3
000 soldats US en route pour l’Afrique
To
read the article in English. Click here.
Mark
P. Fancher (revue
de presse – Black Agenda Report – 23/10/12)*
Les
illusions entretenues sur la politique étrangère d’Obama,
nouveau mandat, nouvelle version, seront-elles contredites par
les exigences de la
real politik,
en Afrique ou au Moyen-Orient ?
Quand
le président Obama a déployé 100 soldats en Ouganda, il y a un an,
pour entreprendre une chasse mythique de Joseph Kony, chef de l’Armée
de Résistance du Seigneur, la réaction à cette annonce a
certainement été un simple haussement d’épaules (1). Quel
mal pouvait générer une centaine de militaires, errant sans but
dans le bush, prétendument à la recherche d’un homme accusé de
terrorisme ? Mais, si la forêt empêche de voir les arbres, un
observateur plus avisé pouvait entrevoir les implications mortelles
d’une présence militaire US en Afrique qu’un grand nombre
percevait, à tort, comme anodine.
Verrouiller
le continent
Le
service de presse de Army
Times rapportait
que les Etats-Unis s’apprêtent à envoyer plus de 3000 soldats un
peu partout, en Afrique en 2013. Pour le Major Général, David R.
Hogg,« En
ce qui concerne notre mission, c’est un territoire vierge ». Mais,
que des soldats stationnent sur le continent africain, n’a rien de
nouveau et, même, si Hogg ne l’admet pas, le
but de la mission est de verrouiller l’entier continent.
En
fait, l’armée américaine effectue, au moins, une douzaine
d’opérations importantes en Afrique pour lesquelles des troupes
sont réellement engagées. Cependant, pour les Etats-Unis,
avoir un pied, militairement, dans tous les coins du continent limite
le risque que leurs intérêts ne soient pas protégés dans des
régions où une menace existe. Par exemple, le Mali a des réserves
de pétrole et dispose d’une position stratégique mais est l’objet
d’une déstabilisation croissante par un mouvement sécessionniste
dans le nord. Pourtant, le Mali a aussi été le site d’un exercice
militaire US du nom de « Atlas
Accord 12 »
qui a fourni aux militaires maliens une formation dans le domaine
aérien.
Opérations
US en Afrique en 2012
Au
cours de l’année, il y a eu d’autres opérations en différents
points du continent, comparables si non en étendue du moins, en
substance :
« Cutlass
Express »,
un exercice naval visant ce qu’on appelle la « piraterie » dans
la région du Bassin de Somalie ;
« Africa
Endeavor 2012 »,
basée au Cameroun, centrée sur la formation et la coordination en
communications militaires ;
« Obangame
Express 2012 »,
exercice naval pour assurer une présence dans le golfe de
Guinée, région au cœur des opérations pétrolières en
Afrique occidentale ;
« Southern
Accord 12 »,
basée au Botswana dont le but était d’établir des relations de
travail entre les forces militaires d’Afrique australe et les
Etats-Unis ;
« Western
Accord 2012 »
était un exercice au Sénégal impliquant tous les types
d’opération, des exercices de tirs à la collecte d’informations
et au combat de tireurs d’élite.
D’autres
exercices de même nature aux noms tels que « African
Lion », « Flintlock » et« Phoenix
Express » se
sont aussi déroulés. De plus, des unités de Gardes Nationaux US
ont effectué des rotations dans des pays qui incluent entre autres,
l’Afrique du sud, le Maroc, la Tunisie, le Nigéria, le Libéria et
le Ghana.
Des
communiqués de presse par le US Africa
Command (AFRICOM)
suggèrent que ces opérations sont bénéfiques tant pour les
Etats-Unis que pour l’Afrique. Leur message central est que les
militaires US et africains sont des partenaires dans la guerre contre
le terrorisme et d’autres
formes de soulèvement. Ce
serait une erreur pour les Etats africains de gober l’idée que
l’Afrique et les Etats-Unis sont, d’une manière ou d’une
autre, interdépendants. La véritable nature des relations
entre l’Afrique et les Etats-Unis a été très bien décrite par
A.M. Babu, personnage central dans la formation de la Tanzanie. « La
prétendue « interdépendance » ne peut être
qu’une interdépendance dans laquelle nous (les Africains) sommes,
en permanence, dépendants de l’exploitation massive de nos
ressources matérielles et humaines par l’Occident ».
25%
des besoins américains en pétrole vers 2015
Un
rapport du Bureau
de Recherche du Congrès sur
les plans d’exploitation US a été publié par WikiLeaks.
On y lit « en
dépit des conflits dans le delta du Niger et d’autres régions
productrices de pétrole, le potentiel pour des forages en profondeur
dans le golfe de Guinée est élevé et les analystes estiment que
l’Afrique pourra fournir près de 25% des besoins américains en
pétrole vers 2015. »
Le document cite un officiel US du Département de la défense : « …la
mission principale des forces US (en Afrique) est d’assurer que les
champs pétrolifères du Nigéria …sont sûrs ».
C’est
pourquoi, les Etats-Unis seraient satisfaits que des actions
militaires menées par des Africains visent les militants qui
sabotent les opérations des compagnies pétrolières occidentales en
Afrique occidentale. Parallèlement, en raison de l’accroissement
de leurs importations de pétrole, ils s’opposeront vigoureusement
à toute velléité africaine d’exclure par la force lesdites
compagnies du Delta du Niger même si leurs pipelines qui fuient ont
ruiné d’innombrables hectares de terres agricoles et d’eaux
poissonneuses.
Les
intérêts de l’Afrique sont en perpétuel conflit avec ceux des
Etats-Unis et leurs relations ne doivent en aucun cas être
interdépendantes. Il serait bon que les Africains réagissent à la
présence de soldats US sur leur sol comme ils le feraient pour des
termites dans leurs maisons. Il est certain qu’aucun mal immédiat
ne peut être observé mais à long terme, la structure sera
irréparablement endommagée et risque même de s’effondrer.
Traduction :
Xavière Jardez – Titre et intertitres : AFI-Flash
Mark
P. Fancher est avocat, auteur de nombreux articles sur la présence
militaire US en Afrique
|