Interview
de Mr Hussein Thiam sur OCVIDH
1)
Pouvez vous, vous présentez à nos lecteurs et nous parler de votre
parcours scolaire, depuis l'école primaire jusqu'à ce jour ? Mr
Thiam : Bonjour, d’abord je vous remercie de m’avoir interviewé
sur votre site. Je m’appelle Hussein Thiam, je suis élève au
lycée de Nouadhibou1. J’ai eu un peu de retard sur mes études,
je suis resté 3 ans sans cours, de 2003 jusqu’en 2006.
J’étais au village pendant ces 3 années là (c’est une
situation personnelle que je ne pourrais pas vous dire de plus,
désolé). En 2006 je suis rentré dans la ville où je suis
né qui est Nouadhibou où j’avais aussi débuté mes études du
jardin d’enfant et l’école primaire de la classe 1e AF jusqu’en
3E AF, avant que mon père m’emmène au village pour étudier le
coran. Là-bas aussi j’ai étudié le coran et l’école normale
en même temps de 4e AF jusqu’à 6e AF entre 2001 et 2003
etc. Arrivée à Nouadhibou Mars 2006, j’ai passé le cours de
rattrapage pendant 2 mois. L’année scolaire 2006-2007,je me
suis inscrit à l’école privée Enajah, j’ai fait deux ans
là-bas, puis Al baraka 4 années. L’année prochain (Ish’Allah)
je serai au lycée de Nouadhibou1.
2)
Vous avez tout récemment mis sur la toile un témoignage important
qui stigmatise certaines pratiques esclavagistes que vous avez eu à
assister pouvez vous nous en parler davantage avec assez de
précisions, le lieu, quand comment avez vous vécu ces moments
d'humiliation et de rejet de la société ? Mr
Thiam : Ces faits ne sont pas mensongers, ni inventés. Se sont des
faits réels qui existent jusqu’à nos jours que beaucoup d’entre
nous nient. En faite du village X et dans tous les villages
que j’ai fréquenté au sud du pays, l’esclavage persiste
encore, une fois c’était lors de la fête de tabaski, j’ai
assisté avec mon cousin dans une discussion avec ses ami(e)s.
Soudain l’un des ses amis se lève et lui dit va apporter les
matériels du thé et prépare toi à le faire. Mon cousin était
presque plus âgé de tous, je l’ ai dit de s’assoir et
de ne pas le faire. Derrière moi se trouvait un jeune homme moins
âgé que nous tous, je l’ai dit gentiment, mon frère, tu
peux faire le thé ? Le petit m’a répondu tu es fou ? J’ai
répondu Non. Il répliqua ici ou ailleurs vous êtes les seuls à
pouvoir le faire OK ? J’ai répondu Non et pourquoi nous seuls ?
Ya plein du monde ici ! Il m’a dit mon pote, vous êtes des «
Mathioubés
», votre travail c’est ça « faire du thé » etc. je
lui réponds Ah ok , c’est comme ça ? S’en est suivi une
dispute avec le bonhomme qu’à la situation a dégénérée à une
bagarre et finalement nous sommes rentrés chez nous. Parmi tous les
élèves présents, personne n’a pris notre défense. Le
Vendredi est un grand de prière pour les musulmans du monde entier,
je suis allé à la mosquée, dans le même village malheureusement,
je ne peux pas vous citer le nom par crainte de représailles sur
mes parents et amis. L'Imam « Torodo » (Noble) de la
mosquée a mis un peu de retard et pourtant parmi les fidèles, il y
avait un Imam « Mathioudo » (Esclave) du nom de Thierno
Alpha.
Tout le monde le connait que son âme repose en paix(amiin) qui
pouvait conduire la prière puisque l'autre était en retard, dés
que « j'ai dit devant les fideles, laisser Thierno
Alpha
présider la prière » tout le monde me regarda. Mon cousin me
fait signe pour que je me tais. Finalement nous avons attendu
jusqu'à l'arrivée de l'Imam à 15H et quelques, d’habitude ils
prient entre 14H et 14H15. De retour à la maison on m'expliqua
tout, deux jours plus tard j'ai quitté le village. Jusqu’a
présent je ne suis pas retourné là-bas mais ça existe
toujours.
3)
Quelles
seront désormais les méthodes de lutte que vous engageriez pour
dénoncer ces pratiques d'une autre époque, pensez vous utiliser
aussi parmi ces méthodes, le coran pour démontrer à tous ces
ignorants de savoir que les critères d'être Iman sont bien définis
et ne font aucunement références aux origines sociales ou à la
couleur de la peau? Contrairement à ce qui se passe dans nos
mosquées en Mauritanie. Mr
Thiam
: Je n’ai aucune méthode, je ne suis pas encore prêt pour
m’engager dans ces conflits parce que, se sont des conflits qui
vont durer des années voir des décennies.
4)
Que
pensez vous de la lutte de l'IRA, et de la détention arbitraire de
son président Biram Ould Dah ould Abeid? Mr
Thiam : L’IRA est le seul mouvement qui peut faire face à ce
phénomène (esclavagisme) qui existe partout dans le pays. C’est
un mouvement abolitionniste qui milite pour les droits humains.ils
ont le courage, la force et ils sont déterminés à aller jusqu’au
bout. Je les souhaite bon vent ! Biram
est
un prisonnier d’opinion. On l’accuse d’avoir brulé des livres
de droits musulmans du « rite malékite». Alors que Biram a pris
soin de ne pas jeter dans les flammes les pages comportant des
passages du Coran ou des mentions du nom d’Allah et de son
prophète Mohamad (psl). Biram
Ould Abeid
doit être libéré avant que la situation ne dégénère .
a)
N'est-il pas victime d'un règlement de compte politique et d'avoir
eu le courage de créer une synergie entre les communautés de
Victimes: Haratine, Peulh, Sooninké, Wolof et Bambara, soumises à
toutes les oppressions des autorités de l'indépendance à nos
jours? Mr
Thiam : Bien sûr que c’est un règlement de compte Biram est allé
jusqu’au bout, c’est grâce à lui si je ne me trompe pas
, le congrès américain avait lancé une pétition sur face book
pour aider la Mauritanie à abolir l’esclavage demandant nos
signatures et le congrès avait même condamné Mauritanie. IRA
Mauritanie n’est pas extrémiste. C’est un mouvement pacifique
qui se bat pour l’abolition total de l’Esclavage en
Mauritanie.
b)
A votre avis ne faut-il pas intensifier les manifestations et
d'autres actions concrètes de revendications pour obtenir tous
ensemble l'éradication de l'esclavage, du racisme et du partage des
richesses nationales ? Pouvez-vous nous donner quelques pistes à
suivre, votre génération peut elle réussir à ce défi ? Mr
Thiam : Je pense tôt ou tard ça arrivera, le pays est
dominé économiquement et politiquement par les maures.
Alors que les negro-mauritaniens souffrent de famine au sud. Pour
éviter le génocide Rwandais (je ne le souhaite pas) le
gouvernement doit prendre des mesures face à cette situation, trop
c'est trop. La révolution sera un peu difficile parce que les
jeunes Mauritaniens n’ont pas ce courage pour l’instant, Je les
vois sur les réseaux sociaux comme facebook, beaucoup se cachent
derrière leurs pseudos pour dénoncer les faits, cela nous
emmènera à rien, le combat se fait sur le terrain pas
dans les réseaux sociaux, Ils devraient se montrer et s’unir pour
faire face à cette situation « l’Union Fait La Force
».Ainsi nous pourrons aller manifesté sur le terrain ensemble. Le
peuple est comme un volcan, quand il est en éruption les dégâts
seront colossaux voir catastrophiques.
5)Les
anciennes générations ont marqué certes des points, il ya eu des
bas et des hauts dans leur lutte contre les esclavagistes au pouvoir
à Nouakchott. Que proposent les jeunes de votre génération,
Haratine, peulh, Wolof et bamabana, votre unité est elle une
réalité ou une fiction ? Mr
Thiam : Notre génération est différente de celle de
l’ancienne. Les anciens étaient des «jaambars», ils
étaient des hommes d’abnégations, ils étaient
marginalisés certes. Mais ils continuent toujours de dénoncer ce
qui se passe dans le pays. Mais la génération d’aujourd’hui ne
sait même pas ce qui se passe dans le pays. Vous savez pourquoi ?
C’est le manque de communication. Pas d’unité entre-nous les
jeunes. J’ai même créé un groupe sur Facebook (JEUNESSE
DE LA RIM)
pour essayer de les réunir et qu’on puisse discuter mais en vain.
Ils rentrent par ici et ressortent par là, Bref beaucoup sont des
incultes qui ne croient en rien.
6)
pour revenir à votre calvaire lors de tes vacances: pouvez vous
nous dire si l'Iman qualifié d'esclave est toujours en vie ? Que
devient t-il ? N’est-il pas possible de nous permettre de le
rendre hommage pour sa grandeur
? Mr
Thiam : Mal heureusement il est décédé il ya 4 ans ! Que son âme
repose en paix (amiin).
7)On
accuse souvent certaines communautés de séparer leurs morts, alors
que depuis les temps immémoriaux, les populations enterrent leurs
proches par des carrés ou des caveaux, comme en Europe, alors que
l'on indexe souvent les soninkés de distinguer les morts ,alors
l'argument de ,familles, de caveaux, fratrie est souvent évoqué,
que répondez vous à ces allégations par rapport à la pratique de
l'esclavage ? Mr
Thiam : Je n’irai pas loin dans ce sens, j’avais vu un lien
posté sur face book disant que les Soninkés (nobles) n’enterrent
pas leurs morts avec leurs (esclaves). C’est le pire
scenario que je n’ai jamais entendu parlé. Je condamne fermement
cette pratique, c’est inacceptable de voir ça ou même de
l’entendre.
8)
Pouvez vous nous dire depuis quand vous militez et dans quel parti
politique ou ONG ? et que pensez vous de toutes ces ONG et partis
politiques en Mauritanie et à l'extérieur ? Peuvent ils changer la
donne et comment? Mr
Thiam : Bon, je ne milite pas encore ! Actuellement je suis Membre
de la Fédération du MAP/Mauritanie du Mouvement Action
Panafricain. Je suis le porte parole du Mouvement. Je ne parle
pas les partis politiques, parce que se sont des marionnettes
d’Aziz. J’ai des bonnes relations avec le Coordinateur du TPMN.
Mr
Wane
on discute souvent sur le réseau social facebook, la dernière
fois qu’on n’a discuté, nous avions échangé nos numéros
de téléphones en cas de besoin. De l’extérieur j’admire les
FLAM,
c’est un mouvement qui milite pour la Justice, Liberté et
l’Egalité. Peuvent-ils changer la donne ? Je crois que oui,
leur combat sera long, s’ils sont unis, ils arriveront. Il faut
qu’ils essayent de multiplier des manifestations, surtout
s’entendre entre eux.
Pouvez
vous dire un mot aux lecteurs de l'OCVIDH? Mr
Thiam : J’invite tous les Mauritaniens assoiffés de justice, à
se mobiliser pour soutenir les Organisations des droits de l’Homme
etc. Dire La vérité, est un devoir de Citoyen !
Interview
réalisé par Binta Wagué de www.ocvidh.org ce
17 Aout 2012
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