A.H.M.E.
ARTICLE 269 :
L’Etat
nigérien a versé 10 millions CFA à une femme victime d’esclavage Le Niger a exécuté un arrêt de la Cour de justice de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) le condamnant à payer 10 millions de francs CFA (20.000 dollars) à Hadijatou Mani Koraou, une citoyenne nigérienne qui avait porté plainte contre l’Etat pour violation de ses droits fondamentaux, a appris APA samedi de source judiciaire. Le tribunal correctionnel de Konni (au sud du Niger), a également condamné à un an de prison ferme et 500.000 frs CFA d’amende, dans un jugement rendu le 31 mars dernier, Elhadji Souleymane Naroua, le maître de Hadijatou, aujourd’hui âgée de 25 ans. Une plainte pour délit et crime d’esclavage avait été déposée par la plaignante contre Elhadj Souleymane Naroua. La cour de justice de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) avait condamné en octobre 2008 l’Etat du Niger à verser 10 millions de FCFA à la jeune femme qui a porté plainte contre son pays pour délit d’esclavage. Elle n’avait que 12 ans en 1996 lorsqu’elle a été vendue à 240.000 CFA à Elhadj Souleymane Naroua, une transaction au titre de la "wahiya", une pratique en cours au Niger et consistant à acquérir une jeune fille, généralement de condition servile, pour servir à la fois de domestique et de concubine. La jeune fille acquise dans ces conditions est appelée "Sadaka", une cinquième épouse, en dehors des quatre autorisées par l’Islam. Des relations avec Elhadj Souleymane Naroua sont nés quatre enfants dont deux ont survécu. Dans sa décision, le tribunal de la CEDEAO, saisi pour la première fois pour une affaire d’esclavage, a jugé que l’Etat du Niger était «responsable» de l’état d’asservissement enduré par Hadidjatou Mani Koraou. Selon la décision de la Cour de justice de la CEDEAO, la jeune femme a «été victime d’esclavage » et la République du Niger en était responsable pour «inaction », alors même que l’esclavage est passible de 10 à 30 ans de prison ferme au Niger depuis la réforme de la loi pénale en 2003. La cour, qui ne prononce pas de peines d’emprisonnements, a ainsi demandé à l’Etat du Niger de verser la somme de 10 millions FCFA pour les préjudices subis par la jeune femme qui en réclamait 50 millions de réparation. L’Etat du Niger n’est pas cependant jugé responsable pour les discriminations endurées par la victime durant ses dix années en tant qu’esclave, tranchant que ces faits sont attribuables à son ancien maître, un sexagénaire touarègue. La justice nigérienne n’a pas assumé sa mission de protection de la victime indique la Cour, saisie en avril dernier par la plaignante qui avait été déboutée en appel, après avoir gagné son premier procès devant un tribunal à Konni, au sud du Niger. « Il s’agit d’une décision qui crée un précédent prometteur pour la lutte contre l’esclavage et toute forme de discrimination » avait indiqué à APA, au lendemain du jugement, l’avocat de la plaignante,Me Abdouramane Chaibou. Selon lui, «même si la Cour (de la justice de la CEDEAO) ne prononce pas de peines d’emprisonnements, elle en donne des décisions qui rappellent les Etats à l’ordre ». A l’époque, le ministre nigérien de l’Intégration africaine, Saidou Hachimou, avait affirmé que l’Etat du Niger se soumettra à la décision de la cour de justice de la CEDEAO en s’engageant à verser le montant prévu. On
estime à près de 800.000, le nombre de personnes victimes d’esclavages, selon
une étude controversée publiée en 2005 par l’association Timidria, qui lutte
contre les pratiques esclavagistes dans le pays. APA-Dakar (Sénégal)
|