Le Sénégal est une terre d’accueil pour de
nombreux libanais depuis de longues
décennies. Ils y sont intégrés comme des sénégalais à part entière, se
livrent à des activités commerciales florissantes et ne souffrent d’aucune
forme de discrimination.
Voilà
qu’une étudiante sénégalaise est victime de racisme au Liban. Certains
libanais osent, pour ne pas
regarder le racisme, dans leur pays, en face l’accusent de ne pas être
sérieuses dans ses déclarations et vont même jusqu’à la soupçonner de ne
pas être une fille respectable.
Face à ce cas, les associations et autorités
sénégalaises restent muettes.
Imaginons, un seul instant, que ce soit un
Libanais qui ait subi un racisme pareil au Sénégal. !
La réaction des Libanais au Sénégal, des
autorités libanaises, la diaspora libanaise serait autre.
Les Africains, y compris leurs dirigeants en
premier, ne réagissent pas au sort réservés à leurs concitoyens à
l’étranger. On l’a vu avec les clandestins au Maroc, en Algérie et les
nombreux morts en mer méditerranée, etc.
S’agit-il d’une inconscience collective ou celle
des autorités africaines. ?
Vous
aurez, en tout cas, intérêt à lire l’article de Wal Fadjri suivant :
Mohamed Yahya Ould Ciré
Racisme au Liban : la sénégalaise seule face à son
agresseur
L’étudiante sénégalaise victime
d’une agression à Beyrouth est prise sous le feu roulant des critiques de
la diaspora libanaise et des ressortissants de ce pays qui mettent en doute
l’authenticité de sa mésaventure. D’autres plus vicieux mettent en doute sa
moralité. Et pendant ce temps, le Sénégal officiel et les ONG de défense
des droits de l’homme font comme s’il n’y avait rien à signaler. Le seul
défenseur des intérêts de la sénégalaise n’est autre que le consulat de
France à Beyrouth…
Les Libanais - pas tous certes - ne sont décidément pas disposés à se
regarder dans ce miroir qui leur renvoie l’image du racisme ordinaire qui
s’est abattu sur une étudiante noire, sénégalaise, en plein Beyrouth (voir
Walf n° 4102 du 17 novembre 2005). Des quatre coins du monde, des Libanais
qui ont lu le récit de l’agression bestiale d’un Beyrouthin contre Amy
Diongue, étudiante, de retour de ses cours à l’université Saint-Joseph de
Beyrouth, ont inondé son adresse électronique de messages (116 en une seule
journée) de réactions. Certaines expriment leur indignation, d’autres un
sentiment mitigé qui mêle indignation et incrédulité. C’est le cas de cet
intervenant qui veut que cette bestialité ne soit qu’un «simple incident de
parcours» (sic). Et plus loin dans son message, le correspondant souligne
que «nous [Libanais] sommes connus pour notre hospitalité et surtout notre
tolérance pour toutes les races. Jamais, un problème comme le vôtre n’a été
signalé auparavant. Les soldats de l’ONU et leurs familles sont au Liban
depuis des années et beaucoup de Noirs parmi eux. Des jeunes filles noires
au pair travaillent dans nos maisons et sont traitées avec beaucoup de
respect». Qu’il lise cette annonce beyrouthine : «Offre spéciale pour le
mois du shopping. Au lieu de 2 000 dollars, on vous remet une bonne
sri-lankaise pour 1 111 dollars». Une
réclame reproduite par un excellent et tout aussi pertinent article
du Monde diplomatique numéro de juin 1998 intitulé «Trafic de
"servantes" à Beyrouth». On peut aussi le lire en allant sur
l’internet : http://www.monde-diplomatique.fr/1998/06/FAVRE/10564. Un autre
Libanais s’adresse à l’étudiante sénégalaise en ces termes : «Mademoiselle,
de grâce, rentrez dans votre pays, laissez-nous tranquilles vous n’êtes pas
faites pour notre pays. Vous êtes faites pour la cabane bambou bambou».
Et ce n’est pas tout puisque des internautes libanais soulignent
pour la gouverne de Mlle Diongue que «notre police est excellente, mais
votre histoire ne tient pas debout. Faut voir si cet homme qui vous a
agressée, vous connaît.» D’ailleurs, lors de la déposition à la police à
Beyrouth, quelqu’un d’autre lui a tenu un propos voisin qui insinue, en
termes à peine voilés, que tout cela n’est qu’affabulation, voire le récit
tronqué à dessein par une Négresse dont la partie liée avec un Libanais
aurait mal tourné…
Sans doute que ce Libanais n’a pas cherché qui était cette
Sénégalaise. Quand on consulte son bref curriculum vitæ, accessible à
partir d’une simple recherche via le moteur google, on découvre qu’Amy
Diongue a quand même des activités plus sérieuses, plus honorables qu’une
tapin. Son séjour au Liban n’a rien à voir avec celui de ces bonnes
sénégalaises dont on devrait bien pleurer sur leur sort en Orient. A
Beyrouth, Amy Diongue fréquente l’université Saint-Joseph, une institution
des Jésuites - on sait qui sont les Jèzes qui, avec les frères dominicains,
constituent l’aile «intellectualiste» de l’Eglise catholique. Elle est
là-bas après avoir été sélectionnée dans le cadre d’un échange entre
Sciences Po Grenoble et l’université Saint-Joseph. Le reste du cursus vaut
bien le détour. Reproduisons-le donc telle que vu sur internet : «Grenoble
Université Grenoble III - Stendhal [Lea] [Bac+2] (2001-2003) ; Grenoble
lycée Cité scolaire internationale Europole [Section internationale]
[Terminale] 1998-2001) ; Cambridge : Université University of Cambridge
[Certificate in Advanced English] [Grade B] (1999-2000) ; Cambridge :
Université University of Cambridge [First Certificate in English] [Grade A]
(1998-1999) ».
Tirez vous-mêmes les conclusions si un tel cursus, c’est pour
s’encanailler au point d’avoir des comptes à solder en pleine rue à
Beyrouth. En tout cas, on espère bien pour l’honneur du Sénégal et du Liban
que la vérité nous donne tort.
Pour le moment, Amy Diongue se bat seule à Beyrouth, avec le
soutien moral via courrier électronique de compatriotes à travers le monde.
Il y a aussi l’Ong Jamra - seul soutien sénégalais connu - et l’ambassade
de France à Beyrouth, parce que Amy Diongue porte un passeport français. Et
pendant ce temps à Dakar, les Ong de défense des Droits de l’homme n’ont
même pas une pensée pour cette fille. Et la diplomatie du sympathique M.
Gadio ? On l’attend encore comme les deux paumés de Beckett ont attendu
leur Monsieur Godot dont la venue quasi messianique les sauverait de la
mort.
Jan Meïssa DIOP
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