En 1980, la «vente» de
M’barka Ghaidour avait été à l’origine des événements ayant conduit à
l’arrestation des militants d’El Hor (mouvement antiesclavagiste) et
au vote d’une loi abolissant l’esclavage. 28 ans après, Ghaidouma Kaka
Mint Ahmed, fille de M’barka, a été libérée par une mission de la commission
nationale des droits de l’Homme. Elle se trouve actuellement à Nouakchott
et va rejoindre sa mère à Atar la semaine prochaine. La CNDH a également
libéré une autre femme, Barakatou Mint Said
Esclavage : Ghaidouma Mint Ahmed
« Ils sont tous partis ». En plus de Barakatou, la mission de la CNDH a ramené de la
localité Ghroumbeit (Tagant) Ghaidouma Kaka Mint Ahmed
et ses sept enfants (six filles et un garçon). C’est par l’intermédiaire de Salka,
une des filles de Ghaidouma que SOS Esclaves
s’est saisie de ce
cas.
Salka, l’aînée de Ghaidouma avait quitté, il y
quelques mois, Ghroumbeit pour accompagner une des fille de ses « maîtres
» à Nouadhibou. Après quelques jours passée dans cette ville, elle a
pris la direction d’Atar, d’où elle serait originaire et où habite sa
grand-mère M’Barka. A Atar, Salka a rencontré un militant de SOS
Esclave. Elle est arrivée avec ce militant à Nouakchott le 25
mars. Le cas a été porté à la
CNDH qui a envoyé une mission pour plus
d’informations.
Une fois au Tagant, la wali a fait accompagner la mission de gendarmes
pour aller à Ghroumbeit. Ghaidouma, après quelques réticences a fini
par affirmer qu’elle vit habituellement en brousse, loin de la localité de Ghroumbeit
pour garder les animaux. Le lieu où se trouvent les animaux serait à quatre
ou cinq kilomètres de cette localité. Finalement elle a accepté de venir à Nouakchott
avec la mission.
Deux des enfants de
Ghaidouma qui se trouvaient dans d’autres localités de la zone ont été
amenés par les gendarmes. Ghaidouma et ses enfants, avec les
missionnaires de la CNDH,
ont pris le chemin de Nouakchott. La femme et ses enfants on été présenté à la CNDH. Elles
sont libres et ont décidé d’aller à Atar où se trouvent la grand-mère
maternelle des enfants ; M’barka.
Sur la carte d’identité de Ghaidouma, établie en 2006, elle est née en
1968. Quand on lui demande l’identité du père ou des pères de ses enfants,
elle baisse la tête et répond « Ils sont tous partis.» Elle a éprouvé
la même gène, même honte que l’on perçoit chez les femme libérée de
l’esclavage à l’évocation du père de leurs enfants.
La mère de Ghaidouma, M’barka (Ghaidour) n’est autre que la
femme qui, en 1980, avait été à l’origine des événements ayant conduit à
l’arrestation des militants d’El Hor à Atar et Nouadhibou.
Les troubles avaient commencé après l’annonce de la « vente » de M’barka
à Atar. L’histoire, en Mauritanie, parfois, ça donne
l’impression de tourner en rond.
Barakatou Mint Said : « Je veux être indemnisé »
La semaine dernière, une mission de la Commission nationale des droits de
l’Homme (CNDH), conduite par Boubacar Ould Messaoud, s’est rendue
à Aioun pour s’enquérir du cas de Barakatou Mint Said, âgée
d’une quarantaine d’années, «maintenue en esclavage depuis son jeune age.»
Barakatou a été ramenée à Nouakchott et présentée au procureur
de la République.
Elle est libre et demande à être indemnisée pour des
décennies de travail non rémunérée.
Nous avons rencontré Barakatou au domicile de Boubacar Ould
Messaoud à Nouakchott. A Aioun elle avait été présentée au
procureur de la
République avant d’être libérée. Un des ses fils né en
1987, lui aurait été arrachée et affecté au gardiennage des troupeaux quand
il était en sixième année de l’école fondamentale. Barakatou a trois
enfants (une fille et deux garçons), tous de pères différents. Elle a affirmé
avoir perdu de vue ses « trois époux » au moment où elle attendait les
enfants conçus en leur compagnie. Ces enfants connaissent-ils leurs pères ?
La fille de Barkatou, Oumoulkhairy, serait à Atar.
La mère de Baraktou, qui se trouvait à Akjoujt est venue à Nouakchott
pour récupérer sa fille des mains de la CNDH. Lundi
14 avril, à Nouakchott, elle s’est retrouvée avec elle dans le bureau
du Procureur de la
République. Il y avait aussi Me Fatimata M’baye,
présidente de la sous commission violation des droits de l’Homme à la CNDH et Boubacar
Ould Messaoud, membre de cette sous commission.
Barakatou aurait, dans le bureau du procureur, reproché à sa mère de n s’être
jamais occupée d’elle et de n’avoir pas cherché à la voir. Elle aurait
également dit avoir travaillé pendant des années, chaque jour, de quatre
heures du matin jusqu’au coucher du soleil sans aucune rémunération. Toujours
dans le bureau du procureur, Barakatou aurait affirmé n’avoir jamais
été battue parce qu’elle faisait son travail presque naturellement. La mère
aurait dit à sa fille « Tu n’es pas esclave. Tu étais chez les filles de
nos amis qui n’avaient pas d’enfants.»
Barakatou aurait répondu « Je suis libre. Je partirai quand je voudrai.»
Pour que Barakatou ne replonge dans la servitude, des défenseurs des
droits de l’Homme
s’organisent pour lui trouver un logement et une activité
génératrice de revenus. Le représentant de SOS Esclaves à Aioun,
un biologiste en service à l’hôpital régional, qui avait le premier signalé
le cas de Barakatou Mint Said, a été interpellé après le départ de la
mission de la CNDH.
Il a par la suite, était relâché.
Khalilou Diagana
Source :
Le Quotidien de Nouakchott