ARTICLE 459:

  

Mauritanie : Haro sur la liberté de la presse !



Lundi 19 juillet 2010

Un journaliste du quotidien El Hayat a été interpellé ce matin à Nouakchott par la police puis libéré quelques temps après parce qu'il enquêtait sur les impôts. Cette atteinte à l'exercice du métier du journaliste indigne tous les professionnels de l'information et de la communication et constitue une violation grave à la liberté d'information au moment où le parlement vient de voter des lois pour libéraliser l'audiovisuel en Mauritanie.

Les arrestations ou intimidations ou censures d'émissions ou articles sont légion dans un pays qui est aujourd'hui mauvais élève, sinon le dernier, avec la Guinée dans la sous région ouest africaine où la chape de plomb est très loin d'être levée. Cette arrestation si brève soit-elle est en contradiction flagrante avec les propos du ministre mauritanien de la communication Hamdi Ould Majoub qui expliquait à l'occasion de la journée internationale de la liberté de la presse que « la liberté d'information tire son importance du fait qu'elle est partie intégrante de la liberté d'expression laquelle contribue de manière efficace à la gouvernance démocratique et aux efforts visant à réaliser davantage de développement ». Deux maîtres mots sont lâchés : gouvernance démocratique et développement. L'un ne va pas sans l'autre. La bonne gouvernance suppose que la presse parle librement des politiques et des affaires publiques, de tous les élus, de donner la parole aux citoyens. La Mauritanie est très en retard dans ce domaine et possède peu de professionnels expérimentés et qualifiés . Parmi ceux qui sont en activité la plupart d'entre eux sont parfois victimes de dérapages. Bons ou mauvais, tout le monde aspire à la liberté d'expression. Mais encore faudrait-il que le pouvoir en place joue le jeu ? Personne ne doute des intentions de Ould Aziz à réformer le journalisme mais le secteur a besoin de l'amélioration des conditions de travail de tous les journalistes mais avant un cadre juridique de travail donc de protection des professionnels. Dans cette perspective, les pouvoirs publics devront pouvoir faciliter l'accès à tous les citoyens aux services de l'information. C'est la finalité de la libéralisation. Nul doute que la presse a enregistré ces dernières années quelques progrès mais timides en matière de liberté de la presse contrairement à l'audiovisuel jusqu'ici instrument privilégié de l'Etat pour sa propagande et son embrigadement des populations analphabètes en grande partie. Maigre consolation pour les premiers qui entendent bien exercer librement leurs enquêtes partout dans les rouages de l'Etat comme ce journaliste qui a été inquiété par des policiers zélés parce qu'il voulait savoir plus sur les taxes imposées aux commerçants. Bien entendu ce travail d'investigation gêne bien la poignée de lobbying de commerçants et fonctionnaires corrompus et actifs dans ce secteur. Cette intimidation fait partie de la panoplie des pouvoirs publics habitués depuis 1960 à la rétention de l'information et par conséquent pas prêts à partager les informations avec le privé dont la liberté de ton fait peur. Aujourd'hui c'est un journal qui est victime de pression, hier c'étaient des censures à Radio-Mauritanie et à la télévision. Demain ? Force est de constater que la tendance est toujours le monopole de l'information par les pouvoirs publics qui oublient le plus souvent que « sans la liberté d'informer, il n y a point d'éloges flatteurs».Pour les journalistes de l'audiovisuel, ils aspirent maintenant à vivre la libéralisation des ondes même si sa matérialisation demandera du temps et changement de comportement . Cette nouvelle donne devra permettre de réorganiser le secteur public à la concurrence du privé lequel a obtenu tout dernièrement l'appui du ministère de la communication sur l'organisation de la publicité, des annonces , de la distribution mais aussi de la presse électronique déjà active avec peu de moyens mais qui va révolutionner demain le paysage audiovisuel de la Mauritanie. Une note d'optimiste qui dessine une ouverture aux médias publics et indépendants aux partis de l'opposition et au citoyen en particulier.

Suzannah Horowitz
Journaliste
http://barricades.over-blog.com/

 

 

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