des
Forces Démocratiques (RFD). L’ex officier général est alors
investi de la légitimité des urnes et devient président de la
République. La contestation pour « fraude et manipulation »
des principaux candidats écrasés, prolonge la dimension politique
de la crise.
Une
victoire éclatante…des points sombres
Une
attitude de la classe politique en dépit de laquelle l’ex
commandant en chef du Bataillon de Sécurité Présidentielle (BASEP)
se retrouve dans une posture lui permettant
de grignoter régulièrement des points allant dans le sens de la
reconnaissance par ses adversaires. Au finish, il est arrivé à un
stade qui lui permet de revendiquer légitiment une victoire
éclatante au plan politique. La dernière en date est la douce «
reddition » de l’opposant Ahmed Ould Daddah, président du RFD et
chef de file institutionnel de l’opposition. Pour la période
poste élection présidentielle 2009, le premier discours devant
l’assemblée nationale, du président Messaoud Ould Boulkheir,
leader de l’Alliance populaire Progressiste (APP) et autre grosse
pointure de l’opposition historique, était déjà une forme de
reconnaissance. Le Pacte National pour la Démocratie et le
Développement (PNDD-ADHIL) et El Wiam ont manifesté en diverses
occasions leurs bonnes dispositions. D’où, au plan politique
intérieur, un incontestable triomphe pour le prince qui nous
gouverne. Un constat positif pour une maîtrise progressive du
front intérieur quelque peu contrarié par le caractère
relativement modeste des réalisations économiques et sociales.
Celles-ci se résument à quelques projets non structurants avec une
absence totale d’effets induits sur le fort taux de chômage et la
faiblesse d’un pouvoir d’achat pris dans une spirale d’érosion
continue. Le mode de promotion des cadres au sein de la haute
administration (état et entreprises publiques) est fortement décrié.
Ce qui provoque un malaise réel et donne le sentiment d’un
fonctionnement bloqué par des choix purement politiques sans souci
de compétence et un appareil d’état plombé par une invasion «
novice» de nouveaux venus ou parvenus. Point de vue défendu par un
nombre important d’observateurs. Il faut ajouter à cela la vive
contestation ayant marquée les rapports entre l’état et
l’écrasante majorité de ses agents dans le processus
d’attribution des indemnités de transport et de logement. Pour
la dimension sécuritaire, le combat contre le terrorisme à la mode
Al Qaida au Maghreb Islamique (AQMI) est désormais engagé, mais
reste incertain quant à son issue. Au plan diplomatique, la
position Mauritanie reste timide, et même fragile. Mis à part la
cérémonie d’investiture ayant attiré au plus haut niveau
quelques voisins d’Afrique noire, les visites de chefs d’états
étrangers à Nouakchott sont devenues une « denrée » quasiment
introuvable. Seul le président Omar Hacen El Béchir du Soudan, sous
le coup d’un mandat d’arrêt du Tribunal Pénal International
(TPI), est venu chez nous, histoire de faire un pied de nez à ses
juges. Mohamed Ould Abdel Aziz ne s’est toujours pas rendu en
Algérie et au Maroc. Les rapports avec le Mali connaissent une
dégradation continue à l’épreuve de la lutte contre la nébuleuse
terroriste. Les relations avec le Sénégal restent correctes,
mais pas forcément à leurs niveaux des premiers mois de pouvoir du
président Ould Abdel Aziz. Alors, que peut-on dire en définitive du
bilan de Aziz, une année après son accession légale au pouvoir ?
Pas grand-chose : beaucoup de bruit, des chantiers ‘’bitumés’’
et très peu d’incident sur l’emploi, le pouvoir d’achat et le
bien être. Impuissants, les gens commence à composer avec la
réalité et continuent de scrutent l’avenir.
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