Violence
contre des manifestants : AMNESTY
épingle la junte
Amnesty International, célèbre organisation de défense des droits
humains sur la planète, dénonce vivement des violences perpétrées par les
forces de l’ordre contre les organisateurs de deux manifestations à
Nouakchott et invite les autorités mauritaniennes au respect du droit à la
liberté d’expression, dans un document rendu publique lundi. Le début d’un
cycle de condamnation qui pousse, en général, les autorités des pays
incriminés à se radicaliser en premier temps, puis à commettre davantage de
fautes.
Les
autorités mauritaniennes, vont-elles éviter de tomber dans ce piège? Ou
vont-elles, comme c’est le cas du Soudan, s’obstiner sur leur voie au
risque de se mettre sur le dos la communauté internationale, un machin trop
lent à se mettre en ordre de marche mais qui rate rarement sa cible ?
Dans
le courant du mois d’avril 2009, Amnesty International relève la répression
violente de deux manifestations réunissant les partis politiques et les
membres de la société civile, et celle de femmes opposés au putsch.
Les organisateurs entendaient protester «de manière pacifique» contre le
calendrier électoral imposé par les autorités issues du coup d’état du 6
août 2008 par lequel une junte sous la conduite du général Mohamed Ould
Abdel Aziz, a renversé le pouvoir de Sidi Mohamed Ould Cheikh
Abdallahi.
A titre d’illustration, le document de l’ONG internationale mentionne la
répression de la manifestation du 19 avril. En fait, un sit-in devant le siège
des Nations Unies à Nouakchott, organisé par des femmes pour dénoncer
les risques de dérive et le potentiel de chaos induit par le calendrier
électoral unilatéral du pouvoir militaire, prévoyant
l’organisation d’une élection présidentielle le 6 juin 2009.
Parmi les manifestantes, des députés, d’anciennes ministres et des
militantes des droits de l’homme.
Des femmes «frappées à coups de pieds, de matraques et de ceinturons»
peut-on lire dans le document accusateur d’Amnesty International. Celui-ci
rapporte notamment le témoignage de l’une des victimes de la répression,
Nebghouha Mint Mohamed Vall, ancienne ministre « j’ai été frappée par les
policiers. J’ai perdu mon voile et ma fille, qui a essayé de le récupérer,
a elle aussi été battue».
Autre cas d’une dame victime de violence citée dans le rapport, Chicha Mint
Denna, fille de Mohamed Ould Denna, président du Parti Travailliste
Mauritanien (PTM), une formation de l’opposition «qui a perdu connaissance
à cause de coups reçus et a du être hospitalisée».
Toujours au chapitre de la spirale infernale manifestations- répression, le
rapport d’Amnesty International revient sur les violences du jeudi 2 avril
dernier en s’appuyant sur le cas de Boubacar Ould Messaoud, président de
l’ONG de défense des droits humains SOS Esclaves «agressé» par des
policiers à l’occasion de la marche du jeudi 2 avril. Celui-ci
déclare «ils m’ont frappé à coups de matraques dans le dos. Ils ont
continué à me rouer de coups jusqu’à ce que je perde connaissance. Le
médecin qui m’a examiné par la suite a dit que le coup que j’ai reçu à la
nuque aurait pu être mortel».
Ce témoignage, qui fait froid au dos, est suivi de l’évocation de cas
concernant les députés Mustapha Ould Bedredine et Kebad Ould Cheikh
«reconnaissables à leur écharpe, mais frappés par les
policiers».
La grande désillusion
Au plus fort des années de plomb, la Mauritanie sous le magistère de
Maaouya Ould Sid’Ahmed Taya, était régulièrement épinglée par les
organisations de défense des droits humains.
Sans revenir à la perfection, les choses ont connu une nette amélioration
dans le cadre d’une transition relativement apaisée du 3 août 2005 au 19
avril 2007. La même embellie s’est poursuivie sous le régime renversé de
Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi.
Cependant, depuis le coup d’état «rectificateur» du 6 août 2008, les
relations entre le nouveau pouvoir et les ONG de défense des droits humains
ont connu quelques heurts. Une méfiance légèrement corrigée par la première
rencontre entre un général Mohamed Ould Abdel Aziz, sur le point «de jeter
l’éponge» et les responsables du Forum National des Organisations de
Défense des droits Humains (FONADH). Un épisode venu agir comme un élément
décrispation.
Cependant, la réaction d’Amnesty International était parfaitement
prévisible après les «incidents» récurrents du mois d’avril. Il
faut probablement s’attendre à des rapports ultérieurs d’autres ONG,
sur ces violences dans une ambiance politique intérieure de plus en plus
délétère.
Cela justement au moment où des manifestations contre des présumés
tortionnaires reprennent hors de notre pays (notamment à Paris). Tous ces
développements sont notés après «le règlement» du passif humanitaire des
années 1990, dans un cadre qui n’a pas permis de situer les responsabilité
s pour le devoir de justice, de vérité et de mémoire.
C’est dire que les princes qui nous gouvernent doivent encore faire preuve
de courage et fournir des efforts pour que notre grosse «illusion»
sous forme d’aspiration à la démocratique, n’accouche d’une toute petit
souris semblable à une nouvelle dictature
«militaire» régulièrement épinglée par les ONG pour «violations» des
libertés fondamentales.
Koucheka
Le 29/04/09
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