" Le général Jean-Louis
Georgelin chef d'état major des armées françaises est arrivé, dimanche, à
Nouakchott dans le cadre d'une visite de travail en Mauritanie. Au programme
de ce général 5 étoiles une rencontre avec le ministre de la défense, Hammadi
Ould Hammadi, une séance de travail avec son homologue mauritanien, général
Ghazwani et une tournée dans le nord du pays où les deux hauts gradés sont
attendus dans les villes de Chinguitty et Atar.
L'on suppose que cette rencontre entre les
deux premiers responsables militaires de la Mauritanie et de la France qui
entretiennent des relations de coopération militaire depuis les années 60 du
siècle dernier, entre dans le cadre de la politique sécuritaire commune de
lutte contre le terrorisme et les trafics de tous genres actuellement
engagées dans le grand Sahara et d'autres chaudes contrées du monde
(Afghanistan, Irak) que l'on pense être alimentées en homme à partir de ce no
man's land la Mauritanie, l'Algérie, le Mali et le Niger.
Mais l'arrivée en Mauritanie du patron de
l'Armée française, cache mal l'activisme de hauts gradés des deux pays
constaté depuis quelques semaines (tenue à Nouakchott d'un conclave
sécuritaire entre militaires français et mauritaniens et visite effectuée
récemment en Mauritanie par le général commandant les forces françaises au
Cap - Vert). Elle aurait pu passer inaperçu si la compagnie Total, élément essentiel
du dispositif de la françafrique, n'avait pas annoncé, il y a trois semaines,
la découverte du pétrole dans le bassin de Taoudenni. Tout d'un coup, on se
met à se demander s'il ne faut pas chercher de ce côté ce trop d'intérêt
accordé par la France à la Mauritanie, un pays qui, jusque-là, n'a jamais
caché sa jalousie face aux relations privilégiées que l'ancienne métropole
entretient avec des pays africains comme le Sénégal, le Maroc ou la Tunisie.
On peinerait certes à trouver toutes les
raisons de cette longue lune de miel entamée depuis le soutien de la France
de Sarkozy aux généraux qui ont mis fin, un certain 6 août 2008, au régime
démocratique du président Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi mais derrière le
paravent de lutte contre le terrorisme généralement avancé, se cache sans
doute des intérêts économiques d'envergure et un positionnement
géostratégique évident face à la percée chinoise et aux velléités de conquête
de l'Amérique. Supplantée par l'Espagne dans le domaine halieutique, la France
est en train de tout mettre en œuvre pour occuper les premières loges dans le
secteur prometteur du pétrole. Ainsi, en jouant ses soutiens politiques pour
consolider ses intérêts économiques et géostratégiques, la France est tout
bonnement en train d'aligner la Mauritanie sur le même modèle de coopération
appliqué avec succès au Gabon et au Niger, deux pays où les sociétés
françaises Total et AREVA ont bon pied depuis des lustres.
Ceci expliquant cela, l'on comprend maintenant
la raison profonde du soutien apporté par la France à la junte dirigée par
Ould Abdel Aziz, lors de la crise institutionnelle mauritanienne, et les
accointances profondes entre groupes financiers français avec des milieux
d'affaires mauritaniens.
Maintenant que le chapitre est clos, on se
rend compte que le rôle de la France a été déterminant entre le 6 août 2008,
date à laquelle le général Mohamed Ould Abdel Aziz, renverse par un coup
d'État militaire le premier président mauritanien démocratiquement élu lors
d'élections non contestées et le 5 août 2009, où lui-même sera investi
président de la République Islamique de Mauritanie après avoir officiellement
remporté l'élection présidentielle contestée du 18 juillet dernier. La France
a - t - elle adopté Ould Abdel Aziz parce qu'il répond bien au " profil
" recherché du dirigeant capable d'assurer ses intérêts dans un pays où
l'insécurité est devenue, du coup, le mal le " mieux partagé " ou a
- t - elle tout simplement adapté sa politique africaine, terriblement efficace
au Gabon, au Niger et au Congo, à ce nouveau " cas " qu'est la
Mauritanie ?
Tout semble indiquer en tout cas que le
président Aziz, est vu, depuis Paris, comme le " Gardien du Temple
", le protecteur des intérêts de la France en Mauritanie.
C'est ce qui explique que, par l'intermédiaire
de son président, Nicolas Sarkozy, elle s'est empressée de féliciter le
vainqueur du scrutin du 18 juillet dernier et affirmer que " cette
élection permet (…) une sortie de crise et la normalisation des relations de
la Mauritanie avec la communauté internationale. " Sans aucun égard - ni
regard - aux protestations de l'opposition mauritanienne qui, dès le jour du
scrutin, avait dénoncé des fraudes et des irrégularités pouvant remettre en
cause, selon elle, le résultat définitif (seules 17.000 voix permettent à
Abdel Aziz d'éviter un second tour).
Le soutien de la France au nouveau pouvoir de
Nouakchott est sans équivoque. Alain Joyandet, Secrétaire d'État à la
Coopération et à la Francophonie, va ainsi officiellement représenter la
République française à la cérémonie d'investiture du président Aziz. Le 3
août sur RMC, deux jours avant le " couronnement " du succès de la
diplomatie française de l'ombre, il déclarait même que c'est " grâce à
nous, quelque part, que (…) en Mauritanie, la démocratie revient "
! A quel prix ?
Il est certain que l'implication de la France
dans la politique intérieure de la Mauritanie n'a pas été faite au seul
chapitre de cette fameuse lutte contre le terrorisme dont les résultats se
font attendre. D'ailleurs, la coopération dans le domaine reste dérisoire
puisque tout semble se dérouler sous le sceau du secret absolu. L'adoubement
de Ould Abdel Aziz par la France trouve sa consécration dans la visite que
celui-ci s'apprête à effectuer à Paris mi-octobre prochain. Une autre preuve
que la " Nouvelle Mauritanie " compte pour beaucoup dans la
politique africaine de la France de Sarko. Bon vent !
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