Situation en Mauritanie : Les mauvais génies d’Ould Taya /
Dr Nagi O. Ahmedou Salem O. Bouh
Ce sont deux petites phrases qui m’ont ouvert les
yeux sur une réalité terrifiante : Ce que le système Ould Taya avait de plus
mauvais est aujourd’hui aux commandes du pays et s’emploie, avec les mêmes
méthodes fondées sur la ruse et la duplicité, à perpétuer son emprise sur la
Mauritanie.
La première de ces phrases se trouve dans
l’enregistrement des paroles de Sidi Ould Cheikh Abdallahi avec la délégation
du Qatar, récemment publiée par Taquadomi et dit à peu près ceci : Il y a
une opération chirurgicale de la démocratie : on coupe un membre (la présidence
de la république) et on le remplace.
La seconde a été prononcée, dans un moment de sincérité, par le député
Abderrahmane Ould Mini au cours du meeting organisé mercredi dernier par son
parti, le RFD : Maaouya n’était visiblement pas le plus mauvais de son système.
Nous ne lui connaissons qu’une seule maison.
La première me rappelle le coup d’Etat du 3 août 2005 : Alors que le pays était
au bord de l’explosion et que le président Ould Taya ne cessait plus de parler
de « changement », de « lutte contre la corruption » et d’« assainissement » ;
alors qu’il avait accusé, à Kiffa, son entourage de lui cacher la vérité et
l’enfermer dans une bulle, ses collaborateurs les plus proches (le Chef de sa
sécurité, son Directeur de la sûreté, son Directeur de cabinet(il était
complice, Ould Tomy !) et quelques officiers de sa fabrication) l’ont déposé,
reprenant à leur compte un désir de changement très fort certes, mais qui
devait les balayer eux apparemment et non lui. Nous avons changé, ce jour-là de
Président (on a coupé la tête du système), et on voulait, certainement, le
remplacer et continuer comme si de rien n’était, en offrant au peuple
l’illusion d’un changement qui n’était en réalité qu’un bluff.
Mais la fermeté de la communauté internationale
contre le coup d’état obligea les auteurs de l’ablation à changer de prothèse :
il y eut les élections, au cours desquelles le système s’est redéployé comme
les mauvaises cellules cancéreuses se disséminent dans le corps, quand une dose
de médicament efficace est inoculée au malade, en attendant de développer des
anticorps ! Et la prothèse (Sidi) a été rejetée par le corps malade. Le coup
d’état du 6 août 2008 était une nouvelle ablation du même membre, et le médecin
qui tient le bistouri, se dit qu’après un échec, il ne peut compter que sur
lui-même pour remplacer le Président. Alors il fait tout pour réussir
l’impossible : s’auto-greffer sur le système.
La seconde m’a amené à faire le constat suivant : depuis qu’il a pris le
pouvoir, Ould Abdel Aziz accuse Sidi Ould Cheikh Abdallahi et son entourage de
gabegie et de malversation. Il a même jeté certains des collaborateurs du président
en prison et malmené sa famille avec une méchanceté inhabituelle dans notre
société ! Cependant, il n’a jamais fourni aucune preuve concrète, ni ouvert un
procès public pour juger les personnes qu’il accuse. Plus bizarre encore,
Khattou Mint Boukhary a été accusée d’avoir puisé à la caisse de l’Etat
illicitement. Mais aucun fonctionnaire n’a été jusqu’à présent arrêté pour lui
avoir donné l’argent public illégalement, alors que c’est la responsabilité du
fonctionnaire d’abord ! Comment peut-on vouloir tromper les gens avec des
arguments si défaillants ?
Mais il y a plus bizarre que bizarre : Internet (et même la presse écrite (voir
l’interview de Boidiel dans le Calame), recensent chaque jour les richesses de
Mohamed Ould Abdel Aziz. Des maisons au Maroc, une grande ferme en inchiri, des
immeubles bien placés, des sociétés, des hammams, plusieurs hommes d’affaires
courtiers du général, etc.) Mais aucune réponse de celui-ci, ou de son
entourage. Pourtant c’est des preuves. C’est ce imanque au dossier de Khattou,
de Sidi et Ould Waghef pour que nous croyons à leur culpabilité ! Pourquoi la
brigade des crimes économiques n’enquête-t-elle pas sur les richesses du
Général-mains-propres ? Bizarre ! Bizarre ! Bizarre ! Pourquoi n’arrête-t-on
pas Ely Ould Med Vall pour les 400 millions de Dollars, Ali Fall, Mohamed Ould
Dié, Ould Abdi ould Jiyyid et d’autres pour l’argent qu’ils n’ont pas remboursé
? Bizarre et cent fois bizarre !
Les conclusions qu’on peut tirer de tout cela :
1- Les auteurs du coup d’Etat du 3 août 2008 n’étaient pas venus pour le
changement, ni pour l’assainissement mais bien pour sauver le système à l’ombre
duquel ils ont grandi et se sont enrichis des menaces que Ould Taya, désormais
insatisfait de son entourage (il avait limogé Louleid Ould Weddad, placé Ould
Tomy en prélude à l’éloignement des colonels Ely O. Med Vall et Mohamed Ould
Abdel Aziz, pour le desserrement de l’étau familial qui se fermait autour de
lui, renvoyé Cheikh El Avia, lancé l’armée aux trousses d’Al Qaida pour réorganiser
la grande muette…). L’opération chirurgicale a été décidée par les mauvais
génies de l’ancien président que le changement ne servait pas. C’est maintenant
évident !
2- La lutte contre la gabegie est une vérité derrière laquelle se cache un
mensonge. C’est un slogan porté par des symboles de la gabegie qui veulent
tromper la vigilance de leur peuple. Exactement comme le Voleur qui piste avec
les Pisteurs.
3- Les mauvais génies de Maaouya sont toujours à l’œuvre dans la crise
actuelle, et ils en tirent les ficelles pour rétablir le système tel qu’il les
sert. Ils opèrent de plusieurs fronts, et il faut qu’ils soient visibles pour
nous :
• Ould Abdel Aziz et un Groupe d’hommes d’affaires de sa tribu ou proche à
elle. Il tient la seule garnison militaire combative dans l’armée et il veut
être président. C’est lui qui a enfermé Maaouya pendant vingt ans sous prétexte
« d’assurer sa sécurité ». Il l’a fait à Sidi pendant quelques mois, avant de
le déposer dès qu’il a donné des signes de volonté d’indépendance. Il a tout
d’un dictateur dangereux.
• Ely Ould Med Vall. Il veut faire croire à tout le monde qu’il est
contre le coup d’Etat de son cousin, qu’il travaille à l’extérieur pour serrer
l’étau autour de la junte. Il est un dernier recours de Ould Abdel Aziz et il
jouera un rôle dans son élection s’il ne peut pas se présenter lui-même. Les
deux hommes sont formés à la même culture de la ruse et du double jeu.
• Louleid Ould Waddad, Kaba Ould Eléwa et Consorts. Ils viennent de créer un
parti politique, qui sera un attrape-tout pour récupérer une partie des
mécontents de la gestion actuelle par Ould Abdel Aziz de son coup d’Etat. Ils
oeuvreront à la crédibilité des prochaines élections et auront leur part du
gâteau de l’après 6 juin 2009. Il ne faut pas exclure que le calcul des uns et
des autres est que Louleid revienne au Cabinet de Ould Abdel Aziz (ou d’Ely)
après les élections, que Kaba redevienne ministre de l’intérieur…Une revanche
sur le Maaouya d’après le 8 juin 2003, en quelques sorte.
• El Arbi Ould Jideine, Ghrini, Mint Mouknass, Moustapha Ould Abeiderrahmane,
Valy Ould Bellal et Cie.(Pauvre de Maaouya, que tu en avais de mauvais génies
!) Ces gens-là ont déjà pris fait et cause pour Ould Abdel Aziz, liant leur
sort au sien. Mais ils n’hésiteront pas à tourner la veste dès que le général
ne sera plus candidat. Personne n’a oublié les sorties honteuses de Naha Mint
Mouknass contre Maaouya dont elle était la Ministre jusqu’au jour du coup
d’Etat du 3 août 2006, ni la participation de Ghrini au démantèlement de son
propre parti (Le PRDR) au service du Colonel Ely Ould Med Vall…
• Et ceux qui sont au Front anti-putsch me dirait-on ? Ils sont encore dans un
brouillard qui ne permet pas de lire leur attitude en cas de consécration du
fait accompli. Mais le présent les lave de bien des odeurs nauséeuses de
conspiration contre l’intérêt du pays.
Le 04/04/09
Source : www.tagadoumy.com
Dr Nagi Ould Ahmedou Salem Ould Bouh
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