Mauritanie
: Haro sur la liberté de la presse !
Lundi 19 juillet 2010
Un
journaliste du quotidien El Hayat a été interpellé ce matin à
Nouakchott par la police puis libéré quelques temps après parce
qu'il enquêtait sur les impôts. Cette atteinte à l'exercice du
métier du journaliste indigne tous les professionnels de
l'information et de la communication et constitue une violation grave
à la liberté d'information au moment où le parlement vient de
voter des lois pour libéraliser l'audiovisuel en Mauritanie.
Les
arrestations ou intimidations ou censures d'émissions ou articles
sont légion dans un pays qui est aujourd'hui mauvais élève, sinon
le dernier, avec la Guinée dans la sous région ouest africaine où
la chape de plomb est très loin d'être levée. Cette arrestation si
brève soit-elle est en contradiction flagrante avec les propos du
ministre mauritanien de la communication Hamdi Ould Majoub qui
expliquait à l'occasion de la journée internationale de la liberté
de la presse que « la liberté d'information tire son importance du
fait qu'elle est partie intégrante de la liberté d'expression
laquelle contribue de manière efficace à la gouvernance
démocratique et aux efforts visant à réaliser davantage de
développement ». Deux maîtres mots sont lâchés : gouvernance
démocratique
et développement.
L'un ne va pas sans l'autre. La bonne gouvernance suppose que la
presse parle librement des politiques et des affaires publiques, de
tous les élus, de donner la parole aux citoyens. La Mauritanie est
très en retard dans ce domaine et possède peu de professionnels
expérimentés et qualifiés . Parmi ceux qui sont en activité la
plupart d'entre eux sont parfois victimes de dérapages. Bons ou
mauvais, tout le monde aspire à la liberté d'expression. Mais
encore faudrait-il que le pouvoir en place joue le jeu ? Personne ne
doute des intentions de Ould Aziz à réformer le journalisme mais le
secteur a besoin de l'amélioration des conditions de travail de tous
les journalistes mais avant un cadre juridique de travail donc de
protection des professionnels. Dans cette perspective, les pouvoirs
publics devront pouvoir faciliter l'accès à tous les citoyens aux
services de l'information. C'est la finalité de la libéralisation.
Nul doute que la presse a enregistré ces dernières années quelques
progrès mais timides en matière de liberté de la presse
contrairement à l'audiovisuel jusqu'ici instrument privilégié de
l'Etat pour sa propagande et son embrigadement des populations
analphabètes en grande partie. Maigre consolation pour les premiers
qui entendent bien exercer librement leurs enquêtes partout dans les
rouages de l'Etat comme ce journaliste qui a été inquiété par des
policiers zélés parce qu'il voulait savoir plus sur les taxes
imposées aux commerçants. Bien entendu ce travail d'investigation
gêne bien la poignée de lobbying de commerçants et fonctionnaires
corrompus et actifs dans ce secteur. Cette intimidation fait partie
de la panoplie des pouvoirs publics habitués depuis 1960 à la
rétention de l'information et par conséquent pas prêts à partager
les informations avec le privé dont la liberté de ton fait peur.
Aujourd'hui c'est un journal qui est victime de pression, hier
c'étaient des censures à Radio-Mauritanie et à la télévision.
Demain ? Force est de constater que la tendance est toujours le
monopole de l'information par les pouvoirs publics qui oublient le
plus souvent que « sans la liberté d'informer, il n y a point
d'éloges flatteurs».Pour les journalistes de l'audiovisuel, ils
aspirent maintenant à vivre la libéralisation des ondes même si sa
matérialisation demandera du temps et changement de comportement .
Cette nouvelle donne devra permettre de réorganiser le secteur
public à la concurrence du privé lequel a obtenu tout dernièrement
l'appui du ministère de la
communication
sur l'organisation de la publicité, des annonces , de la
distribution mais aussi de la presse électronique déjà active avec
peu de moyens mais qui va révolutionner demain le paysage
audiovisuel de la Mauritanie. Une note d'optimiste qui dessine une
ouverture aux médias publics et indépendants aux partis de
l'opposition et au citoyen en particulier.
Suzannah
Horowitz Journaliste http://barricades.over-blog.com/
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